GASTON STOLTZ
(1890 – 1976)



Écusson du Lycée Henri Poincaré de Nancy
Écusson du Lycée Henri Poincaré de Nancy
( coll. abbé Pierre Dubois 1912-1997, aumonier du Lycée Poincaré )

S’il est un professeur de musique qui a marqué des générations d’élèves au Lycée Henri Poincaré de Nancy, c’est bien Gaston Stoltz.

Il est né le 26 avril 1890 dans une famille de musiciens. Très tôt, il commence l’étude de l’alto, instrument qu’il devait pratiquer plus tard comme soliste pour les concerts de l’Association Lorraine de Musique de Chambre. Au Conservatoire de Nancy, il a Joseph-Guy Ropartz (1864-1955) comme professeur d’harmonie. Dès son arrivée dans la ville de Stanislas en 1894, Ropartz avait apporté un souffle nouveau à la vie musicale. Les concerts annuels donnés à la salle Poirel qu’il avait dotée d’un orgue Cavaillé-Coll attiraient un public toujours plus nombreux. Lorsqu’il quitta Nancy pour Strasbourg, en 1919, les bases sur lesquelles son successeur à la tête du Conservatoire Alfred Bachelet (1864-1944) allait s’appuyer étaient solides.

Entre temps, Gaston avait perfectionné son talent et c’est en 1919 qu’il entra comme professeur au Lycée Poincaré de Nancy où son père Guillaume l’avait précédé. Il y avait fondé un petit orchestre que son fils se chargera de développer en y ajoutant un chœur. Avec cette formation, il donna un premier récital le 7 décembre 1919 et rencontra un franc succès. A partir de 1925, l’administration de l’établissement accorda des bourses à quelques élèves désignés par Gaston Stoltz. Ils purent ainsi bénéficier de l’enseignement instrumental dispensé par des professeurs du Conservatoire. Leur talent permit à certains d’entre eux de monter à Paris.

Salle Poirel, Nancy
Nancy, Salle Poirel où Gaston Stoltz se produisait en concert avec son orchestre
( coll. O. Geoffroy )

Le professeur " à la barbe fleurie " fut efficacement secondé dans sa tâche par Emile Verstraeten, fils d’un professeur du Conservatoire de Nancy. Ce dernier dirigea le petit orchestre des élèves de moins de quinze ans jusqu’à sa mort héroïque à la libération de Nancy le 15 septembre 1944.

Les concerts donnés par le chœur et l’orchestre de Poincaré étaient réputés. Qu’on en juge par la qualité des œuvres exécutées dont voici quelques titres : Quatrième Symphonie de Beethoven, L’Enfance du Christ et La Damnation de Faust de Berlioz, La Flûte enchantée de Mozart, Les Béatitudes de César Franck, Didon et Enée de Purcell, Les Danses du Prince Igor de Borodine, Les Indes galantes de Rameau, Orphée de Glück... Peu de lycées peuvent se vanter d’un travail aussi gigantesque.

Une face moins connue de Gaston Stoltz : son activité de compositeur. On trouve à la Bibliothèque municipale de Nancy une grande partie de ses œuvres manuscrites (Du Crépuscule à l’aurore, Une Histoire de Noël – le Père Noël est bien embêté : il a perdu sa lanterne...).

Notre altiste virtuose fit partie du Quatuor Jamar qui, en 1930, donna, avec la participation du pianiste Louis Thirion (1879-1966) le Quintette que Florent Schmitt avait écrit en 1908.

Enfin, il convient de signaler que sa grande culture musicale lui valut d’être membre de l’Académie de Stanislas fondée le 28 décembre 1750 par l’ancien roi de Pologne. Correspondant associé dès 1968, il fut officiellement reçu le 16 juin 1972. Il avait donné une conférence sur trois compositeurs lorrains : Gustave Charpentier, Gabriel Pierné et Florent Schmitt le 15 octobre 1971. En débutant sa communication, il n’eut garde d’omettre de rendre hommage "  à deux disparus, grandes figures nancéiennes qui ont contribué au renom et au prestige du Conservatoire de Nancy : Guy Ropartz qui en fut le directeur de 1894 à 1918 et Pierre Bretagne1 ". Docteur en droit, ancien élève de Ropartz, Pierre Bretagne (1881-1962) a joué un rôle important comme musicographe à Nancy au cours de la première moitié du XXè siècle. Il a écrit de nombreuses œuvres pour diverses formations dont des mélodies pour chant et piano d’une grande fraîcheur.

Gaston Stoltz mourut le 28 juin 1976 à son domicile de la rue du Grand Verger située dans un quartier bourgeois de Nancy.

En 2004, le lycée Poincaré fête son bicentenaire. L’enseignement musical y reste important puisque c’est en son sein que sont formés les futurs candidats au baccalauréat de musique (F 11). Actuellement, l’orchestre qui continue à fonctionner porte le nom de Gaston Stoltz.

Olivier Geoffroy

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1) Mémoires de l'Académie de Stanislas, années 1970-72, 7è série, tome I, Nancy, 1973, p. 329. [ Retour ]



Gaston Stoltz

petite revue de presse

 

 

« Aux concours du Conservatoire de Paris, un de nos compatriotes a remporté un succès marqué. M. Gaston Stoltz, fils du sympathique professeur de musique au lycée et à l'Ecole normale de garçons de Nancy a remporté brillamment un premier prix de trombone. »

(L'Alsacien-Lorrain de Paris et des départements, 21 juillet 1912, np)

 

« M. Gaston Stoltz, professeur de musique à Nancy, fils du sympathique professeur au Lycée Poincaré, a été blessé d'un éclat d'obus, à Frescaty. »

(Pages de guerre écrites au jour le jour, Nancy, Rigot et Cie, 1914, p. 442)

 

« Remarquable audition annuelle de l’Orchestre et de la Chorale du Lycée Henri Poincaré.

Nancy, 27 mars. Tant au Conservatoire (où il donnait mercredi après-midi un remarquable concert-exercice de la classe d'ensemble, qu’au lycée Henri Poincaré, où il répand, après son père, le goût et la pratique de la musique, M. Gaston Stoltz nous avait, semble-t-il, habitués aux miracles. Et pourtant, mercredi soir, à la salle Poirel, avec son orchestre et sa chorale de lycéens, il est apparu à tous qu'il avait encore dépasse de quelques degrés ce que l’on s’étonnait déjà de lui voir réussir.

Rappelons-nous que c'est au lendemain de la guerre, au cours de l'année scolaire 1918-1919, que l’orchestre prit naissance. Et M. Ch Bohême a écrit à ce sujet : « Un important contingent de jeunes Alsaciens, presque tous instrumentistes ou chanteurs, était venu, après l'Armistice, grossir le nombre des internes. M. Gaston Stolz, qui, cette année-là, recueillait, comme professeur de musique, la succession paternelle, conçut l'heureux projet de grouper, au tour de ce noyau de bons exécutants, tous les élèves qui manifesteraient les aptitudes requises et de fonder ainsi an orchestre et une chorale, destines à susciter et à développer, dans notre lycée le goût de la vraie musique. »

Au bout de trois ans, l’orchestre était capable d'exécuter les deux premiers mouvements de la symphonie en ut mineur de Beethoven. ... Et le 25 mars 1931, orchestre et chorale nous faisaient entendre un concert d’une haute tenue artistique, préparé avec soin, nous dirions presque avec amour, car, pour ainsi donner de la musique, il faut auparavant s’être donné, de cœur, à elle. Et tout cela qui signifie : travail et goût du travail, ne serait rien encore si M Gaston Stoltz n’était un excellent chef d’orchestre. Il comprend, il sent ce qu’il fait jouer, il l’étudie lui-même scrupuleusement Aussi sa façon de poser les œuvres dans leurs mouvements exacts, d’en rendre expressive la gamme de nuances, d’en exalter l'âme, une fois que la forme est aussi polie qu’il se peut être par des exécutants non professionnels, tient-elle, comme je l’ai dit tout à l’heure, du miracle. [...]

Que nos félicitations et nos encouragements les plus chaleureux aillent d’abord aux maîtres éminents qui favorisent cet effort de culture générale. A M. le recteur, à vous, M. l’inspecteur d’Académie, à vous M. le proviseur, à vous M. Gros, qui montrez à ces jeunes gens en quoi l'évolution de l'art musical se relie intimement à celle de notre histoire, de notre littérature... à M. Bachelet, qui tient ici le. Sceptre de l’enseignement musical et apporte à ces jeunes gens un appui constant, une sympathie agissante. Enfin, à vous M. Gaston Stoltz qui, depuis douze ans, êtes l’animateur de ce groupement symphonique et choral. Les résultats que vous obtenez sont proprement merveilleux ; ils sont la juste et brillante récompense de votre labeur artistique, le témoignage éloquent de votre autorité, de votre goût, de la générosité du cœur qui bat dans votre poitrine d’apôtre. »

(Le Télégramme des Vosges, 28 mars 1931, p. 4)

 

« La musique dans les lycées et collèges.

Que les élèves d'un lycée, sans être distraits le moins du monde du temps réglementairement consacré à leurs études, puissent constituer un ensemble orchestral et vocal de 160 exécutants, sur le modèle de nos grandes associations symphoniques, professionnelles, voilà sans doute un légitime sujet d'étonnement. Telle est cependant l'œuvre réalisée par M. Gaston Stoltz, professeur de musique au lycée Henri-Poincaré, à Nancy. »

(Le Journal, 30 mars 1931, p. 7)

 

« Nancy. — Je vous ai dit l'an dernier, lors de sa venue à Paris, les qualités déjà remarquables du jeune orchestre formé au Lycée Henri-Poincaré de Nancy, grâce aux méritoires efforts du proviseur M. Fraissé et du directeur artistique — chef d'orchestre M. Gaston Stoltz. J'avais même déploré que cette visite, sur laquelle leur attention avait pourtant été attirée par un musicien de la valeur de M. Alfred Bachelet, directeur actuel du Conservatoire de musique de Nancy, ait semblé paraître négligeable aux yeux de la plupart des critiques musicaux, et des hautes personnalités officiellement chargées de veiller à la « rénovation et au développement des études musicales » en ce pays. L'avenir de notre musique n'est-il pas pourtant étroitement lié à une réforme complète, à ce point de vue, des programmes de l'enseignement primaire et secondaire, d'où elle est complètement bannie, ou reléguée au rang de parente pauvre, de négligeable « art d'agrément » ! [...]

Après l'heureuse initiative de M. Roger-Ducasse, créant une chorale parmi les professeurs des Ecoles primaires de la Ville de Paris, l'exemple de l'orchestre et de la chorale du Lycée Henri-Poincaré de Nancy est à retenir et à méditer. Puisse-t-il porter bientôt tous ses fruits ! et stimuler le zèle des recteurs et des proviseurs de nos grands lycées de Paris et de province. Car il ne faut pas l'oublier : ce n'est qu'en introduisant largement la musique dans l'enseigne[1]ment qu'on a chance d'arriver à modifier de façon appréciable à son égard la mentalité des générations futures. Seule cette réforme indispensable permettra de former progressivement chez nous un vaste public, capable d'apprécier la véritable valeur de ce qui lui est offert et d'exiger au besoin que le Parlement vote les crédits nécessaires pour qu'on puisse, ici comme ailleurs, tirer le meilleur parti de ressources artistiques dont la France a le droit d'être fière et qui contribuent, plus que ne le pense la majorité de nos élus, à assurer son prestige dans le monde.

Gustave Smazeuilh. »

(Le Ménestrel, 27 juin 1930, p. 297-298)

 

« Pourquoi ne tenterait-on pas dans toute la France ce qui a si bien réussi au Lvcée de Nancy, où un homme de foi, M. Gaston Stoltz, a fondé une chorale et un orchestre symphonique à effectif complet, avec le concours de M. Gros, professeur d'histoire, qui s'est chargé du cours d'histoire de la musique, prévu — mais non organisé partout — depuis 1925. Or, cette chorale et cet orchestre fonctionnent si parfaitement, qu'au dernier concert on a pu exécuter des œuvres aussi variées et aussi difficiles que le Children's corner, des fragments de la Flûte Enchantée, de Rédemption, des Impressions d'Italie. Et les élèves musiciens ne répètent et ne travaillent leur instrument qu'aux heures de loisir. Quatre-vingts pour cent d'entre eux ont passé brillamment leurs examens, proportion supérieure à celle qui est fournie par les non-musiciens. »

(L'Oeuvre, 16 mai 1931)

 

« L'édition musicale.

Les violonistes exerceront leur sagacité sur un Choral et Scherzo-Caprice, adroitement écrit de M. Marcel Dautremer, les altistes sur une Réminiscence de M. Gaston Stoltz qui satisfait à son titre. »

L'Art musical, 30 juillet 1937, p. 882)

 

« L'orchestre et la chorale du lycée Poincaré de Nancy ont fêté le 20ème anniversaire de leur fondation par un magnifique concert où se distinguèrent tout d'abord les moins de treize ans, chœurs et orchestre, que dirigea M. Verstraeten ; puis leurs aînés, sous la direction de M. Gaston Stoltz, à qui M. Chevalier, président, offrit un objet d'art, en reconnaissance de vingt années d'inlassables efforts artistiques. »

(Le Matin, 16 juillet 1938, p. 5)

 

Collecte : Olivier Geoffroy

(mars 2022)


 


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