Albert ANDROT - Victor DOURLEN - Ferdinand GASSE - Guillaume BOUTEILLER - Gustave DUGAZON - François FÉTIS - Auguste BLONDEAU - Joseph DAUSSOIGNE-MÉHUL - Jean-Jacques VIDAL
1803
Albert ANDROT (1781-1804)
Page spécifique: Albert-Auguste Androt, premier et unique lauréat du Prix de Rome de musique en 1803, avec partitions et fichiers audio.
1804
Pas de premier prix.
1805
Victor DOURLEN (1780-1864)
Né le 3 novembre 1780 à Dunkerque, Victor-Charles-Paul DOURLEN se rend se rend en 1799 à Paris pour être admis au Conservatoire dans la classe de piano de Boïledieu, tout juste nommé dans cet établissement après avoir après avoir quitté sa Normandie natale, et dans celle de composition de Gossec. Celui-ci vient à peine de terminer son œuvre de circonstance, Le cri de vengeance, écrite pour célébrer les fêtes révolutionnaires et de publier le premier volume de ses Principes élémentaires de musique arrêtés par les membres du Conservatoire, suivis de solfège par les citoyens Agus, Catel, Cherubini et Gossec. Nommé membre de la nouvelle Académie des Beaux-Arts à l’Institut de France dès sa fondation en 1795, Gossec est bien placé pour présenter au concours de Rome son élève Dourlen. C’est ainsi que celui-ci remporte le Grand Prix en 1805 avec sa cantate Cupidon pleurant Psyché. Déjà répétiteur d’une classe de chant élémentaire au Conservatoire national supérieur de musique de Paris depuis 1800, il est nommé en 1812 professeur d’harmonie. Catel et Berton y ont déjà leur propre classe, et quelques années plus tard en 1830, il partage ses élèves avec Halévy. En 1842 il prend sa retraite et le 8 janvier 1864, aux Batignolles (Paris) il disparaît. Durant ses 30 ans d’enseignement il connaîtra trois directions successives : Bernard Sarrette, François-Louis Perne (en 1816) et enfin Luigi Cherubini (1822 à 1842). C’est ce dernier qui réunit en 1823 à la classe d’harmonie de Dourlen, celle d’accompagnement pratique afin de former de meilleurs élèves qui soient à la fois bons harmonistes et accompagnateurs. La vie dans cet établissement n’était pas à l’époque de tout repos car, si l’on croit ce que dit Berlioz, la direction de Cherubini était un tantinet tracassière ! Parmi les nombreux élèves qui défilèrent dans sa classe, Dourlen forma notamment Ambroise Thomas, Boïeldieu fils, Marmontel et Besozzi.
Dourlen est surtout connu en tant que théoricien et ses traités d’harmonie basés sur les méthodes de Catel ont longtemps servi de référence, notamment son Traité d’harmonie (1838), son Traité d’accompagnement pratique (1834) ainsi que sa Méthode élémentaire pour le piano-forte.
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Couverture du Traité d'harmonie de Victor Dourlen (1838)
(Coll. D.H.M.) DR.
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Comme compositeur on lui doit plusieurs cantates parmi lesquelles on relève Alcyone (1804) et neuf opéras, dont huit ont été créés au Théâtre Feydeau : Philoclès (1806), Linée ou la Mine de Suède (1808), La Dupe de son art (1809), Cagliostro ou les Illuminés (1810), Plus heureux que sage (1816), Le Frère Philippe (1818), Marini ou le Muet de Venise (1819), La Vente après décès (1821) et Le Petit Souper (1822). Il a également composé un Premier Concerto, un Trio pour piano, violon et basse, un ensemble de Sonates faciles, un Pot-pourri sur les airs de Jean de Paris, des chansons et des romances ainsi que des fantaisies.
Lors de son séjour à la Villa Médicis, effectué entre juillet 1805 et juillet 1810, Victor Dourlen rencontra parmi les autres pensionnaires le peintre Ingres. Celui-ci peignait en 1808 Oedipe explique l'énigme du Sphinx (Musée du Louvre) et la même année réalisa un portrait de Dourlen.
D.H.M.
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Ferdinand Gasse, Méthode de violon d'après les principes du Conservatoire et servant d'introduction à la Méthode publiée par cet établissement
(Paris, chez J. Meissonnier, éditeur, marchand de musique/BnF-Gallica) DR.
1er mouvement (sans les reprises) du premier des trois Duos concertants, fichier audio par Max Méreaux (DR.) |
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Ferdinand Gasse en 1806, de la Chapelle de S.M. l'Empereur, de l'Académie Impériale de Musique. Ex-pensionnaire de l'Académie de Rome Arts et Lettres et membre de la Réunion des Arts et de l'Amitié ( eau-forte, A. A. Bourgeois de la Richardière, d'après A. P. Vincent, BNF )
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Ferdinand GASSE (1780 - ap. 1840)
" Il n’a de cesse qu’il n’ait enflammé tous ses musiciens : c’est un vrai plaisir que de voir ce jeune homme avec son violon et son archet si efficace. Il marche sur les traces de son ancien professeur, Rode. " Ainsi s’exprimait en mai 1805 le journaliste de l’Allgemeine musikalische Zeitung1, parlant de Gasse en tant que chef pour la direction du répertoire symphonique lors des concerts du Conservatoire de Paris.
Ferdinand Gasse, qui fit une carrière de compositeur et de violoniste, est né en 1780 à Naples2. Il est probable qu’il soit de la même famille que l’architecte Louis-Silvestre Gasse, né à Naples le 8 août 1778, Grand Prix de Rome en 18033. En mai 1798 il intégrait la classe de violon de Pierre Rode au Conservatoire de Paris. Considéré comme le meilleur représentant de l’école française de violon, celui-ci avait été nommé professeur de violon dans cet établissement dès son ouverture en 1795. Ferdinand Gasse suivra également les cours de violon de Rodolphe Kreutzer, autre grand représentant de l’école française de violon, qui faisait même l’admiration de Beethoven : il lui dédiera sa Sonate pour violon et piano (op. 47) appelée plus communément la Sonate à Kreutzer. Il reçut aussi les conseils de Pierre Baillot, auteur, avec Rode et Kreutzer, d’une Méthode de violon (1803), adoptée par le Conservatoire, qui sera à maintes reprises rééditée et traduite dans plusieurs langues. Parallèlement il suit les cours d’harmonie de Catel et ceux de composition de Gossec. En 1804, il se présente au Concours de composition de l’Institut, mais cette année-là l’Institut n’accorde que deux seconds Prix : l’un lui est décerné et le second donné à Victor Dourlen. Bien loin d’être découragé, il se représente l’année suivante et obtient cette fois un deuxième Premier Grand Prix avec sa cantate Cupidon pleurant Psyché, une scène d’Arnault. Du 1er janvier 1807 au 31 janvier 1810, Ferdinand Gasse effectue le traditionnel séjour à la Villa Médicis et envoie à la classe des Beaux-Arts de l’Institut plusieurs morceaux de son crû qu’il compose dans la ville éternelle ; notamment un Te Deum à 2 chœurs et un Christe eleison en fugue à 6 voix, sans accompagnement pour lesquels Méhul fit des éloges. Prolongeant son séjour italien à Naples, il regagne Paris en 1812, après avoir réussi à faire jouer en janvier de cette année son opéra bouffe en deux actes, La finta Zingara. Dans la capitale, il retrouve son poste de violoniste à l’orchestre de l’Opéra, où il avait été embauché dès 1801 mais qu’il avait dû abandonner le temps de son séjour à Rome. Violon solo, il y restera jusque 1834, année où il se retirait avec une pension ; Habeneck était alors 1er chef d’orchestre et parmi les quelque 28 pupitres de premier et second violons, on trouvait nombre de prestigieux artistes : Baillot, Urhan, Tilmant, Tolbèque et Nargeot.
Si Gasse fut un violoniste réputé, il était également un compositeur apprécié par ses contemporains. C’est ainsi qu’on lui doit des pièces pour son instrument (Duos, Sonates...), de la musique religieuse et plusieurs opéras : Le voyage incognito (Opéra-Comique, 1er juillet 1819), L’Idiote (Opéra-Comique, 25 novembre 1820), Une nuit de Gustave Wasa (Opéra-Comique, 29 septembre 1825), L’Ange gardien ou Sœur Marie, comédie mêlée de chants sur des paroles d’Achille d’Artois et Henri Dupin (Théâtre des Variétés, 29 janvier 1831)... Il a également écrit une Méthode de violon et un Cours de musique (1830, Bressler).
On ignore la date de sa mort arrivée après 1840. Sans doute est-il le père de Edme-Hippolyte Gasse, élève de Fétis (contrepoint) et de Berton (composition) au CNSM ? Répétiteur de solfège dans cet établissement, il mourut jeune le 11 janvier 1831. C’est Louis-Désirée Besozzi, futur Grand Prix de Rome (1837) qu’il avait eu quelque temps comme élève, qui lui succéda dans cette classe.
D.H.M.
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1) 15 mai 1805, rapporté in Le Conservatoire de Paris, 1795-1995. Des Menus-Plaisirs à la Cité de la musique, ouvrage collectif sous la direction de Anne Bongrain et Yves Gérard, assistés de Marie-Hélène Coudroy-Saghai, Paris, Buchet-Chastel, 1996, 355 pages. [ Retour ]
2) Fétis dans sa Biographie universelle des musiciens prétend qu'il était né en mars 1788. Sans doute fait-il erreur, car Gasse aurait été bien jeune (10 ans) pour entrer en 1798 dans la classe de violon de Rode ! [ Retour ]
3) Louis-Silvestre Gasse vint jeune à Paris et entra à l'école des Beaux-Arts, où il obtint un grand prix d'architecture en 1799. Grand Prix de Rome en 1803, il fit un séjour à la Villa Médicis jusque 1807. Il retourna ensuite à Naples, où sa famille était installée, et avec la collaboration de son frère Etienne il construisit notamment la Bourse et le Palais du Ministère. Il mourut le 11 novembre 1833. [ Retour ]
1806
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Page de couverture de sa cantate Héro et Léandre
(BNF/Gallica)
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Guillaume BOUTEILLER ( 1787 - 1860 )
Lauréat du Prix de
Rome en 1806, Guillaume Bouteiller, que Fétis prénomme
par erreur Pierre-Guillaume, renonçait au séjour à
la Villa Médicis et à une carrière musicale pour
rentrer dans l’Administration. C’était le
premier Grand Prix à ne pas vouloir bénéficier
de la possibilité de passer cinq années en Italie comme
pensionnaire du gouvernement. Tous les musicologues et autres
biographes ignorent encore de nos jours ce qu'il est advenu, tel
Joël-Marie Fauquet qui écrit en 1993 qu'après 1817
« on perd sa trace » ou encore l'éditeur
Symétrie qui à propos de sa cantate « Héro
et Léandre » dans la notice de présentation
actuellement en ligne sur son site Internet (mars 2017), va dans le
même sens. Mais, nos récentes recherches nous autorisent
à en dire bien davantage et nous sommes ainsi en mesure de
livrer ici à nos lecteurs des renseignements totalement
inédits. Parmi ceux-ci, la découverte de ses actes de
naissance et de décès nous permettent de mieux cerner
le personnage.
Guillaume-Louis-Marie
Bouteiller est né à Paris le 28 octobre 1787 et baptisé
le lendemain à l'église Saint-Laurent. Les parrain et
marraine, Louis Drouin, armateur à Saint-Marc (Saint-Domingue)
puis installé à Nantes, juge en chef au Consulat de
Nantes, et son épouse Marie-Françoise Budan, tous deux
grands-parents maternels de l'enfant, étaient représentés
à la cérémonie par Denis Keaghry, médecin
du roi de Pologne et Marie-Louise-Eléonore Bouteiller, tante
de l'enfant (1783-1828), peintre, domiciliée 4 rue Bergère.
Fils de Guillaume-Jacques (de) Bouteiller (1756-1820), écuyer,
négociant nantais installé à Paris, rue
Poissonnière puis 6 rue Beauregard, et de Marie-Louise-Thérèse
Drouin décédée en 1812, il était issu
d'une riche famille de Nantes. Au moment du mariage de ses parents,
célébré dans cette ville le 27 juin 1780, la
mariée apportait 200.000 livres et le marié 3200.000,
sommes considérables pour l'époque : Guillaume
Bouteiller, le grand-père (1713-1802), juge-consul des
marchands, marié à Eléonore Browne, exerçait
en 1749 la charge anoblissante de Secrétaire du Roi, maison et
couronne de France, l'autorisant à porter le titre de noblesse
d'écuyer. Il passait sous Louis XVI pour être le plus
riche négociant de Nantes. Aussi, certains de ses descendants
ajoutèrent plus tard la particule « de »
avec le titre d'écuyer. Parmi ceux-ci, en dehors de notre Prix
de Rome, figurent Charles de Bouteiller (1760-1845), oncle du
musicien, qui fut député de la Loire-Inférieure
de 1810 à 1815 et ses petits-fils Jehan de Bouteiller
(1840-1885) qui sera élu membre de la commune de Paris en
1871, puis l'année suivante président du Conseil
municipal de Paris (quartier de Chaillot), et Jacques de Bouteiller
(1844-1899), qui deviendra sous-préfet de Brest en 1870, puis
Conseiller municipal de Paris de 1886 à 1890. Soulignons
enfin, en ce qui concerna la famille Bouteiller, que certains
auteurs, notamment René Kerviller dans son Répertoire
général de bio-bibliographie bretonne (1893),
revendiquent le lauréat du Prix de Rome comme nantais de
naissance, l'identifiant à Charles-Guillaume-Marie Bouteiller,
né le 27 mars 1788 à Nantes. Or, après
vérifications, il s'avère qu'il est fils de Charles
Bouteiller (1760-1845), oncle de Guillaume.
Guillaume Bouteiller eut
tout d’abord comme maître Angélo Tarchi
(1755-1814), un ancien du Conservatoire de Naples qui s’était
installé à Paris en 1797 et qui est l’auteur
d’une quarantaine d’opéras. Élève
également du Conservatoire de Paris, où il avait été
admis en septembre 1800 à l'âge de 12 ans, il entrait
dès l'année suivante (octobre 1801) dans la classe
d'harmonie de Jean-Baptiste Rey. En 1806, il se présentait au
Concours du Grand Prix de composition musicale (prix de Rome) et
obtenait à l'âge de 18 ans le Premier Grand Prix avec sa
cantate Héro et Léandre, écrite sur un
texte de Jacques Binsse de Saint-Victor, le poète français,
né à Saint-Domingue en 1772 et mort à Paris en
1858. Conformément aux règlements de la classe des
Beaux-Arts de l'Institut, le sujet de ce concours comportait :
1°. un contrepoint double à la douzième et à
quatre parties, 2°. un contrepoint quadruple à trois
parties, 3°. une fugue à trois sujets et à quatre
voix, 4°. une cantate composée d'un récitatif
obligé, d'un cantabile, d'un récitatif simple, et
terminée par un air de mouvement. Sa cantate, donnée à
grand orchestre le 4 octobre de la même année lors de la
séance publique des Beaux-Arts, remporta un succès non
négligeable, au point qu'elle fut à nouveau interprétée
le dimanche 8 mars 1807, « à une heure et demie
après-midi », dans la salle du Conservatoire
impérial de musique lors du quatrième exercice des
élèves. En plus de cette oeuvre chantée par la
soprano Mlle Himm, le programme comportait 5 autres morceaux :
une Symphonie de Haydn, un Concerto de Viotti exécuté
par Habeneck, un Trio extrait de la Messe des Morts de
Gossec, chanté par Mlle Himm et MM. Nourrit et Albert,
l'Ouverture d'Anacréon de Cherubini, et un
Quatuor de Paesiello, chanté
par Mlles Pelet et Forceville, et MM. Aubry et Boulanger. Editée
à Paris, « chez Nadermann, marchand de musique
rue de la Loi, à la Clef d'Or, ancien passage du Café
de Foi », la cantate de Bouteiller fut exécutée
ensuite à deux reprises à Nantes par les artistes du
Théâtre du Chapeau-Rouge. Plus récemment, le 9
mai 2008 au Théâtre Molière de Sète, Hervé
Niquet, à la tête de l'Orchestre national de
Montpellier-Languedoc-Roussillon, a redonné la cantate de
Bouteiller (Ana Maria Labin assurant la partie de soprano), en même
temps que la Symphonie n° 1 en ré majeur de Gounod
et la Symphonie n° 2 de Beethoven.
La Revue du Breton
(2e volume, année 1837) rapporte ce que l'on avait dit à
l'époque sur l’exécution de son Héro et
Léandre :
« […]
Le jeune musicien a su répandre dans son ouvrage un style
aimable et élégant, un chant large et naturel, et un
accent très dramatique ; ses récitatifs sont
parfaitement déclamés ; ses airs ont l'expression
juste des paroles et de la situation ; il a écrit son
orchestre en maître ; ses accompagnements se font
remarquer par une légèreté, une grâce, une
variété, un brillant et une force convenables au sujet.
Mais, c'est principalement dans la distribution des couleurs
musicales, leur liaison entre elles, leur opposition, les repos et
les masses d'effets, qu'on a pu apprécier le goût
éclairé et le talent du compositeur. Si la perfection
de l'art consiste dans la beauté des chants et la variété
de leurs accents, dans l’attention du compositeur à
rendre les intentions du poëte, et à donner, par une
musique énergique, une plus grande expression aux paroles, on
doit dire, à la louange de M. Bouteiller, que sa scène
réunit toutes les qualités essentielles. »
et d'ajouter : « M.
Guillaume Bouteiller, comme pour justifier les suffrages qu'il venait
d'obtenir, fit exécuter, dans l'église de
l'Abbaye-aux-Bois, à Paris, un Stabat
à trois voix, dont les chants larges et naturels
frappèrent vivement. » Cette oeuvre religieuse,
qui, selon ces propos a donc été composée et
jouée vers la fin des années 1810, semble être
perdue de nos jours.
Mais Guillaume Bouteiller
préféra se désister pour le séjour à
Rome. Sans doute préférait-il ne pas abandonner ses
activités professionnelles dans l'Administration débutées
à la même époque que son Prix de Rome. Il était
en effet entré au Ministère des Finances, dans
l'Administration des contributions indirectes : le 18 juillet
1807 il est tout d'abord nommé expéditionnaire, avant
de monter en grade au fil des années : commis d'ordre en
1808, sous-chef en 1810, chef de bureau en 1815, chef de section en
1817 et enfin entreposeur du tabac à Paris à partir de
1831 jusqu'à sa retraite prise le 1er janvier 1838. Durant
cette période, de 1816 jusqu'au 30 mars 1832, il était
aussi Capitaine attaché à l'Etat-major général
de la Garde nationale de Paris. Il continua néanmoins de
pratiquer occasionnellement la musique en tant qu’amateur et
cela ne l’empêcha pas de composer un opéra-comique,
Le Trompeur sans le vouloir, sur un livret de MM.
Jean-François Roger et Auguste Creuzé de Lesser,
ceux-là même qui avaient écrit en 1811 la pièce
intitulée Le Magicien sans magie, mise en musique
(opéra-comique en 2 actes) par Nicolas Isouard. Creuzé
de Lesser était également l’auteur des paroles de
l’opéra-comique en un acte de Boïeldieu, Le
Nouveau seigneur du village (1813). Hélas l'ouvrage de
Bouteiller, représenté le 26 mai 1817 au Théâtre
Feydeau, fut très loin de recueillir un franc succès,
bien au contraire. Découragé, il ne semble ne plus
avoir produit de compositions importantes.
Tout en exerçant
au Ministère des finances, Guillaume Bouteiller, qui résidait
alors 12 rue de l'Université à Paris, était
nommé en décembre 1834 par le Préfet de
Seine-et-Oise maire du village de Montlignon (actuellement située
dans le Val-d'Oise),] comportant alors quelque 400 âmes, dans
lequel il possédait une grande propriété située
rue du Hameau Larive ; fonctions qu'il remplit jusqu'en décembre
1847, date à laquelle le nouveau maire Louis-Just Paquet lui
succédait. Lui-même, après les maires Guidée
(1826-1931) et Monneau (1831-1834) était l'un des successeurs
de l'acteur de théâtre Jean Mauduit-Larive (1747-1826),
de la Comédie-Française. Celui-ci avait fait construire
dans cette commune à la fin du XVIIIe siècle le
« château Larive » dans lequel il
recevait déjà des gens de lettres et des artistes, et
remplit aussi les fonctions de premier magistrat à partir de
1802. Peu après le décès de Mauduit-Larive,
Bouteiller et sa famille s'installèrent dans sa propriété
qu'ils occupèrent comme maison de campagne durant une
vingtaine d'années, jusque vers le milieu des années
1850, recevant à leur tour des artistes et autres notabilités
de l'époque, donnant probablement quelques séances de
musique.
Guillaume Bouteiller, qui
se fit appeler plus tard le « comte de Bouteiller »
avait épousé le 13 septembre 1828 à Paris Sophie
Gersin, née en novembre 1792 à Paris. Celle-ci, fille
de Jean-Baptiste Gersin et de Armande Mallet, était alors
veuve du compositeur italien Angélo Benincori, mort à
Paris (Belleville), le 30 décembre 1821 à l'âge
de 42 ans, avec lequel elle s'était mariée peu avant,
le 4 novembre 1817. Arrivé à Paris en 1803, Benincori
s'était fait connaître par la composition d'ouvrages
dramatiques (Galatée, ou le nouveau Pygmalion, 1804 –
Hésione, 1807 – Les Parents d'un jour 1815
– La Promesse de mariage, 1818 – Les Epoux
indiscrets, 1819), mais c'est surtout avec ses Quatuors à
cordes publiés à Vienne et à Paris, et ses 3
Trios concertants pour piano forte, violon et violoncelle
qu'il obtint le succès, ainsi qu'avec l’achèvement
de l'opéra féerie en 5 actes Aladin ou la
Lampe merveilleuse que Nicolo, surpris par la mort, n'avait eu le
temps d'écrire que les 2 premiers actes (Académie
royale de musique, 6 février 1822). Le compositeur Adolphe
Adam (1803-1856), l'auteur du trop célèbre Minuit,
Chrétiens, dans son livre de souvenirs relate, qu'il avait
été placé enfant dans un pensionnat de
Belleville, tenu par M. Gersin et précise : « Chez
M. Gersin, j'eus pour professeur sa fille, charmante jeune personne
qui, plus tard, épousa Benincori, le compositeur, et, devenue
veuve, devint la femme de M. de Bouteiller, excellent musicien
lui-même et grand amateur de musique. » Du
mariage de Sophie Gersin avec Benincori était né un
fils, Henri Benincori, le 12 novembre 1818 à Paris
(Belleville). Il fut élevé par son beau-père,
Guillaume Bouteiller et sa mère, en même temps que leur
fille Sophie-Henriette-Louise Bouteiller, née le 16 juin 1829
à Paris. Le fils Benincori, sans doute grâce à
son beau-père qui travaillait au Ministère des
Finances, entra également dans cette même
administration, comme chef de bureau à la Direction générale
des tabacs. Il est mort, célibataire, le 7 octobre 1895 à
Gérardmer (Vosges). Quant à Sophie, décédée
le 13 mars 1901 à Paris, elle avait épousé le 14
juin 1855 Jules de Saux (1824-1879), secrétaire du Comte
Walewski, puis ministre plénipotentiaire, premier secrétaire
de l'ambassade de France à Londres, et
demi-frère de Georges Le Sourd (1834-1877), ministre
plénipotentiaire à Tanger. Sophie Bouteiller,
sous le nom « Henriette Browne » (patronyme de
sa grand-mère paternelle d'origine irlandaise), fut une
artiste peintre renommée. Le Grand dictionnaire universel
du XIXe siècle de Pierre
Larousse (1867) nous en dit davantage sur cette artiste :
« […]
Le père de cette artiste, le comte de Bouteiller, appartenait
à une des plus anciennes familles de la noblesse bretonne ; il
avait occupé une position élevée dans
l'administration des finances mais, dans la haute société
parisienne, il brillait surtout par ses connaissances en musique ; à
l'âge de dix-neuf ans, il avait remporté le grand prix
de composition musicale, à l'Institut. De son mariage avec la
veuve du compositeur italien Benincori, auquel la scène
française doit Aladin,
naquit Mlle Sophie de Bouteiller. Cette jeune personne, que tout
semblait devoir attirer vers la musique, se voua cependant au dessin.
Après quelques années d'études sous la direction
de M. Perin, et plus particulièrement sous celle de M.
Chaplin, elle débuta, au Salon de 1853, par un petit tableau
de genre la Lecture de la Bible.
Deux ans après, elle obtint une médaille de 3e classe,
à l'Exposition universelle, pour les ouvrages suivants : un
Frère des écoles
chrétiennes, l'Ecole
des pauvres à Aix en Savoie,
les Lapins.
La même faveur accueillit les tableaux qu'elle envoya aux
Salons de 1857 et de 1859 : la Leçon
de catéchisme, la Grand'mère,
les Puritaines,
appartenant à l'impératrice ; les Soeurs
de charité, un Intérieur
de
pharmacie, des portraits, etc.
Ces diverses compositions, pleines de naturel et de sentiment, et
d'une exécution, sinon très-solide, du moins
très-distinguée, commencèrent la réputation
de Mme Henriette Browne. Le succès que la jeune artiste obtint
au Salon de 1861 fut des plus complets; elle y exposa un portrait
(celui de M. le baron de Sylvestre), largement peint et d'une vigueur
toute virile ; une petite scène de genre, la Consolation,
un joyau de finesse et de sentiment, a dit M. Paul de Saint-Victor,
quelque chose comme une larme changée en perle, la Femme
d'Eleusis (appartenant à
l'empereur), Grecque moderne, à physionomie séduisante,
à l'attitude superbe deux Intérieurs
de harem (la Visite
et la Joueuse de flûte),
tableaux
dont on a beaucoup admiré le caractère bien
oriental, l'harmonie des groupes, l'exquise élégance
des galbes et des attitudes, la fraîcheur et l'éclat du
coloris, et qui seraient entièrement dignes d'éloges si
la trop grande diffusion de la lumière n'enlevait de la
solidité et du corps aux personnages. A la suite de cette
exposition, qui lui valut une médaille de 2e classe, Mme
Henriette Browne s'essaya dans la gravure à l'eau-forte, et
acquit bientôt en ce genre une grande habileté ; elle a
gravé avec succès plusieurs ouvrages de M. Bida :
la Confession
et la Robe de Joseph,
sujets pour lesquels elle a obtenu une médaille de 3e classe,
au Salon de 1863 ; les Disciples de
Jésus allant chercher l'ânon et l'ânesse que le
maître leur a désignés
(Salon de 1865); la Vocation de saint
Matthieu (Salon de 1866). Elle a
exposé aussi, en 1864 1865 et 1866, des peintures,
principalement des portraits, qui ont été
très-remarquées. Le nom dont cette artiste signe ses
oeuvres est celui d'une aïeule, fille d'un général
irlandais, Browne, qui s'était attaché à la
fortune du prétendant, et qui vint se réfugier à
Nantes avec sa famille après le désastre de Culloden.
Ce nom, d'origine anglaise, n'a pas peu contribué sans doute à
la grande popularité dont jouit chez nos voisins le talent de
Mme Henriette Browne. »
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Signature autographe, 1838
(DR.)
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Guillaume
Bouteiller, qui en 1838 fut décoré de la Légion
d'honneur, mourut le 11 novembre 1860, en son domicile parisien de la
rue du Bac. A sa disparition, c'est son ami, le journaliste et
critique littéraire Alfred Cuvillier-Fleury (1802-1887),
ancien percepteur du duc d'Aumale, Henri d'Orléans, auquel il
resta attaché comme secrétaire particulier, membre de
l'Académie française (1866), qui en fit l'éloge
en ces termes dans le Journal des
débats (édition du
dimanche 18 novembre 1860) :
« Il y a
quelques jours, une foule d'amis conduisait à sa dernière
demeure un homme excellent, partout distingué et regretté
de tous, le comte de Bouteiller, mort le 11 novembre, à Paris,
à l'âge de soixante-douze ans. M. de Bouteiller avait
été longtemps mêlé au meilleur monde. Il
en avait le goût, l'esprit et les manières. Né
avec une immense fortune coloniale que la révolution de
Saint-Domingue avait presque entièrement détruite, il
avait dû chercher des ressources dans son activité et
son intelligence. On l'avait vu figurer avec honneur dans un poste
modeste de l'administration des finances, où la juste
confiance d'un homme illustre, M. le baron de Barante, alors
directeur des contributions indirectes, l'avait appelé et
soutenu. Un grand prix de composition musicale, que M. de Bouteiller
avait obtenu au concours de l'Institut, vers 1804 (il avait à
peine dix-sept ans), avait semblé d'abord le destiner à
une autre carrière. Il garda du moins de ce premier succès
le renom d'un des amateurs de musique les plus distingués de
Paris. On a conservé le souvenir de plusieurs de ses
compositions d'église et de salon, où le goût le
plus pur s'alliait à une originalité naturelle. On le
retrouvait toujours, fidèle au poste que son inépuisable
complaisance lui avait marqué dans tous les grands concerts de
société dont d'admirables voix étaient
l'attrait, dont la bienfaisance était le but. Ajoutons que sur
quelques unes de nos scènes lyriques le nom du comte de
Bouteiller était honorablement connu, qu'on y appréciait
ses judicieuses remarques, qu'on y recherchait son approbation. Des
maîtres célébrés réclamaient ses
conseils et en tenaient compte. Ainsi s'était écoulée
cette vie simple et honorée, sans éclat, mais non sans
fruit, vouée à une activité intelligente,
embellie par la culture du plus attrayant des beaux-arts.
Propriétaire d'une maison de campagne sur ce délicieux
coteau de Montlignon qui se souvient de Larive et que Victor Hugo a
chanté, M. de Bouteiller fut longtemps maire de son village,
mince honneur, noble fonction pour ceux qui goûtent la
popularité véritable. L'homme du monde se fit aimer des
paysans. Je crois même qu'il leur fit aimer la musique. Il ne
les flattait guère et les servait bien. Les pépiniéristes
de la vallée d'Eaubonne lui doivent de belles routes et de
gros profits. Ils n'oublieront jamais ni le dévouement de leur
ancien maire, ni sa sincérité, ni sa bienfaisance. Je
n'insisterais pas sur ces qualités de l'homme de bien modeste
à qui toute publicité eût répugné
pendant sa vie, et qui s'étonnerait de se voir loué
aujourd'hui dans un grand journal, si notre vieille amitié
pour ce vrai galant homme ne justifiait pas, auprès de tous
ceux qui l'ont connu, l'hommage que nous lui rendons. On abuse
étrangement des mots au temps où nous sommes. Un galant
homme est celui qui non seulement ne sait rien faire qui ne soit
strictement honorable, mais qui ne comprend même pas qu'on
puisse le faire. M. de Bouteiller était tout simplement un
homme d'honneur délicat, un ami bienveillant et loyal, un père
aussi éclairé que tendre. Sa fille unique, mariée
à un des sous-directeurs du ministère des affaires
étrangères, s'est fait un nom déjà
célèbre et populaire dans un de ces beaux-arts dont le
comte de Bouteiller avait le goût, traditionnel dans sa
famille. Par la délicatesse exquise et naturelle de son
pinceau par la distinction charmante qui caractérise son
talent, cette jeune femme était la digne fille du comte de
Bouteiller. Nous ne voulons plus pour lui en ce moment et il n'aurait
accepté pour lui-même aucun autre éloge. »
Ce
même Cuvillier-Fleury, dans le second volume de son Journal
et
correspondance intimes, publié
par Ernest Bertin (Paris, Plon, 1903) nous apprend que M. et Mme
Guillaume de Bouteiller étaient très liés avec
la famille de son épouse née Henriette Thouvenel
(1820-1892). Celle-ci effectua d'ailleurs quelques séjours
dans leur maison de Monlignon, notamment durant l'été
1842. Elle était fille du Colonel Louis Thouvenel (1787-1843),
qui s'était distingué durant les guerres de l'Empire et
frère de Edouard Thouvenel (1818-1866), futur sénateur
et Ministre des Affaires Étrangères. Le peintre et
homme de lettres Alexandre Barbier, attaché au secrétariat
du duc d'Aumale (fils de Louis-Philippe) et père du poète
et dramaturge Jules Barbier, dans un courrier adressé à
Cuvillier, alors absent de Paris, nous apprend ainsi que les
Thouvenel et de Bouteiller avaient été officiellement
invités au feu d’artifice du 1er mai 1840, tiré
aux Tuileries en présence du roi Louis-Philippe ; il
relate leur arrivée ainsi :
[…]
A sept heures et demie j'étais chez vous, en grande tenue,
l'habit bien brossé et le chef couvert de mon plus beau bonnet
de velours ; à huit heures la compagnie arrivait. Je la reçus
à l'antichambre. Le colonel [Louis
Thouvenel] ouvrait la marche,
donnant le bras à Mme de Bouteiller, puis venait la Charmante
|Henriette
Thouvenel] avec M. le comte de
Bouteiller, gentilhomme portant la tête un peu raide, puis une
petite Bouteiller assez peu jolie [Sophie
de
Bouteiller, alors âgée de 10 ans],
un autre petit Bouteiller (je crois), jeune homme au poil brun et à
l'oeil fort éveillé [Henri
Benincori] ; et enfin, en
queue de colonne, le grand fils du colonel [Edouard
Thouvenel], faisant antithèse
avec la tournure un peu raide de Mlle de Schudy (la gouvernante de
Mlle Thouvenel) qui se tenait suspendue à son bras. Je ne
saluai pas ; je me prosternai. Jamais mandarin bien appris n'a fait
une plus belle révérence devant l'empereur de la Chine.
Les premières civilités faites, on procéda à
la visite de l'appartement, et là j'eus la satisfaction
d'entendre sortir de toutes les bouches votre formule favorite.
L'appartement fut proclamé joli à l'unanimité,
ce qui m'a confirmé dans l'idée que vous aviez toujours
voulu que j'en eusse. La Charmante en parcourait de l'oeil tous les
recoins (accessibles bien entendu), elle regardait tout, elle
touchait à tout; je la secondais de mon mieux dans son
inventaire; je donnais des éclaircissements, je mettais les
noms aux portraits ; j'étais transformé en vrai
catalogue. Mme de Bouteiller, se rappelant la tristesse et le négligé
de ce logis quand l'austère Mme Angelet en était
l'hôte, s'émerveillait de ce que vous avez su en faire.
[...]
Si notre lauréat
du Prix de Rome de composition musicale n'a guère laissé
de souvenir dans le monde musical, on lui doit néanmoins, en
tant que maire de la commune de Montlignon sous la Monarchie de
Juillet, la belle route qui traverse la forêt, mais les
Montlignonnais eux-mêmes s'en souviennent-ils ?
Denis Havard de la
Montagne
(2001, mise à
jour : mars 2017)
Gustave DUGAZON (1781 - 1829)
Voir cet article détaillé sur les Dugazon.
1807
Pas de premier prix.
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François-Joseph Fétis ( Lithographie par Jean-Baptiste Madou, Agence générale de musique, 1831 )
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Revue musicale, publiée par Fétis, 1er numéro de février 1827
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François FÉTIS (1784-1871)
Né à Mons (Belgique), le 25 mars 1784, Fétis est plus connu comme musicologue que comme compositeur. Son nom est resté dans la mémoire collective comme l'auteur de l'indispensable Biographie universelle des musiciens et bibliographie générale de la musique (8 volumes), parue en 1837-44 à Bruxelles et en 1860-65 à Paris (Firmin-Didot), suivie de Suppléments et compléments par Pougin (2 vol., Paris, 1878-81). Ce travail remarquable est bien antérieur à celui de Grove, la première publication de son célèbre Dictionary of Music and Musicians (4 vol., Londres) étant datée de 1879-89. Fils d'Antoine-Joseph Fétis, organiste de l'église Sainte-Waudru de Mons, Fétis apprend à jouer très tôt du clavecin et du violon auprès de son père, et l'art vocal lui est enseigné à la collégiale de sa ville natale. Il est admis ensuite, le 31 août 1801, au Conservatoire de Paris, dans les classes d'harmonie de Rey et de piano de Boieldieu. Il obtient en 1807 un deuxième Second Grand Prix de Rome, derrière Joseph Daussoigne-Méhul, avec la cantate Ariane à Naxos pour voix et orchestre, écrite sur un texte de Saint-Victor. Il voyage ensuite jusqu'en 1818 dans le nord de la France, notamment à Douai où il enseigne le chant et l'harmonie à l'Ecole de musique (1813) et tient l'orgue de la Collégiale de cette ville. Nommé professeur de composition au Conservatoire de Paris (1821), puis bibliothécaire (1826), il prend en 1833 la direction du Conservatoire de Bruxelles, tout en étant nommé maître de chapelle du Roi. Il meurt dans cette ville le 26 mars 1871. On doit à Fétis tout un tas d'écrits théoriques (solfèges, méthodes, traités...), d'importants travaux de musicographie, et de nombreuses compositions : une Symphonie pour orgue (1865), des opéras-comiques L'Amant et le mari, Les Soeurs jumelles, Le Manequin de Bergame... , plusieurs pages de musique religieuse dont un Requiem pour le Roi des Belges (1853), des quatuors, des quintettes, des ouvertures... Il convient également de rappeler ici qu'il est le fondateur de la première publication à Paris d'un journal musical, sous le titre de Revue musicale, dont le premier numéro paru en février 1827.
D.H.M. (décembre 2001)
- notice provisoire -
F. Fétis, Kyrie de la Messe VI, extrait des 6 Messes faciles pour l’orgue composées pour les élèves organistes du conservatoire [de Bruxelles] placé sous ma direction (Paris, Lemoine,1840)
Fichier audio par Max Méreaux (DR.)
1808
Auguste BLONDEAU (1786-1863)
|
|
Auguste Blondeau, Trois Quatuors pour deux violons, alto et basse, op. 14
( Paris, A la Lyre moderne )
Fichier audio du dernier mouvement du 2e Quatuor et partition du conducteur reconstituée à partir des parties séparées par Max Méreaux (DR.) |
Auguste Blondeau, huile sur toile (fragment) peint à Rome en 1810 par Merry-Joseph Blondel
( coll. particulière, reproduction in J.M. Fauquet, A. L. Blondeau, voyage d'un musicien en Italie, 1809-1812, Mardaga, 1993 )
|
par François-Joseph Fétis
in Biographie universelle des musiciens
(Paris, Firmin Didot, tome I, 1866)
avec annotations par la rédaction de Musica et Memoria
BLONDEAU
(Pierre-Auguste-Louis), compositeur, écrivain sur la musique, et professeur de
composition, né à Paris, le 15 août 1784, entra au Conservatoire de
musique au mois de frimaire an VIII (janvier 1800) dans la classe de Baillot,
où il se livra à l'étude du violon. Après avoir étudié le
contrepoint sous la direction de Gossec, il devint élève de Méhul pour la
composition, et remporta, en 1808, le premier grand prix au concours de
l'Institut ; ce qui lui procura la
pension du gouvernement pour aller à Rome et à Naples. Le sujet de la cantate proposé pour le prix était Marie Stuart. De retour à Paris, Blondeau est entré à l'orchestre de l'Opéra,
comme alto. Il s'est retiré en 1842. Cet artiste a publié de sa
composition sept œuvres de quatuors pour violon, de trois quatuors chacun ;
trois livres de trios pour 2 violons et basse, ou violon, alto et basse ;
douze livres de duos pour divers instruments ; deux livres de sonates pour
violon avec acc. de basse ; trois livres de nocturnes pour piano et violon ;
trois airs variés pour violon ; un concerto pour clarinette (en fa) avec
orchestre ; un concerto pour basson (en ut) avec orchestre ; des
morceaux détachés pour piano ; trois livres de sonates de Beethoven pour piano
arrangées en quatuors pour 2 violons, alto et basse ; trois livres de basses
chiffrées pour l'accompagnement ; des romances et des chansonnettes avec
accompagnement de piano. Tous ces ouvrages ont été gravés à Paris. Sa cantate
de Marie Stuart a paru en 1809 dans le Journal hebdomadaire de
Leduc, nos 45-48. Comme écrivain sur la musique, Blondeau a fait imprimer
: Revue musicale, ou nouvelle méthode de chant, Paris, Eberardt,
1 vol. in-8°. — 2° Traité des principes élémentaires et constitutifs de la
musique, Paris, Richault. — 3° Traité d’harmonie, ibid.
— 4° Traité de contrepoint, de l’imitation et de la fugue, ibid.
— 5° Histoire de la musique moderne, depuis le premier siècle de
l'ère chrétienne jusqu'à nos jours, Paris, Tantenstein et Cordel, 1847, 2
vol. in-8°. Blondeau a fait représenter ou exécuter de grandes compositions qui
n'ont pas été imprimées, entre autres : 1° Te Deum, à quatre voix et
orchestre, exécuté à l'église du Panthéon, à Rome, en 1810, à l'occasion de la
fête de l'empereur Napoléon. — 2° Te Deum, à 4 voix et orchestre,
exécuté aux Batignolles près de Paris, le 31 décembre 1846, à l'occasion du
mariage du duc de Montpensier avec l'infante d'Espagne. — 3° Messe à 8
voix en 2 chœurs avec orgue, exécutée à l'église Saint-Thomas d'Aquin, à Paris,
en 1814. — 4° Cosi si fa a’ Gelosi, opéra bouffe en deux actes,
représenté à Perugia en en 1812. — 5° Almanzor, ballet pantomime en
trois actes, représenté sur le théâtre de Lisbonne, en 1814. — 6° Trois
ouvertures à grand orchestre, exécutées aux concerts de Mme Cantalani, en 1815,
à Paris. Blondeau a laissé en manuscrit une messe à six voix avec orchestre ;
une messe à sept voix avec orchestre ; des duos de violon ; des
cantates ; des romances ; une traduction française du Prince de
Machiavel ; une traduction de l’histoire des Pays-Bas, de
Guicciardini ; des poésies ; environ quinze volumes d’observations
philosophiques, politiques, esthétiques, etc.
Pougin,
dans le Supplément et complément à l’ouvrage de Fétis (t. 1, 1881),
ajoute : A la nomenclature des écrits publiés
par ce musicien distingué, il faut ajouter le suivant : Notice sur
Palestrina, sur ses ouvrages, sur son époque, sur son style (s.l.n.d.,
in-8° de 30 pp).
1809
|
Seul portrait connu de Joseph Daussoigne-Méhul, vers 1850? ( détail d'une photo Ghemar Frères, Photographes du Roi, Bruxelles, © Conservatoire royal de musique de Liège, avec l'aimable autorisation de son bibliothécaire M. Gilson )
|
Joseph DAUSSOIGNE-MÉHUL (1790–1875)
Article, photo et extraits sonores sur cette page.
Jean-Jacques VIDAL (1789-1867)
|
Signature autographe de Vidal père (1789) DR.
|
Lorsque
le 15 février 1828 à Paris le vicomte Sosthène de la Rochefoucauld, directeur
des Beaux-Arts et des Lettres, sur demande du directeur de l’Ecole royale de
musique et de déclamation lyrique signe l’arrêté de constitution des Concerts
du Conservatoire, Jean-Jacques Vidal figure parmi les premiers membres
fondateurs. Cette institution, qui produisait à l’origine 6 concerts annuels
était l’une des plus importantes au monde. Habeneck la dirigea en premier,
avant de laisser la place en 1849 à Girard. C’est comme violoniste que Vidal en
devint sociétaire dès le 8 mars 1828, mais le 6 décembre de la même année il
démissionnait de ses fonctions, pour bientôt rejoindre le Théâtre Italien.
|
Lettre autographe signée de Jean-Jacques Vidal à Paul Cap, Paris, le 23 octobre 1841.
Dans celle-ci, Vidal mentionne avec humour le baron de Trémont, violoniste amateur : J'ai diné l'autre jour chez Mr Aubert avec notre général le baron de Trémont : son excellence a daigné me confier les secrets de sa politique musicale. Nous entrerons en campagne le second dimanche de novembre; le baron ouvrira lui même la tranchée par l'attaque de la contre-escarpe, que dis-je, par la prise de la contre-basse. Il sera vraiment beau de voir cet autre alexandre domptant son redoutable instrument par la seule force des poignets !
(BNF/Gallica) DR.
|
Jean-Jacques
Vidal est né le 7 mars 1789 à Sorèze, dans le Tarn, fils de Jacques et de
Josèphe Sebe. Son père
était alors professeur de musique vocale et basse à l'Ecole royale militaire de
Sorèze, où, venant de Narbonne, il avait été engagé en février 1781 ;
poste qu'il va occuper jusqu'en avril 1817. Cette école, installée depuis plus
d'un siècle (1656) dans l’ancienne abbaye bénédictine Notre-Dame de la Sagne et
dirigée par des Bénédictins de la congrégation de Saint-Maur, avait été érigée
quelques années auparavant (1776) par Louis XVI en école militaire. A cette époque, la musique y était à
l'honneur : dans les années 1780 on recense en effet une dizaine de
professeurs de musique enseignant aux 400 élèves de cette école la musique
vocale et instrumentale (violon, violoncelle, basson, hautbois, flûte, cor). Le
jeune Vidal y fut tout naturellement scolarisé à partir de 1796 à 1803. Cette
dernière année, le 15 septembre, alors âgé de 14 ans, il fut admis dans une
classe de solfège du Conservatoire de Paris et dès la fin octobre entra
également dans la classe de violon de Rodolphe Kreutzer (1er prix en 1808). En
1804, parallèlement à ses études de violon, il s'inscrivait à la classe
d'harmonie de Catel, puis à celle de composition de Gossec (2ème prix en 1809),
tout en étant un temps répétiteur d'une classe de solfège homme (1806-1807). En
1809, admis à concourir au Prix de Rome, il obtenait un deuxième Second Grand
Prix de Rome avec la scène lyrique Agar dans le désert, sur un texte d'Etienne
de Jouy.
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La Salle Favart où est installé depuis 1825 le Théâtre-Italien, dirigé en 1831 par Jean-Jacques Vidal. Ce n'est qu'en 1841 qu'il regagnera la Salle Ventadour.
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Violoniste
distingué, il intégra dès 1815 l'orchestre de la Chambre du roi comme premier
violon et en 1816 celui de l’Opéra de Paris aussi en tant que premier violon.
Plus tard, il assurait la direction de l'orchestre du Théâtre Italien de
septembre 1831 à 1833, puis, de 1836 à 1841 fut violoniste et chef d’orchestre
de l’Athénée musical, une association de concerts mensuels qui se déroulaient
salle Saint-Jean à l'Hôtel de ville de Paris. C'est lors d'un de ces concerts
et sous sa direction que, le 23 février 1837, le jeune César Franck, alors âgé
de 13 ans, jouait un fragment de son 2e Grand Concerto pour piano et
orchestre en sol mineur (op. 11, 1835) et une Fantaisie de Thalberg.
Comme chambriste, il fut un partenaire habituel (2ème violon) des célèbres
séances que Baillot organisait entre 1814 et 1840. On sait que celui-ci donna
quelque cent cinquante-quatre auditions publiques de musique d’ensemble, au
cours desquelles il jouait principalement des quintettes, quatuors, trios,
sérénades, romances et autres concertos de Boccherini, Mozart, Beethoven,
Onslow, Viotti et de sa propre composition. Vidal fut l’un de ses partenaires
comme le furent, à diverses époques, Baudiot, Montbeillard, Guynemer, Urhan,
Sauzay, Noblin, Franchomme et Vaslin pour ne citer que les principaux. Vidal se
livrait aussi à des séances privées de musique de chambre. Ainsi, on le trouve
depuis au moins 1837 chez Paul Cap, 1 rue de la Chaussée d'Antin, pharmacien
renommé et violoncelliste amateur, avec lequel, notamment le vendredi 29
octobre 1839, il joue en formation de quatuor avec Franchomme et Claude
Louvrier de Lajolais, agent de change à Paris et violoniste amateur. En 1840,
il est chez le baron de Trémont (1779-1852). Celui-ci, préfet sous l'Empire et
la 1ère Restauration, violoniste et altiste amateur, organisait chez lui, 45
rue Saint-Lazare, des séances hebdomadaires de musique de chambre, et ce, de
1798 à 1849. Grand collectionneur de lettres autographes de personnages
célèbres des XVIIe et XIXe siècles, accompagnées parfois de notices
biographiques écrites par ses soins, on trouve dans cette collection une lettre
de Vidal adressée audit baron, de Paris, le 3 novembre 1840, ainsi rédigée
Monsieur de Trémont / Je comptais avoir
l'honneur de / vous faire ma visite pour vous dire / de nouveau combien j'étais
heureux de / faire encore de la musique chez vous. / Connaissant votre
exactitude ordinaire / je croyais commencer dimanche dernier / et m'étais
arrangé déjà pour être à / votre disposition. / Vous pouvez donc compter sur
moi pendant cette saison. / Recevez d'avance mes compliments et / les bien
sincères amitiés / de votre tout dévoué. /Vidal.
et
accompagnée de quelques lignes biographiques de la main du baron de
Trémont :
« Vidal,
violoniste. La modestie, la défiance de soi-même sont des défauts dans
l'exercice des beaux arts. Ils empêchent l'artiste de s'élever au rang auquel
la nature l'avait destiné. Vidal devait être un violon solo de premier
ordre ; une émotion qu'il n'a pu vaincre devant le public, l'a fait se
borner à la musique de chambre, mais aussi il y est supérieur. Grand musicien,
sa facilité d'exécution le rend un lecteur rare et son sentiment musical donne
la couleur appropriée au morceau qu'il joue à première vue. [...] Le caractère bienveillant
de Vidal et son désintéressement, lui ont mérité de nombreux amis et l'estime
de tous ceux qui le connaissent. Cette bienveillance est si étendue chez lui,
que non seulement il n'a jamais vu un rival dans un artiste, mais encore qu'il
apprécie toujours au plus haut point son talent. »
Déjà en 1832, le manque de confiance en soi de Vidal était signalé par le compositeur George Onslow, qui, en 1822 l'avait rendu dédicataire de son Quintetto pour deux violons, alto, violoncelle et basse, op. 19 (à Paris, chez Jean Pleyel et fils aîné, boulevard de Montmartre). Sa lettre du 26 avril de cette année, adressée audit baron de Trémont avec lequel il était également en relation, en témoigne :
« [...] Moins malheureux que les autres sous le rapport pécuniaire, Vidal a quelques déboires à l’orchestre des bouffes. On l’accuse de n’avoir pas assez d’ablomb [sic], (ceci entre nous) et celui qui ne sait pas se modérer dans un quatuor doit être enclin au même défaut à la tête de sa troupe de musiciens. Je l’avais prévu et ne me suis pas trompé. Il le voit lui-même et cherche dans des prétextes très légers à offrir une démission qui finirait par lui être demandée. Je crois que son engagement ne se renouvellera pas.[…] »
Jean-Jacques
Vidal ne semble pas s'être livré à la composition. On sait encore qu'il
dispensait des leçons particulières, ce qui est attesté par une lettre, datée
du 29 janvier 1837, adressée à Paul Cap, dans laquelle il dit ne pouvoir se
rendre aujourd'hui à son invitation, « Mr. Hervez célèbre chirurgien, père d'une de mes bonnes écolières,
donne ce soir un concert, dans lequel je dois jouer avec sa fille l'air de
Guillaume-Tell d'Osborne et Bériot... » En outre, François Auber, successeur de
Cherubini en 1842 à la tête du Conservatoire de Paris, le pria à plusieurs
reprises de se joindre aux jurys des concours de violon et de violoncelle,
notamment en 1842 et en 1844.
Il
est mort le 14 juin 1867, dans son domicile parisien du 23 rue de Provence,
laissant une veuve, Emilie Carré d'Haronville. Celle-ci, née à Rome le 16 août
1802, était la fille de Laurent Carré d'Haronville, sous-inspecteur au Trésor
royal, et de Charlotte Bonneau de Saint-Mesme ; il l'avait épousée le 7
octobre 1831 en l'église Notre-Dame de Lorette à Paris. Elle ne lui survécut
que quelques années avant de s'éteindre à son tour le 15 décembre 1875. Le
journal musical Le Ménestrel, dans son édition du 16 juin 1867, nous
apprend aussi que Jean-Jacques Vidal était « connu des amateurs d'un autre
genre, pour son goût en objets d'art et de curiosité. »
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