Petite revue de presse relative aux œuvres de Daniel-Lesur
Daniel-Lesur
(coll. famille Daniel-Lesur/DHM) DR.
Daniel-Jean-Yves Lesur (1908-2002), dit Daniel-Lesur, a étudié l'écriture musicale auprès de Jean Gallon et de Georges Caussade. Il a également été l'élève de Charles Tournemire, qu’il suppléait à l’orgue de Sainte-Clotilde, avant d'enseigner le contrepoint puis de diriger la Schola Cantorum de Paris. Inspecteur général de la musique, fondateur du groupe « Jeune France » en 1936 avec Yves Baudrier, André Jolivet et Olivier Messiaen, il a composé dans différents genres (des opéras, de la musique de chambre, des pièces pour orgue et de la musique de films...) Ajoutons aussi qu’il toucha l’orgue de l’abbaye Sainte-Marie (Paris 16e) durant une dizaine d’années.
*
« De la nécessité d'un tel effort, M. Daniel Lesur se rend, au contraire, nettement compte. Sa Pastourelle, pour piano, est en effet une courte pièce, lumineuse et fraîche. Sobre et robuste esquisse ; vivante découpure ; avec tout un arrière-fond, subtil et nuancé. »
(Le Ménestrel, 31 janvier 1930, p. 49)
« Tout à fait à part furent les instants où un jeune compositeur M. Daniel Lesur, loin de toute emphase, joua une délicate et sombre pièce, Berceuse pour les agonisants, que lui a inspirée le poème de Paul Fort. De ce poème il n'a retenu que l'essence ; et, des mots rien ne persiste qu'un vague murmure, transmué et emporté par les notes du piano. Aucune rhétorique ; aucune redite ; aucun ornement superflu ; rien que quelques traits, mais qui suffisent pour que toute une scène et tout un état d'âme soient évoqués. »
(Le Ménestrel, 6 février 1931, p. 59)
« Société Nationale de musique, 23 janvier [1932].
Parmi les autres oeuvres qui de même étaient données en « première audition », j'isolerai la mélodie que M. Daniel Lesur a composée sur un poème de Paul Fort : la Mort des voiles. Loin de tout effet vulgaire, et au contraire avec une force sobre, cette mélodie arrive à saisir quelque chose de l'espace marin. De sa constance et de sa versatilité perpétuelles, et de ce grand silence qui semble tout d'un coup l'envahir puis être envahi lui-même par un appel démesuré. Un remarquable chanteur, M. G. Cathelat, fut pour ces pages, et pour celles qui les précédèrent : Harmonies intimes, un très persuasif interprète. »
(Le Ménestrel, 29 janvier 1932, p. 46)
« Combien est-il regrettable de voir un jeune musicien, bien doué, se soumettre à une technique et à une esthétique d'importation au lieu d'utiliser ce qui est en lui ! — C'est le cas de M. Daniel Lesur. Sa Suite pour piano : les Carillons, est pleine d'idées charmantes mais, trop souvent, gâchées par des procédés d'ultra-modernisme. Que M. Daniel Lesur se laisse donc aller à sa nature, il peut être un délicat musicien, conforme au génie de la race française. »
(Le Ménestrel, 27 mai 1932, p. 229)
« Dimanche 17 mars [1935].
L'Orchestre Symphonique de Paris donnait en première audition une Suite Française de M. Daniel Lesur. Composée de trois parties (Divertissement, Menuet, Cantilène et Ronde pastorale), elle ne manque pas d'intérêt, bien que, à part la poétique Cantilène qui sert d'introduction à la Ronde pastorale, les idées musicales ne soient pas très originales. Cependant, l'auteur, maniant l'orchestre avec une incontestable adresse, arrive à d'heureuses colorations et sait donner de la vie à la matière sonore. »
(Le Ménestrel, 22 mars 1935, p. 101)
« La Suite Française de M. Daniel Lesur a été remarquablement présentée par M. Nin-Culmell. Le Divertissement initial en est vif, d'une charmante facture harmonique. Le Menuet rend, par moments, de délicats hommages à Ravel. Et aussi La Cantilène. La Ronde pastorale visitée par un thème de sentiment populaire est d'un rythme décidé. »
(Comoedia, 20 mai 1935, p. 1)
« Les Interludes de M. Daniel Lesur, destinés à quatre cors, sont pleins d'une franchise décidée et d'intentions malicieuses, et les sonorités cocasses pimentent un ensemble élégant. »
(Le Ménestrel, 17 janvier 1936, p. 22)
« INTERLUDES pour 4 cors (Daniel Lesur). — 1) Quasi recitativo ; 2) Deciso ; 3) Andantino ; 4) Un poco scherzando ; 5) Giocoso.
Ces cinq pièces ne relèvent d'aucun prétexte littéraire mais caractérisent une suite d'états d'âme allant de la véhémence à la tendresse et du calme à l'ironie. Leur forme n'obéit qu'à leur caprice, mais la concision est leur loi. »
(L'Art musical, 10 janvier 1936, p. 226)
« SUITE FRANÇAISE (Daniel-Lesur). — Cette suite, écrite en 1934, dont l'O.S.P. donna la première audition en 1935, ne comporte aucun autre programme que son titre. Les trois parties qui la composent : I) Divertissement ; II) Menuet; III) Cantilène et Ronde pastorale, ne forment pas un ensemble cyclique; cependant leurs éléments naissent librement d'une cellule unique et sous entendue constituée par la succession: do, sol, ré (en quartes descendantes). Du point de vue orchestral, le souci dominant a été la clarté. »
(L'Art musical, 29 mai 1936, p. 731)
« Société Nationale - 25 mai [1936]
Avouons avoir peu goûté l'Hommage à Bach de M. Daniel Lesur, dont l'inspiration semble discutable (l'auteur n'affirme-t-il pas avoir voulu s'éloigner du pastiche ? La gageure a été mal tenue). L'oeuvre sans doute ne s'imposait pas. »
(Le Ménestrel, 5 juin 1936, p. 185)
« Concert de la Jeune France (3 juin).
C'est ainsi encore que Daniel Lesur, en cette Suite Française que nous fit connaître déjà Pierre Monteux il y a un an, affirme un tempérament de clair et incisif logicien, soucieux d'écrire ferme et net. »
(Le Ménestrel, 12 juin 1936, p. 192)
« La Passacaille de M. Daniel-Lesur, pour piano et orchestre, est l'oeuvre, elle aussi, d'un bon artisan plutôt que d'un musicien inspiré. Elle est d'un ton tantôt solennel et martial, tantôt spirituel et joyeux, et se termine d'une manière largement lyrique. Des recherches intéressantes dans l'expression, d'un effet un peu gros, lui donnent un tour original. L'auteur, au piano, reçut un accueil des plus flatteurs. »
(Le Ménestrel, 11 juin 1937, p. 181)
[Concert au Pavillon du Vitrail à l’Exposition Universelle, organisé par Maurice Brillant] «… Il faut ajouter que l'orgue (un orgue nouveau, un orgue électrique Hammond) était tenu par un jeune et parfait organiste, Daniel-Lesur, et que cet organiste est lui-même un compositeur remarquable, déjà fort connu, très « moderne » et appartenant à la dernière équipe de la musique française ; je ne parle pas de ses mélodies, chantées par le magnifique Bernac et très applaudies, parce qu'elles sont « profanes » et que je n'ai ici à m'occuper que de l'art religieux ; mais son In Paradisum pour orgue (succédant à des pièces anciennes) a fait, pour notre joie, monter sa poésie subtile de paix et de lumière parmi la féerie multicolore des vitraux illuminés, — exemple achevé de cette commune atmosphère, de ce climat de l'oraison — créé à la fois par la musique des instruments et la musique silencieuse du verre ensoleillé. »
Maurice Brillant
(L'Art sacré, janvier 1938, p. 20-21)
« Charmantes piécettes que les Cinq Interludes pour cor de M. Daniel Lesur, auxquelles les ondes Martenot prêtèrent leurs séductions sonores. Ainsi conçues, elles perdent en alacrité ce qu'elles gagnent en charme. »
(Le Ménestrel, 14 janvier 1938, p. 6)
« Société Nationale (8 janvier).
La Pastorale de M. Daniel Lesur, pour orchestre réduit, est charmante et ingénieuse, à la manière d'un simple divertissement. La langue est aisée et se meut avec grâce dans les différents registres tendres ou ironiques, rêveurs ou joyeux, de cette aimable partition. »
(Etudes, avril 1938, p. 801)
« Jeune France (Ecole Normale de musique, 12 mai)
Pastorale de M. Daniel-Lesur évoque un paysage, par des soliloques ou colloques de personnages tendres ou ironiques, rêveurs ou joyeux, et dont les caractères sont appropriés, non sans une certaine adresse, à chacun des instruments. La composition est assez pauvre d'idées et d'efforts d'invention. Elle emploie surtout les instruments isolément et s'attarde, dans leur groupement, à de faciles effets de polytonalité. »
(Le Ménestrel, 20 mai 1938, p. 139)
« La Passacaille pour piano et orchestre de Daniel Lesur pare de quelque fantaisie une forme réputée austère depuis Buxtehude, Bach, Brahms. (Voilà, n'est-il pas vrai, « trois B » auxquels on ne s'attendait guère.) Le thème ici, loin d'être immuable, change d'allure et même de caractère, de binaire devenant ternaire comme dans la Canzona. L'oeuvre plaît par sa vivacité, ses couleurs. Elle eût cependant gagné à une plus sévère gradation dans le pathétique, amenant la réexposition à un point culminant d'intérêt à maintenir et resserrer. »
(Le Ménestrel, 30 juin 1939, p. 180)
« Daniel Lesur et Yves Baudrier à l'Orchestre National.
Ce n'est pas par hasard, j'imagine, que les noms de Lesur et de Baudrier se trouvaient réunis sur le dernier programme de l'Orchestre National. On n'a pas oublié le groupe « Jeune France » à l'enseigne duquel Baudrier, Jolivet, Lesur et Messiaen firent ensemble leurs premières armes, il y a quelque douze ans. Secouée par le caprice des vents, l'enseigne n'a jamais été décrochée que je sache et les quatre copains restent unis d'autant plus aisément qu'ils ne mangent pas le même potage, comme disait le père Satie et que le lien du néoromantisme est assez lâche pour leur permettre de se tenir les coudes sans courir le risque de se marcher sur les pieds.
Lesur et Baudrier, très particulièrement forment un curieux contraste : le premier serre la forme avec une svelte rigueur ; le second s'épanche et s'ébroue en liberté et se remet aux intermittences du cœur du soin de diversifier les parties du discours. Daniel Lesur contrapuntiste sensible, s'étant fait connaître jusqu'ici par des pièces Instrumentales et d'exquises mélodies. Mais ses dons de polyphoniste le désignaient de toute évidence pour de plus vastes entreprises. La symphonie le réclamait. La première visite qu'il lui rend avec son « Ricercare » est digne du meilleur accueil. On sait que l'ancien « Ricercare » italien est une « invention » sans symétrie ni retour qui se joue autour d'un thème. Lesure renouvelle la lettre et l'esprit de cette forme élémentaire dont le nom indique assez qu'elle suppose et requiert la recherche. Sévère et savoureuse, la recherche, ici, semble éprouver le degré tonal et l'organisme menacé se défend par la fièvre. Lesur mène ici un jeu élégant et racé où l'expression jaillit plus intense et plus aiguë d'une forte contrainte. »
(Combat, 9 février 1947, p. 2)
« Au concert qui clôturait la saison de cette association [de l’Orchestre Symphonique de Paris], il convient de signaler la première audition d'une œuvre d'un musicien Français de 25 ans, Suite Française de M. Daniel-Lesur. Le fait est assez rare dans les annales des grandes associations qui jouent à Paris chaque samedi et chaque dimanche pour que nous marquions cet événement d'une mention spéciale. En moyenne douze concerts symphoniques par semaine soit 288 pour la saison, ce qui représente 576 heures de musique symphonique ont révélé, au grand maximum, six ouvrages nouveaux d'auteurs de cette génération, presque toujours brefs. Faveur d'une heure et demie accordée à la jeune musique française.
L'œuvre présentée à l'O. S. P. est de qualité. Le style en est châtié l'écriture élégante et raffinée, l'instrumentation claire et séduisante. Son titre est justifié par la nature de la matière musicale directement issue de l'esprit du folklore français. »
(Esprit, avril 1935, p. 113)
Collecte : Olivier Geoffroy
(février 2021)