Marie Félicie Clémence de Reiset

dite Clémence de Grandval (1828-1907)


 

 

Née au château de la Cour du Bois, à Saint-Rémy-des-Monts dans la Sarthe le 21 janvier 1828 elle est la fille du Baron Léonard de Reiset, pianiste amateur et de Louise Adèle du Temple de Mézières devenue, par son mariage, baronne de Reiset.

 

Château de la Cour du Bois
(CP ancienne) DR.

 

Le milieu dans lequel elle vivait lui permit de recevoir une solide éducation, le Salon familial étant ouvert aux intellectuels, aux poètes telle Marceline Desbordes et aux artistes notoires. Ainsi eut-elle l’occasion de travailler le chant avec Laure Cinti-Damoreau, le piano avec Chopin et l’écriture avec Saint-Saëns. En 1845, un septuor est présenté chez elle, son père intervient comme interprète.

 

Elle se marie à l’âge de 23 ans, le 11 mars 1851 à Paris, avec le vicomte Enlart de Grandval (1813-1886) âgé de 14 ans de plus qu’elle. Chef d’escadron, il soutient sa carrière, insistant pour qu’elle poursuive ses études de composition avec Saint-Saëns, qui lui dédie quelques mélodies et son Oratorio de Noël (1858). Cette même année, elle élargit son répertoire et aborde le genre de la symphonie. L’andante de sa Symphonie en ut majeur est interprété le 25 février 1851 par la Grande Société philharmonique de Paris, rue Sainte-Cécile, sous la direction de Berlioz, créateur de cette formation en 1850.

 

Toutefois c’est le compositeur allemand Friedrich von Flotow, disciple de Reicha, qui l’initia à la composition musicale. Il était l’auteur d’ouvrages lyriques dont Le Naufrage de la Méduse (1839) et, sous sa conduite elle s’essaya dans la composition d’opéras. Elle présenta aux Bouffes Parisiens, le 7 mai 1860, la pochade en un acte Le Sou de Lise sous le pseudonyme de Caroline Blangy, puis au Théâtre Lyrique, le 1er mai 1863, l’opéra-comique en un acte Les Fiancés de Rose sous le pseudonyme de Clémence Valgran, repris au Théâtre Dejazet le 10 janvier 1916.

 

Elle obtint ensuite plusieurs succès, notamment à l’étranger avec son opéra-comique en un acte La Comtesse Eva (livret de Michel Carré) monté à Bade (Allemagne) en août 1864, puis La Pénitente à l’Opéra-Comique le 13 mai 1868, avant Piccolino le 5 janvier 1869 au Théâtre Italien sur un livret d’Achille de Lauzières-Thémines.

 

Très active pour faire connaitre le travail de ses contemporaines Clémence de Grandval aide financièrement la Société Nationale de Musique dans l’organisation de ses concerts, créée en 1871 par Saint-Saëns, César Franck, Gabriel Fauré et Romain Bussine, entre autres. Elle remporte alors, quant à elle, des succès notoires notamment avec son Stabat Mater pour solistes, chœur et orchestre créé à Paris le 23 février 1870 admiré par Vincent d’Indy « comme une œuvre de talent ». Quelques jours plus tard l’œuvre est donnée à la salle du Conservatoire sous la direction de Saint-Saëns. Quand Ernest Reyer en fait la critique il précise « du moment que l’on applique à une œuvre religieuse les ressources de l’harmonie et de l’instrumentation modernes, il n’y a plus, à proprement parler de style religieux. » On peut en effet remarquer et louer la cohérence d’écriture et l’unité de style de Clémence de Grandval puisqu’elle alterne au fil des années les parutions de l’un ou l’autre domaine.

 

A la Société Nationale elle propose un grand nombre de pièces de musique de chambre, un trio qui reçoit en 1849 la critique suivante « une œuvre remarquable « de la chaleur, de la verve, une sorte de vigueur masculine, qui n’exclut ni la grâce ni la mélodie », une sonate piano/violon, un concertino pour violon et de nombreuses mélodies. Saint-Saëns qui, découvrant ses mélodies, s’exclama : « elles seraient certainement célèbres si leur auteur n’avait le tort, irrémédiable auprès de bien des gens, d’être femme. »

 

Sa musique religieuse qui comporte aussi une Messe Benedictus (1872) et l’oratorio Saint Agnès (1876) se ressent de ses talents de cantatrice qu’elle exploite dans les salons et même lors de concerts publics. Sa musique de chambre, importante, comprend une soixantaine de romances ou mélodies, et une vingtaine de pièces instrumentales.

 

Le spectre très large des œuvres de Clémence va des pochades, aux œuvres religieuses, à l’opéra notamment son succès Mazeppa sur un livret de Charles Grandmougin et George Hartmann, qui est accueilli le 24 avril 1892 au Grand Théâtre de Bordeaux, deux années après avoir reçu en 1890 le prix Chartier.

 

Artiste prolifique et reconnue de son vivant, Clémence de Grandval a auréolé le monde musical de générosité par son action de mécénat servie par son milieu. Son œuvre aussi bien vocale qu’instrumentale correspond à son temps, empreinte d’un certain romantisme. Elle est décédée le 15 janvier 1907 à Paris, en son domicile 4 rue du Commandant Rivière, à l’âge de 78 ans.

 

Pierrette Germain-David

(février 2025)

Clémence de Grandval, Invocation, 1ère des
"Deux pièces pour clarinette si bémol et piano"

(Paris, éditions Costallat, licence CC BY-SA 4.0) DR.
Partition au format PDF
Fichier MP3 Fichier audio par Max Méreaux
Faire-part de cérémonie religieuse le 18 janvier 1907 en l’église Saint-Philippe du Roule, Paris VIIIe
(DR.)
 

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