Les orgues Cavaillé-Coll en Haïti :

cathédrale de Port-au-Prince



 

L'ancienne et la nouvelle cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption (1884) de Port-au-Prince détruite lors du tremblement de terre du 12 janvier 2010
( coll. O.Geoffroy )

 

Les apports éventuels de lecteurs sont les bienvenus, notamment pour ce qui concerne la composition des orgues mentionnés ci-après et les éléments historiques ou témoignage s'y rapportant.

 

 

Pour la première cathédrale Notre-Dame-de-l'Assomption de Port-au-Prince (grand bâtiment en bois construit à la fin du XVIIIème siècle, consolidé et agrandi en 1849), c'est Aristide Cavaillé-Coll qui avait été choisi pour la construction d'un petit orgue de choeur de quatre jeux à un clavier manuel et dont le coût s'élevait à 5 500 francs. Il fut inauguré en 1860 (livré le 31 mars).

 

Il figure dans l'inventaire Mutin de 1923 (Paris, Sénart, p.30) : « Port-au-Prince _ Orgue de choeur »

 

On possède quelques maigres témoignages sur cet instrument :

 

« Ce n'est pas un chef-d’œuvre d'architecture que l'église cathédrale de Port-au-Prince, tant s'en faut, mais en revanche elle est grande, aérée, sonore. Rien d'ailleurs qui charme les sens, attendrisse le cœur, ou élève l'âme. Les vitraux brillent par leur absence ; les tableaux, sauf un nombre restreint, sont des croûtes, auxquelles un artiste préférerait la nudité glaciale des temples wesleyens. On aurait beaucoup à dire et sur l'orgue qui ne vaut guère mieux (tant il est mal joué) qu'un orgue de barbarie, et sur la voix nasillarde des chantres. »
(Le Moniteur Haïtien, 6 novembre 1867, p. 1)

 

« Ces frères ignorantins qui dirigeaient la maîtrise, enveloppaient les chants religieux des sonorités du grand orgue, n'étaient-ce pas encore des Français ? »
(Paul Deléage, Haïti en 1886, Paris, Dentu, 1887, p. 109-110).

 

« Pendant le voyage que nous venons de faire dans la vieille Cathédrale et dans la Place qui l'entoure, aucun sourire n'est venu sur vos lèvres, aucun rayon de soleil n'a jeté une note de gaieté dans l'ombre où je vous ai conduits. Nous sommes allés dans une église, vieille de deux cents ans, où les orgues se sont tues, où l'on n'entend plus les hymnes d'actions de grâces. »
(Revue de la Société d'histoire et de géographie, janvier 1934, p. 38)

 

L'instrument avait-il été augmenté au fil des ans ou était-il resté dans son état originel ? Quoi qu'il en soit, rien n'indique qu'il ait été transféré dans la nouvelle cathédrale, dont la construction avait débuté en 1884.

 

Celle-ci fut enfin consacrée le 20 décembre 1914 et il fallut encore attendre 1923 pour qu'un grand orgue adapté au volume de l'édifice y fasse son entrée.

 

C'est à la manufacture Mutin-Cavaillé-Coll que la fabrique avait fait appel pour un instrument de prestige posé en tribune. Le prix de cet orgue se montait à 100 000 francs. Son financement avait été assuré par des loteries, kermesses et trois ans avaient été nécessaires pour réunir la somme.

 

« L'instrument, fabriqué par la Maison Cavaillé-Coll de Paris est embarqué en septembre 1923 et arrive à Port-au-Prince la deuxième semaine d'octobre. M. G. Berthelot, ouvrier spécialisé de la fabrique Cavaillé-Coll, est envoyé en Haïti pour le monter. Après trois mois d'un travail opiniâtre et consciencieux, l'orgue est prêt. »

(Georges Corvington, La Cathédrale de Port-au-Prince – Histoire d'une construction, Editions Deschamps, 1978, p. 38)

 

L'inventaire Mutin de 1923 le mentionne également (p. 30) : « Port-au-Prince, Cathédrale _ Grand-Orgue. »

 

Inauguré le 30 mars 1924 au moment de la consécration épiscopale de Mgr Jan, coadjuteur de l’archevêque de Cap-Haïtien, l'orgue, détruit avec la cathédrale par le terrible tremblement de terre du 12 janvier 2010, possédait un buffet en deux parties, afin de ne pas masquer la rosace. Comme dans d'autres instruments de Mutin, les tuyaux de façade dépassaient du sommet des plates-faces latérales.

 

Au regard de son prix d'achat et de sa configuration, il devait être doté d'une trentaine de jeux. Mais il avait cessé de fonctionner peu à peu à partir des années 1950, en raison de déprédations et des ravages du climat, et les célébrations étaient accompagnées par un orgue électronique. En dépit de quelques velléités de restauration et de plusieurs demandes auprès de facteurs d'orgues français et canadiens, il n'avait jamais été réparé.

 

Olivier Geoffroy

(décembre 2020 – mise à jour : août 2021)

 

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