Prix de Rome 1880-1889

Lucien HILLEMACHER - Alfred BRUNEAU - Edmond MISSA - Georges MARTY - Gabriel PIERNÉ - Paul VIDAL - Claude DEBUSSY - CHARLES-RENÉ - Xavier LEROUX - Augustin SAVARD - Henri KAISER - André GEDALGE - Gustave CHARPENTIER - Camille ERLANGER - Paul DUKAS

1880

Lucien HILLEMACHER

Fichier MP3 Paul et Lucien Hillemacher, Soupir, mélodie pour voix et piano, poésie de Sully-Prud’homme, dédicacée « A Jules Massenet » (Paris, A. Leduc, 1898), transcription pour clarinette et piano, et fichier audio par Max Méreaux (DR.)
Fichier MP3 Paul et Lucien Hillemacher, Ici-bas, mélodie pour voix et piano, poésie de Sully-Prud’homme, dédicacée « A Madame Vital » (Paris, A. Leduc, 1885), transcription pour clarinette et piano, et fichier audio par Max Méreaux (DR.)


1881

(L'Illustration, 1934) DR.


Alfred Bruneau

La Nuit de Mai

 

Ce deuxième double album de la collection Premières Mondiales du label Salamandre part à la découverte d’un compositeur français largement oublié de nos jours : Alfred Bruneau (1857-1934). Ami intime d’Émile Zola, il créa avec lui de nombreux opéras qui connurent leur heure de gloire à l’Opéra Comique ou à l’Opéra de Paris.

Après avoir exhumé le manuscrit inédit La Nuit de mai de la Bibliothèque Nationale de France et en avoir assuré la création en 2005 à Radio-France, Vincent Figuri souhaitait enregistrer cette œuvre attachante pour quatuor à cordes, harpe et récitant sur le célèbre poème de Musset.

Le programme est complété par 2 cycles de mélodies, Chants Antiques (poèmes d’André Chénier) et Plein Air (poèmes de Théophile Gautier), tous deux interprétés par le ténor Cyrille Dubois, réputé et choisi ici pour sa diction exemplaire. Quelques pièces de musique de chambre permettent de se faire une idée plus large de ce compositeur.

 

Cyrille Dubois (ténor)

Jeff Cohen (pianiste)

Vincent Figuri (récitant)

Quatuor à cordes Varèse

Quatuor Anches Hantées (clarinettes)

Jean McManama, corniste

Marie Normant, harpiste

 

Coffret 2 CD, sortie : avril 2020

Salamandre, 1 route des Sièges, 89320 Vaudeurs

Tél. : 03 86 96 28 37

www.salamandre-productions.com


Pas de premier prix

Alfred BRUNEAU (1857-1934)

       Fichier MP3 Partition et fichier sonore: Le Nouveau-né.

Alfred Bruneau (1857-1934),
second Grand Prix de Rome 1881,
chef d'orchestre à l'Opéra
( photo Mairet )




Signature d'Alfred Bruneau, 1902



Edmond MISSA (1861-1910)

Edmond Missa vers 1898
( Photo Marmand, Paris, in Le Petit Poucet, 4 octobre 1898 )

Dans Le Figaro du 2 juillet 1884 relatant le Concours de Rome, que Debussy venait d’emporter avec L’Enfant prodigue, on pouvait lire à propos d’Edmond Missa que " sa facture est simple et claire, sa mélodie est franche et ne manque pas d’heureux tours. " Mais quelques lignes plus loin le journaliste souligne que c’est " un concurrent qui s’attarde à des formes italiennes à peu près démodées. " Certes, si cet ancien élève de Massenet fit toujours preuve d’une facilité d’écriture en nous livrant une musique toujours pleine de vie et agréablement ornementée et que d’aucuns considéraient comme un handicap, tel Debussy1 lui-même qui écrira un jour " que le défaut que je lui trouve est de s’attarder dans des formes coupables ", tout en reconnaissant qu’il est " sincère et loyal ", d’autres virent au contraire dans cette production une clarté et une fraîcheur qui expliquaient son succès auprès du public. Il ne faut pas en effet oublier que son opéra-comique Muguette en 4 actes et 5 tableaux tableaux (Grus, 1902), écrit sur un poème de Michel Carré et Georges Hartmann d’après la nouvelle de Ouida : Deux petits sabots, représenté à 20 reprises à l’Opéra-Comique à partir du 18 mars 1903, arrivait à l’époque en tête des plus fortes recettes au même titre que Manon et Werther de Massenet. Il sera même donné en Angleterre et en Allemagne. Au même moment, en 1904, André Antoine le sollicitait en lieu et place de Debussy, afin d’écrire la musique de scène du Roi Lear de Shakespeare pour son Théâtre-Libre qu’il avait fondé en 1887. D’autres ouvrages de Missa furent également donnés à l’Opéra-Comique : Juge et partie en 2 actes, livret de J. Adenis d’après la pièce La femme juge et partie de Montfleury (1886) et Ninon de Lenclos, épisode lyrique en 5 actes, sur un texte de A. Leneka et A. Bernède (1895, direction : Carvalho).

Fichier MP3 Prélude de l'opéra-comique Muguette (1902), interprété à l'orgue par Joachim Havard de la Montagne, 1991 (DR.)
Edmond Missa jouant sa partition Muguette à son éditeur Lucien Grus en 1903
( Photo in Musica, 1903, p. 110 )

Ce compositeur qui écrivait vite, parfois même trop vite !, capable de concevoir, écrire et orchestrer un opéra-ballet en 4 actes, Aubeline, en à peine 4 mois (été 1909), contenant pourtant plus de deux heures de musique, était à vrai dire issu d’une famille de musiciens. Cet atavisme artistique mêlé à une longue éducation musicale appropriée explique probablement la grande activité créatrice dont il fit preuve toute sa vie durant.

La cathédrale de Reims
( gravure in Histoire monumentale de la France par A. Saint-Paul, Hachette, 1883 )

Né à Reims le 12 juin 1861, au numéro 27 de la rue de Vesle, c’est auprès de sa mère, née Marie-Louise Duval, ancien prix de piano et de chant du Conservatoire de Paris, qu’il reçut ses premières leçons de musique. Celle-ci, cantatrice, soliste de la Société des Concerts du Conservatoire, fut plus tard professeur de chant à Paris. Chaque année, aidée de son fils, elle donnait à la salle Pleyel un concert au cours duquel ses élèves se produisaient. A cette époque son cousin l’abbé Louis Duval tenait les grandes-orgues de la cathédrale de Reims depuis 1850 et son oncle, Ernest Duval, pianiste et professeur de musique, était également titulaire de l’instrument de l’église Saint-Jacques. Edmond Missa entrait ensuite naturellement à la Maîtrise de Reims, où il devint l'élève de M. Robert, le maître de chapelle. En 1872, tout juste âgé de 10 ans, il succédait à l'orgue de chœur de la cathédrale à Henri Dallier, futur lauréat du Prix de Rome en 1878 et organiste de la Madeleine, à l’orgue de chœur de la cathédrale. Encore adolescent il fut envoyé à Paris, dans l’Ecole de musique classique et religieuse de Niedermeyer. Clément Loret, cet ancien élève de Lemmens au Conservatoire de Bruxelles, y enseignait l’orgue, Gigout l’harmonie, le contrepoint, le piano et le plain-chant, et Gustave Lefèvre la composition. En juin 1878, ses diplômes de plain-chant, piano et d’harmonie en poche, il quittait cette Institution pour aller parfaire ses études musicales au Conservatoire national supérieur de musique auprès de Marmontel (piano), Jules Duprato (harmonie) et surtout de Massenet (composition). Parallèlement Edmond Missa était nommé dès 1878 organiste de l’église St-Louis-en-l’Ile. Il ne cessera d’ailleurs toute sa vie de jouer de l’orgue et de composer de la musique religieuse, même si une bonne partie de sa musique est composée de musique parfois qualifiée de légère et s’il était considéré par certains comme " un musicien aimable, un joli compositeur d’opérettes " ! Dès l’âge de 16 ans il avait déjà écrit plusieurs pièces d’orgue qu’il fera plus tard publier sous le titre de la Petite paroisse. Après St-Louis-en-l’Ile, on le trouva en effet à St-Roch, à St-Honoré-d’Eylau, à St-Thomas-d’Aquin et surtout à Notre-Dame des Blancs-Manteaux (juin 1885), où il resta jusqu'à sa mort. On lui doit aussi une Méthode complète, théorique et pratique, pour harmonium ou orgue Estey (orgue américain), publiée chez Costallat en 1908.


Edmond Missa : Les Anémones
Edmond Missa, Les Anémones, air de ballet pour piano, premières mesures
Musica, n° 13, supplément, octobre 1903, coll. Max Méreaux ) DR
Fichier MP3 Numérisation et fichier MP3 par Max Méreaux (DR)
Edmond Missa à son bureau
( Collection Edmond Missa )

Second prix de contrepoint et de fugue en 1883, il monta à cinq reprises en loge pour le Prix de Rome à partir de 1880, mais ne parvint qu’à obtenir une mention honorable l’année suivante avec la cantate Geneviève de Paris. Le journal L’Evénement écrivait à cette occasion dans ses colonnes : "  Une animation extraordinaire régnait hier dans la cour et aux abords de l’Institut. Les concurrents et leur famille avaient été admis, selon l’usage, à attendre l’issue des opérations dans le salon voisin de la Salle de l’Académie des Beaux Arts. Comme toujours, la plus vive émotion a éclaté dans cette assistance toute intime lorsqu’on a annoncé le résultat du concours. Il y a eu de chaudes embrassades et des sanglots déchirants. Une mère qui a bien pleuré, c’est Mme Missa et sa douleur était bien légitime. La cantate de son fils avait été classée la première du concours préparatoire (jugement des musiciens) et elle obtenait, au concours définitif une voix pour la mention. " Il persista les années suivantes dans son entreprise pour décrocher le premier Grand Prix, mais sa lutte fut vaine, d’autant plus qu’il eut pour concurrent en 1883 et 1884 un certain Claude Debussy. Heureusement pour lui, deux années plus tard, l’Académie des Beaux-Arts lui décernait le Prix Cressent, très prisé à cette époque par les jeunes compositeurs, pour son opéra comique Juge et partie. Lors de sa première représentation la même année à l’Opéra-Comique, la critique lui fut extrêmement favorable. On pouvait notamment lire ces lignes : " La musique de M. Missa est franche et sonore, pleine de gaieté et d’entrain, sans pour autant verser dans la vulgarité. Outre le petit entr’acte symphonique qui a été redemandé, couplets, quintette et ensemble alertes et admirablement scéniques, ont été bissés. Enfin voilà une œuvre couronnée au concours Cressent qui va demeurer au répertoire de la Salle Favart. " Cet ouvrage fut effectivement repris à dix reprises entre le 17 novembre et la fin de décembre 1886, mais l’auteur joua à nouveau de malchance avec l’incendie dramatique de l’Opéra-Comique dans lequel disparaissaient les décors, les costumes et les partitions ! Cela se passait le 25 mai 1887 pendant le premier acte de Mignon, causant la mort d’une quarantaine de personnes. Mais, travailleur acharné, Edmond Missa ne se découragea jamais. Officier d’Académie en 1888, officier de l’Instruction publique en 1896, organiste et compositeur prolifique, il trouvait également le temps de se livrer à l’enseignement, notamment à la Pension des Francs-Bourgeois, et écrivait une Méthode complète théorique et pratique pour harmonium ou orgue (1909, Costallat)

Edmond Missa n’a pas cessé de composer depuis l’âge de 16 ans. Il s’est essayé dans tous les genres, bien qu’il semble avoir eu une réelle prédilection pour la musique de scène et le piano. A ce sujet Denise Vautrin rapporte qu'un ami musicien lui racontait qu'un jour, pressé par une fin de mois difficile, Missa alla trouver l’éditeur Fromont, spécialisé dans les pièces faciles pour piano. Il lui proposa des suites d’orchestre, des mélodies et des chœurs accompagnés qu’il avait en portefeuille, mais l’éditeur les refusa. Prétextant alors se rendre chez lui pour récupérer quelques partitions pour piano, notre compositeur s’éclipsa durant à peine deux heures et revint soumettre à l’éditeur 5 pièces charmantes, qu’il s’empressa de publier. En réalité Edmond Missa venait de les écrire à la terrasse d’un café voisin !

Son catalogue est important et il n’est pas de notre propos ici d’en dresser une liste exhaustive. Néanmoins on peut le diviser en œuvres instrumentales, vocales et musiques de scène. Dans la première catégorie on trouve de nombreuses pièces pour piano (Brises d’automne, le Chant de l’Alliance, Montmartre, Mazurka des oiseaux..., éditées chez Costallat, Enoch, Rouart et Joubert), pour orgue ou harmonium (Entrées, Sorties, Communion, Jobert) et des suites d’orchestre : Les Bains de la mer (1897, Costallat), Scènes Hindoues (1904, Costil), Ballet des Quatre saisons, Valses alsaciennes (Heugel), Aquarelles musicales (Leduc)... ainsi que des partitions de piano écrites spécialement pour les enfants et éditées à Paris chez Jean Jobert, dans les " Célèbres collections des grosses notes " ou dans les séries " Choix de morceaux très faciles et faciles " : Le chien savant (mazurka), Les joues roses (polka), Je suis soldat (marche militaire), Sourire et baiser (valse), A petits pas (polka), Les Mirmidons (valse), Pour jouer à grand’mère, Noël de bébé, J’ai fini, maman (valse), Carillon flamand, Escadron mignon (marche militaire), 4 Promenades : La route ensoleillée, Le ruisselet, la vieille fontaine, Rêverie sous bois, Ma première valse....

Légende du Petit navire, mélodie d'Edmond Missa, poésie de Georges Fragerolle. Editions Costallat.
( Coll. D.H.M. )
La Voilette, chanson écrite pour le cabaret "Le Chat Noir", poésie de Gabriel Montoya, musique d'Edmond Missa, éditions Costallat.
( Coll. Edmond Missa )
Fragment de la Vierge Sainte!, musique d'Edmond Missa pour chant et violon, texte de l'Abbé Perreyve, dédiée « à l'Abbé Duval », son parent. E. Fromont, éditeur.
( Coll. D.H.M. )
Fichier MP3 Fichier audio par Max Méreaux (DR.)

Dans la seconde catégorie, musique vocale, on peut ranger ses nombreuses mélodies et ses chœurs. Citons dans cette importante production les chansons : Les Cerisiers, Entends-tu les ramiers ?, La Fête-Dieu, Galant pastel, Gigue des fruits-confits, Hannetons en goguette, Légende du dragon, La Mémoire des fleurs, Les Moineaux, Noël de bohème, Le Petit Poucet, La Revanche de la cigale, Légende du Petit navire..., toutes éditées chez Costallat, et Les Armes de la Femme, recueil de 10 poèmes de Gabriel Montoya mis spécialement en musique par Edmond Missa pour le célèbre cabaret «le Chat noir » : L'Eventail, La Voilette, La Bottine, La Coiffure, Le Divin Sourire, L'Ombrelle, La Robe, Parfum troublant, Les Yeux qui chantent, L'Amour impossible (Costallat). Parmi sa musique religieuse n’omettons pas de signaler sa Vierge sainte !, pour chant et violon ad libitum, écrite sur une prière de l’Abbé Perreyve et dédiée " A l’Abbé Louis Duval ", son parent (Paris, E. Fromont), un Noël (deux tonalités) édité chez Henry Lemoine, ainsi que toute une série d’autres Noël d’enfant à plusieurs voix chez le même éditeur, et trois Messes : Les Voix du ciel (Enoch), Reine du ciel (Jobert) et Monseigneur Jésus (Hamelle)...

Enfin sa musique de scène comprend une trentaine d’opéras-comiques, opérettes, drames lyriques et autres opéras-bouffes. En dehors de ceux déjà cités, voici la liste de ses ouvrages : La Belle Sophie (opéra-bouffe en 3 actes, 1888, Bathlot et veuve Héraud), Le Chevalier timide (opéra comique en 1 acte représenté en 1887 aux Menus-Plaisirs, Leduc), La Chouanne (opéra en 1 acte, 1907, Grus), Cyprienne (pièce lyrique en 3 actes et 5 tableaux, 1910), Le dernier des Marigny ( féerie en 5 actes donnée en 1896 au Théâtre Marigny, Eschig), Dinah (comédie lyrique en 4 actes d'après Shakespeare représentée à la Comédie-parisienne en 1894, Choudens), La D’moiselle du Tabarin (opérette en 3 actes, paroles de Maurice Ordonneau et André Alexandre, représentée le 25 mars 1910 au Nouveau Théâtre du Château d’eau, Choudens), Hermann et Dorothée (opéra en 3 actes, 1911, Grus), L’Hôte (pièce lyrique en 3 actes, tirée de la pantomime de Michel Carré et Paul Hugounet, représentée en 1893 au Théâtre des Bouffes-Parisiens, 1896, Heugel), Lydia ou les fiancés de Novgorod (opéra-comique en 1 acte, 1888, Leduc), Maguelone (drame lyrique en 1 acte créé par Emma Calvé le 21 juillet 1903 au Covent-Garden de Londres, sous la direction d’André Messager, 1904, Jobert), Mini-Fauvette (vaudeville, 1892, Quinzard), Les Trois Bossus (farce lyrique en 1 acte et 3 tableaux, 1896, Rouart), Doctoresse (pantomime en 1 acte représentée en 1890 aux Bouffes-Parisiens, Heugel), Le mariage galant (opérette représentée en 1892 aux Menus-Plaisirs), La Demoiselle aux Camélias (opérette représentée en 1899 aux Bouffes-Parisiens), Niou (Choudens), La Belle Sophie (en 3 actes, représenté aux Menus-Plaisirs en 1888), La Princesse Mangara (en 3 actes, représenté en 1891 au Grand-Théâtre de Reims), Les Bohémiens (drame lyrique en 5 actes), Babette (Londres, 1900), Lucas et Lucette (opéra comique en 1 acte, sur un poème de Paul Gravellot, Grus, 1905)... Il ne faut pas également oublier plusieurs ballets : Vision (Olympia), Les Grandes Courtisanes (Folies-Bergère), Les Deux baisers (Olympia), Lydia (créé à Dieppe en 1887, Leduc), La Peur (créé au Théâtre Belle-Alliance à Berlin, 1904)...

Terminons cette esquisse biographique en rapportant ces paroles de Philippe d’Ohsson3 que nous reprenons à notre compte : " Et voyez quel souci d’art délicat, quel éclectisme amoureux décèlent souvent les titres mêmes de ses œuvres, et combien ils évoquent cette musique subtile, lumineuse, rieuse, parfumée, émerillonnée comme son auteur, dont les yeux gris, eux aussi rieurs, dont la tête ronde et rose, presque poupine, révèlent un cœur émerveillé, une âme presque enfantine. " Quant au musicologue René Dumesnil3, il voyait dans les pièces d’Edmond Missa une musique rappelant son maître Jules Massenet, qui en avait souvent le charme.

Edmond Missa s’est éteint le 29 octobre 1910 à Paris. Il avait tellement écrit pour lui, mais également pour les autres, que le critique musical Pierre Lalo lança cette boutade : « Edmond Missa est mort, que de compositeurs n'écriront plus... »

Denis HAVARD DE LA MONTAGNE 4

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1) Revue Gil Blas, 23 mars 1903. [ Retour ]

2) L'Echo Musical, n° 18, 15 mars 1905. [ Retour ]

3) La musique contemporaine en France, tome II, p. 111 (Paris, Librairie A. Collin, 1949). [ Retour ]

4) Nous remercions vivement M. Edmond Missa, petit-fils du compositeur, de nous avoir si aimablement renseigné en mettant gracieusement à notre disposition ses archives familiales. [ Retour ]

La Bibliothèque nationale du Québec propose en ligne cinq enregistrements anciens de pièces vocales d'Edmond Missa : http://www4.bnquebec.ca/musique_78trs/mc275.htm



1882

Épreuve de lecture à vue, par Georges Marty
Georges Marty, Morceau de lecture à première vue, imposé aux élèves femmes aux concours 1905 du Conservatoire national de musique (en plus de cette épreuve, ce concours des classes féminines comprenait deux morceaux d'exécution : un Prélude en ré de Bach et un Allegro de concert de Chopin)
( Musica, n° 36, 1905, coll. Max Méreaux  ) DR
Fichier MP3 Numérisation et fichier audio par Max Méreaux (DR.)
Georges MARTY (1860-1908)

Georges Marty (1860-1908) vers 1900,
Grand Prix de Rome 1882,
professeur de la classe d'Ensemble vocal
au Conservatoire de Paris,
successeur de Taffanel
à la tête de la Société des concerts
du Conservatoire en 1903
(BNF-Gallica) DR.

Eugène-Georges Marty, né le 16 mai 1860 à Paris fut initié à la musique par son père, Baptiste Marty (1822-1905), originaire de Castres (Tarn), artiste lyrique (ténor) qui était notamment sociétaire des Concerts du Conservatoire. Au Conservatoire de Paris qu’il intégra en 1873, il fréquenta les classes de Emile Gillette (solfège), Louis Croharé (piano), César Franck (orgue), Théodore Dubois (harmonie) et François Bazin puis son successeur en 1878 Jules Massenet (composition). 1ère médaille de solfège en 1875, 1er prix d’harmonie en 1878, il concourait à 4 reprises pour le Prix de Rome : mention en 1879 avec la cantate Médée (livret d’Albert Grimault), 2ème grand prix en 1880 avec la cantate Fingal (livret de Charles Darcourt), non primé en 1881 (cantate Geneviève, livret d’Edouard Guinand), 1er grand prix en 1882 (cantate Edith, livret d’Edouard Guinand). Durant son séjour à la Villa Médicis qui se déroula de janvier 1883 à décembre 1886, il composa le poème dramatique Merlin enchanté (1883), une Suite d’orchestre en 4 parties sur Les Saisons (1884), le début du 1er acte du drame lyrique Le Duc de Ferrare (1885) et l’ouverture dramatique de Balthazar (1886), voyagea en Italie, en Sicile, en Allemagne et visita la Tunisie. Achevé ultérieurement, Le Duc de Ferrare composé sur un livret de Paul Milliet (3 actes) sera créé le mardi 30 mai 1899 au Théâtre-Lyrique de la Renaissance par l’auteur dirigeant l’orchestre (« ouvrage wagnérien », dirons certains critiques).

 

Sa carrière se déroula principalement en tant que chef de chœurs ou chef d’orchestre : chef de chœurs au Théâtre-Lyrique (Eden-Théâtre) en 1890-1891 du temps du directeur Henry Verdhurt, où il monta Samson et Dalila de Saint-Saëns (octobre 1890) et La Jolie Fille de Perth de Bizet (1890), puis à l’Eden de 1892 à 1894. Le 5 avril 1891 à l’Hippodrome de l’Alma il avait aussi dirigé les chœurs pour la première représentation de Néron d’Edouard Lalo (pantomime en 3 actes sur un livret de Paul Milliet). Chef de chant à l’Opéra de 1893 à 1896, il monta ici, entre autres productions, Gwendoline et Briséis (Chabrier), Faust (Gounod, reprise), Djelma (Ch. Lefebvre), Othello (Verdi), Tannhäuser et Les Maîtres chanteurs (Wagner), La Favorite (Donizetti, reprise), Messidor (A. Bruneau), Thaïs (Massenet, reprise), Le Prophète (Meyerbeer, reprise), La Prise de Troie (Berlioz). Egalement chef d’orchestre à l’Opéra Comique de 1900 à 1902, il y débutait avec Manon de Massenet le 11 mars 1900, y reprenait Iphigénie (Gluck), Joseph (Méhul), Mireille (Gounod), Les Visitandines (Devienne), et créait Le Follet le 1er mai 1900 (comédie lyrique de Pierre Barbier, musique de Lefèvre-Derodé) et Phoebé le 4 juillet 1900 (ballet en un acte de Georges Berr, musique d’André Gedalge). Puis, en 1901 il succédait à Paul Taffanel (démissionnaire) comme chef d’orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire. Là, il dirigea le 28 janvier 1906 la première audition du Cantique de Jean Racine de Gabriel Fauré, chœur à 4 voix mixtes et orgue, dans sa version de 1905 avec accompagnement d’orchestre. C’est André Messager qui lui succéda à son décès en 1908.

 

Georges Marty participe aussi aux concerts de la « Société des grandes auditions musicales » fondée en avril 1890 à l’initiative de la comtesse de Greffülhe, sous la présidence de Gounod. Le 3 juin 1891, dans la salle des Fêtes du Trocadéro, elle donnait l’oratorio Israël en Egypte de Haendel, sous la direction de Gabriel Marie, ainsi que Marty à la direction des chœurs, Victor d’Indy à l’orgue et les solistes Mmes Krauss, Deschamps-Jéhin, Boidin-Puisais, MM. Lafarge, Auguez, Manoury. En 1906, il succédait aussi à Jules Danbé en tant que directeur des Concerts classiques et symphoniques du Casino de Vichy. Parmi les grands concerts qu’il dirigea dans cet établissement, citons le deuxième de juillet 1906 qui fut d’ailleurs un important événement musical salué par la presse, avec un programme digne des concerts parisiens : Symphonie italienne (Mendelssohn), Danse macabre (Saint-Saëns), Elégie pour violoncelle (Fauré), Scènes alsaciennes (Massenet), ouverture du Freischütz (Weber).

 

Parallèlement à ses activités de chef, il enseigna au Conservatoire de Paris. Tout d’abord professeur de la classe d’ensemble vocal à partir de février 1892, succédant là à Jules Cohen, il reprenait ensuite, en novembre 1904, celle d’harmonie (femmes) de Samuel Rousseau décédé un mois plus tôt, poste qu’il va occuper jusqu’à sa disparition soudaine arrivée quatre années plus tard. Parmi ses élèves, on peut citer le compositeur et chef d’orchestre Marius Versepuy (1882-1972), la harpiste et professeur de harpe au Conservatoire de Paris Lily Laskine (1893-1988) et Marguerite Canal (1890-1978), lauréate du Prix de Rome en 1920, professeur de solfège (chant) au Conservatoire de Paris, compositrice.

 

Georges Marty avec son épouse, Rosine Marty
(in Musica, n° 47) DR.

Georges Marty, très occupé par ses multiples fonctions, n’a cependant jamais abandonné la composition. C’est ainsi, qu’en plus des œuvres mentionnées infra dans des articles de presse, on peut encore citer de nombreuses mélodies, particulièrement appréciées dans les Salons de l’époque : Chanson, La Sieste, Idylle, Brunette, Dernier vœu, Fleur des eaux, Regrets, Au Matin, Toast, Chanson d’avril, Où donc es-tu partie ?, Sonnet à Ophélie, Désir d’avril, Au matin, Fou d’amour, Si tu savais comme je t’aime, Berceuse, C’est le vent qui m’a fait pleurer… ; Lysis pantomime pour orchestre (1888) ; des chœurs pour 3 voix de femmes édités chez Enoch : L’Automne, L’Hiver, Le Printemps, L’Eté ; des pièces pour piano : Elégie, Pensée intime, Valse, Barcarolle, Improvisata (éditées chez Quinzard), transcription pour piano de l’Ouverture des Barbares de Saint-Saëns (Durand, 1901) ; une Fantaisie pour clarinette en si bémol avec accompagnement de piano.

 

Officier d’Académie (1893), Officier de l’Instruction publique (1898), Chevalier de la Légion d’honneur (décoration remise le 19 octobre 1900 par Théodore Dubois, alors directeur du Conservatoire), Georges Marty est brutalement décédé à 48 ans le 11 octobre 1908 à 11 du soir en son domicile du 11 rue Pigalle, d’un abcès au foie ayant provoqué une hémorragie. Ses obsèques furent célébrées le mercredi 14 en l’église de la Trinité à Paris, suivies de son inhumation au cimetière des Batignolles, en présence d’un grand nombre de musiciens et de Gabriel Fauré qui prononça un discours. Il avait épousé, en août 1895 à Paris, l’artiste lyrique et professeur de musique Séraphine de Wulf, originaire de Bruxelles, connue sous le nom de Rosine Marty et soliste des Concerts du Conservatoire. Deux enfants vinrent au monde, mais disparurent tragiquement : Marcel Marty, né le 19 mars 1894 à Paris, mort au combat dès le début de la guerre à l’âge de 18 ans, le 15 novembre 1914 au Godat (Marne). Alors caporal au 119ème régiment de ligne, il s’était engagé volontaire pour 3 ans, le 11 octobre 1913. Quant à leur fille Georgette Marty, née le 16 janvier 1896 à Paris, elle mourut à l’âge de 4 ans, le 15 décembre 1900.

 

« Musicien consommé, compositeur à la phrase élégante et remplie de fraîcheur », comme l’a écrit un jour un critique musical, Georges Marty, mort jeune, n’a pas eu le temps de donner toute la mesure de son talent. Il était particulièrement apprécié par Emmanuel Chabrier avec lequel il était lié.

 

Le dimanche 15 novembre 1908 à 14h. à Paris, un « Concert extraordinaire à la mémoire de Georges Marty et au bénéfice de sa veuve » fut organisé par la Société des Concerts du Conservatoire, sous la direction d’André Messager, avec 5 œuvres au programme : l’Ouverture de Balthazar (Marty), la Suite d’orchestre Shylock (Fauré), un large fragment du 1er acte d’Alceste (Gluck), le Concerto pour piano en ut mineur (Mozart) exécuté  par Saint-Saëns et la 9ème Symphonie avec chœurs de Beethoven.

 

Denis Havard de la Montagne

Mort de Georges Marty

 

Georges Marty
(photo Berger) DR.

La musique et les musiciens viennent de faire une grande perte. Georges Marty, l'éminent chef de la Société des concerts du Conservatoire, est mort dimanche soir. Rien ne pouvait laisser prévoir une fin si prématurée. Georges Marty était très jeune : il était né le 16 mai 1860 à Paris. Il meurt donc à quarante-huit ans, en pleine possession de son talent de compositeur, en plein couronnement de sa brillante carrière.

 

Il avait, cette année, comme chaque année, dirigé l'orchestre des concerts classiques de Vichy. Sa saison terminée, il était rentré à Paris ; et pour goûter un peu de repos bien mérité, était allé en Normandie. Un abcès au foie s'est déclaré. La femme dévouée de Marty n'eut que le temps de ramener le malade à Paris où il a expiré sans même souffrir.

 

Il ne s'est pas douté un instant de la gravité de son mal ; il n'a pendant toute sa maladie, parlé que des œuvres qu'il espérait diriger au Conservatoire dans quelques semaines. Une hémorragie, hélas ! a dissipé toutes les lueurs d'espérance que ses proches et ses amis pouvaient fonder sur une guérison souhaitée. Quelques heures plus tard, tout était fini : Georges Marty expirait au milieu des larmes déchirantes des siens.

 

Marty, qui était arrivé à la haute situation de chef d'orchestre de la Société du Conservatoire, succédait ainsi à la grande lignée des directeurs du Concert spirituel (la fonction s'appelait ainsi au XVIIIe siècle), les Danican Philidor, les Royer, les Capéran, les Dauvergne, les Gaviniès, les Legros, puis plus tard les Habeneck, les Girard, les Georges Haine, les Deldevez, les Taffanel.

 

C'était un parfait musicien : Marty, au Conservatoire, ne s'est pas borné à diriger l'orchestre, il a donné une vraie orientation à la musique avec un goût très sûr. Les abonnés du Conservatoire sont d'esprit quelque peu rétrograde : ils n'applaudissent que ce qu'ils connaissent. Marty, à force de persévérance, leur imposa l'audition d'œuvres modernes. Il était non moins ennemi des inutiles traditions : c'est ainsi qu'au début des chœurs a capella, on avait au Conservatoire l'habitude de jouer un prélude d'orgue pour donner le ton aux choristes. Marty supprima cet usage qui était contraire à l'audition des œuvres musicales, puisque l'auteur n'avait pas jugé à propos d'écrire le prélude en question. Je pourrais citer nombre d'autres réformes et progrès que l'on doit à Georges Marty.

 

Comme musicien, Marty s'était désigné à l'attention du public et de la critique par des œuvres peu nombreuses, mais d'un tour distingué, telles que Merlin enchanté, Balthazar, Matinée de Printemps. Il avait composé, en fait d'œuvres théâtrales, le Duc de Ferrare, drame lyrique, qui fut joué en 1890 au Théâtre Lyrique, et Daria, livret de MM. Adolphe Adorer et Ephraïm, qui fut représenté en 1903 à l'Opéra. Sa musique est claire, très mélodique, d'une facture instrumentale très soignée et d'une orchestration sans fracas.

 

Georges Marty vivait dans le commerce des grands maîtres de la musique ; c'est ainsi qu'il avait été chargé par MM. Durand et fils, qui ont tout fait pour faire revivre les œuvres classiques du dix-septième et du dix-huitième siècle, de publier et de réviser une édition de Couperin.

 

Comme homme, Marty était l'ami le plus dévoué qui se pût trouver : d'aspect froid, il ne se livrait pas au premier venu ; mais il était de relations sûres. C'était un modeste qui n'a jamais eu recours aux réclames qu'aiment tant quelques-uns.

 

Il avait passé par l'enseignement au Conservatoire, avait été chef du chant à l'Opéra, chef d'orchestre à l'Opéra-Comique, avant de diriger la Société des Concerts du Conservatoire, il ne laissera partout que des regrets.

 

Après Luigini si tôt enlevé, Marty part à son tour encore plus jeune. Les bons musiciens, hélas ! se font rares, et il faut d'autant plus les pleurer quand ce sont aussi de braves gens.

Louis Schneider

(in Gil Blas, 13 octobre 1908)

 

Le Figaro, jeudi 15 octobre 1908 (DR.)

Georges Marty est mort

 

Encore un musicien qui s'en va, et non des moindres.

 

Georges Marty est décédé, hier soir, à dix heures vingt, à son domicile, 11, rue Pigalle, d'une affection du foie. Il était entouré de sa mère, de sa femme et de son fils, dont la douleur est indescriptible. A l'heure où nous nous présentons à la maison mortuaire — un quart d'heure après le décès — la nouvelle n'est pas encore connue du monde des théâtres. Sauf deux ou trois amis intimes de la famille, qui sont admis à pénétrer auprès de Mme Marty, personne n'est encore venu, rue Pigalle.

 

Georges Marty, que la mort vient brutalement de frapper, était Parisien de Paris. A douze ans, il était entré au Conservatoire, où il suivit les cours de MM. Gillette, pour le solfège ; Croharé, pour le piano ; Théodore Dubois, pour l'harmonie, et César Franck, pour l'orgue ; MM. Bazin et Massenet lui enseignèrent le contrepoint, la fugue et la composition.

 

Avec de pareils maîtres, Georges Marty eut vite fait de développer les merveilleuses qualités musicales dont il était doué. Il fut, d'ailleurs, un brillant élève, et, lauréat du Conservatoire pour toutes ses classes, il remporta, en 1882, le grand prix de Rome avec sa cantate Edith.

 

Si Georges Marty devint un directeur de musique remarquable, s'il fut élu par ses pairs chef d'orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire, s'il monta au pupitre de l'Opéra-Comique et de l'Opéra avec cette autorité que l'on se rappelle, il n'en est pas moins vrai que Georges Marty consacra la plus grande partie de son existence à la composition.

 

Tout au début de sa carrière, il avait beaucoup voyagé. De partout, d'Italie, d'Allemagne, de Tunisie, etc., il envoyait des pages délicieuses dont un poème dramatique : Merlin enchanté, une suite d'orchestre sur les Saisons, l'ouverture de Balthazar.

Signature autographe, 1900 (DR.)

 

En 1890, il fut chef des chœurs au Théâtre Lyrique, où il monta Samson et Dalila.

 

En 1892, Marty était nommé professeur au Conservatoire ; l'année suivante, il entrait à l'Opéra comme chef de chant. Dix ans plus tard, nous le retrouvions chef d'orchestre à l'Opéra-Comique, mais sa vraie grande réputation vint de la Société des Concerts du Conservatoire, dont il était devenu le directeur, très jeune encore — à quarante ans.

 

Parmi les compositions de Georges Marty, Le Duc de Ferrare et Daria, deux drames lyriques valurent un gros succès d'estime à leur auteur.

 

Citons encore : Ballade d'Hiver, Matinée de Printemps, Lysis, des mélodies en grand nombre, sans compter des pièces d'orchestre, des chœurs, etc.

 

Le bagage musical de Georges Marty constitue donc un monument suffisant pour lui assurer un rang important dans notre école musicale

 

Comoedia

(12 octobre 1908)


Gabriel PIERNÉ (1863-1937)

Gabriel Pierné (1863-1937), Grand Prix de Rome 1882, organiste de l'église Sainte-Clotilde à Paris où il succède à César Franck, chef d'orchestre des Concerts Colonne, membre de l'Institut
( photo Henri Manuel )


Plusieurs textes, illustrations et extraits audio sur cette page spécifique.


1883

Paul VIDAL (1863-1931)

Paul Vidal (1863-1931),
Grand Prix de Rome 1883,
chef d'orchestre à l'Opéra,
directeur musical de l'Opéra-Comique,
professeur d'accompagnement
au Conservatoire de Paris
( photo Pierre Petit )

Fondateur, avec Georges Marty, des Concerts de l’Opéra, Paul Vidal a fait principalement sa carrière à l’Opéra et à l’Opéra-Comique de Paris. Son ballet La Maladetta, composé en 1893 sur un livret de Pedro Gailhard, a été joué près de deux cents fois à l’Opéra.

C’est à Toulouse qu’il est né, le 16 avril 1863 et c’est au Conservatoire de cette ville qu’il fit ses premières armes, à l’époque où Paul Mériel en assurait la direction. A l’âge de 15 ans il entrait au Conservatoire national supérieur de musique de Paris, dans les classes de Marmontel, Durand et Massenet, et où il remportait les premiers prix d’harmonie (1879) et de contrepoint et fugue (1881). Deux ans plus tard, il obtenait une brillant Premier Grand Prix de Rome avec sa cantate Le Gladiateur (éditée chez Hartmann), devant Claude Debussy, qui lui valait le qualificatif de " remarquable musicien ". Le sujet de cette scène lyrique était d'Emile Moreau, auteur d'un autre ouvrage intitulé Corneille et Richelieu, qui avait obtenu quelque temps auparavant un certain succès au Théâtre-Français. En 1881 Paul Vidal s'était déjà essayé au Concours de Rome et avait été récompensé par un deuxième Second Grand Prix.. Le sujet imposé, Geneviève, de E. Guinand l'avait sans doute moins inspiré cette année là, même si les critiques musicaux soulignaient alors la qualité de son ouvrage plein de promesses. Il avait récidivé l'année suivante avec la cantate Edith, mais sans obtenir cette fois ci la moindre récompense. Massenet a beaucoup compté dans la formation artistique de Paul Vidal, d'ailleurs il lui en garda toute sa vie une profonde reconnaissance. C'est ainsi qu'en décembre 1911, il écrivait à Adolphe Brisson, rédacteur en chef des Annales politiques et littéraires : " Ce fut le plus merveilleux éveilleur d'âmes, le plus généreux stimulateur d'énergies et d'imaginations. Les âmes ont répondu ; les imaginations ont fleuri : il en peut revendiquer hautement comme sienne l'harmonieuse moisson. ""

Entré à l’Opéra en 1889 comme sous-chef des chœurs, il fut promu ensuite directeur du chant (1892) puis chef d’orchestre en 1906. En 1914, il fut appelé à diriger la musique à l’Opéra-Comique, poste qu'il occupera jusque 1919.

Egalement professeur au CNSM, il y enseigna le solfège puis l'accompagnement au piano à partir de 1894, avant de prendre une classe de composition et fugue en 1910. La qualité de son enseignement était connue de tous les musiciens, car, malgré ses succès dans la musique de théâtre, il ne cessa jamais de s’intéresser aux jeunes musiciens en herbe qu’il aidait même parfois à trouver une situation. Il a formé ainsi un grand nombre d'artistes de valeur. Paul Vidal fut en outre Inspecteur de l'enseignement musical en France, membre du conseil d'administration de la Société des auteurs et président honneur de plusieurs groupements professionnels.

Paul Vidal, 1863-1931.
( photo Pierre Petit. )
Compositeur fécond, c’est principalement dans la musique de scène que Paul Vidal s’est fait un nom. En dehors de La Maladetta déjà citée, on lui doit également des opéras de grande valeur : Guernica (Opéra-Comique, 1895), La Burgonde (Opéra, 1898), Ramsès (1908), Naïl ; une opérette : Eros en 3 actes (Bouffes Parisiens, 1892) ; d’autres ballets : Fête russe (1893), L’Impératrice (1901), Zino-Zina) avec Jean Richepin (Monte-Carlo, 1906) ; de la musique de scène : Le Baiser (Banville); des pantomimes, ainsi que bon nombre de pièces pour piano (Staccato, Scherzetto, Romance sans paroles, Marche, Pages d’album...), des mélodies (En moisson, Chansons de Shakespeare, Choeurs...); de la musique religieuse : Saint Georges, légende dramatique pour soli et chœur (Leduc), Cantique : Qu'ils sont aimés (Leduc) ; des motets, des cantates (La Filleule des fées...) et autres pages vocales diverses : Berceuse angélique pour 4 voix de femmes (Leduc) ; des mystères et un poème symphonique qui mériterait largement de sortir de l’oubli dans lequel il est tombé : La Vision de Jeanne d’Arc. Notons également un Andante et une Pastorale pour violoncelle, harpe et orgue, un Divertissement flamand pour grand orchestre, une ouverture M. de Pourceaugnac, une pièce pour piano et violon : Sérénade sur l’eau, une autre pour piano et trombone : Solo de concert n°2 et un Gloria Pater... Il a même mené des travaux musicologiques intéressant notamment le folklore. C’est également lui qui a terminé l’instrumentation de La Vivandière laissée inachevée par Benjamin Godard et dont on connaît le succès arrivé par la suite à l’Opéra-Comique.


Fac-similé partition manuscrite et signature autographe de Paul Vidal, extraites de sa pièce funambulesque Lélio. Collection des Morceaux manuscrits pour piano des auteurs les plus célèbres..., publiée à Paris chez Alphonse Leduc.
exemplaire dédicacé par Émile Leduc à Madame Hedwige Chrétien, coll. DHM. )
Lecture à vue, de Paul Vidal
Paul Vidal, Morceau de lecture à vue pour piano
(in Musica, n° 48, septembre 1906, coll. Max Méreaux)
Fichier MP3 Fichier audio par Max Méreaux (DR.)

Paul Vidal est mort à Paris, le 9 avril 1931. Son frère, Joseph (1859-1924) fut également un chef d’orchestre et un compositeur réputé, principalement dans l’opérette.

Denis HAVARD DE LA MONTAGNE



Fichier MP3 Monsieur Kenichi Fujimaki, traducteur de la version en japonais du Traîté de la Fugue de Gedalge, a publié des échantillons audio des exemples musicaux inclus dans cet ouvrage (et autres fugues)
sur la chaîne YouTube des éditions Glycine, avec suivi automatique de la partition.
Cette chaîne propose des fugues de MM. Revel, Messiaen, Rivier, Enesco, Schmitt, Morpain, Malherbe, Boulay, Depecker, Koechlin, Van Doren, Vidal.


1884

Claude DEBUSSY (1862-1918)

Claude Debussy, 1862-1918,
élève d'harmonie d'Émile Durand contre lequel il se rebella.
( photo Nadar, Musica, sept. 1910. )
Claude Debussy en 1884
d'après le portrait de Marcel Baschet.
( paru en 1932 dans L'Illustration, BNF Richelieu )

 

Claude Debussy en 1909
( A.Harlingue, d'après Nadar, BNF Richelieu )
Claude Debussy sur son lit de mort en 1918.
Dessin de Friesz.
( BNF Richelieu )




Claude Debussy, Danse de la poupée, extraite du ballet enfantin La Boîte à joujoux,1913
( Paris, Durand, 1913, reprint in Musica, supplément, février 1914, coll. Max Méreaux ) DR
* Plusieurs fautes de gravure ont été corrigées :
- Page 1
un point manquait à côté de la blanche de l’indication métronomique (il s’agit d’une blanche pointée)
3e système, 8e mesure, main droite, il manquait un point à côté du « fa » (noire pointée)
3e système, dernière mesure , main droite, la 3e croche est un « si » bémol (et non un « ré »)
4e système, 3e mesure, main droite, mi croche
5e système, 1e mesure, main droite, mi croche
- Page 2
1er système, 2e mesure, main droite, 3e temps, « mi » bémol de précaution sous le « mi » bémol aigu en octave
1er système, 4e mesure, main droite, « ré » bémol sous le « ré » bémol aigu en octave

Fichier MP3 Numérisation, corrections et fichier MP3 par Max Méreaux (DR.)



Considérations sur le Prix de Rome au point de vue musical
par Claude Debussy

Il y a diverses façons de parler du prix de Rome.

On peut d'abord trouver cette institution stupide… opinion qui se traduit généralement par cette apostrophe :

"Enfin! Monsieur! Voulez-vous me dire pourquoi on envoie les musiciens à Rome? "

A quoi l'on répond que cette institution est passée à l'état de superstition dans certains milieux. Avoir eu ou ne pas avoir eu le Prix de Rome résolvait la question de savoir si l'on avait oui ou non du talent. Pour ne pas être infaillible, c'était du moins un moyen commode de préparer à l'opinion publique une comptabilité facile à tenir.

Malheureusement, on perd pied tout de suite en constatant que Saint-Saëns, chef officiel de la jeune école française, n'a pas eu le Prix de Rome, pas plus que M. Vincent d'Indy, chef élu par un autre groupe plus jeune... Sans discuter la valeur personnelle de ces deux hommes, ils sont également "représentatifs". De les voir exclus de ce "palmarès" peut faire croire à quelque chose de vicieux dans la façon de distribuer l'honneur d'en faire partie, par la raison logique qu'ils semblaient désignés, plus que tous autres, à cet honneur.

A vrai dire, je suis en mauvaise posture pour critiquer cette institution. J'ai l'air de faire fit d'un plat dont j'ai mangé comme beaucoup d'autres puisque j'ai eu le Prix de Rome et me suis assis à la table de la Villa Médicis, si du moins on peut ainsi appeler un régime qui tient du restaurant où pour 1 fr. 25 on nous détruit l'estomac pour le restant de nos jours.

Je me rappelle avec encore un peu d'effroi un certain plat nommé prétentieusement "Roba dolce" où un goût de pétrole s'alliant sourdement à de la crème tournée, rendait bien mélancolique notre jeune fierté d'être Prix de Rome. — Laissons de côté ces considérations toutes matérielles et peut-être indignes de jeunes gens assez épris d'art pour en oublier la plus élémentaire hygiène… Il y a des raisons plus hautes de discuter cette institution ; on les a formulées un peu partout et même à la Chambre des Députés ; jusqu'ici cela n'a pas servi à grand chose.

Remarquez que je trouve fort bien que l'on facilite à des jeunes gens de voyager tranquillement en Italie et en Allemagne ; mais pourquoi restreindre le voyage à ces deux pays? Pourquoi surtout ce malencontreux diplôme qui les assimile à des animaux gras? Au surplus, le flegme académique, avec lequel ces Messieurs de l'Institut désignent celui d'entre tous ces jeunes gens qui sera un artiste, est touchant d'ingénuité confiante. Qu'en savent-ils? Ou prirent-ils tant d'assurance à diriger une destinée aussi aléatoire?

La musique est une mathématique mystérieuse dont les éléments participent de l'Infini. Elle est responsable du mouvement des eaux, du jeu de courbes que décrivent les brises changeantes ; rien n'est plus musical qu'un coucher de soleil ! Pour qui sait regarder avec émotion, c'est la plus belle leçon de développement écrite dans ce livre, pas assez fréquenté par les musiciens, je veux dire : la Nature... Ils regardent dans les livres, à travers les maîtres, remuant pieusement cette vieille poussière sonore ; c'est bien, mais l'Art est peut-être plus loin !

Pour revenir au Prix de Rome, on juge ce concours sur une œuvre appelée "Cantate", forme hybride qui participe maladroitement de l'Opéra, dans ce que celui-ci a de plus banal ; ou de la "symphonie avec personnages chantants", trouvaille vraiment "institutaire" dont je ne conseillerai à personne de se déclarer l'auteur! Il me semble aussi impossible de juger que de savoir si ces jeunes gens savent leur métier de musicien sur un tel travail... D'ailleurs, on sait comment les choses se passent?.. Quelques mois avant le concours, on entraîne les concurrents sur "la piste Cantate" (tel un cheval pour le Grand Prix) , on cherche dans les cantates primées antérieurement la formule pour avoir le prix et le tour est joué, à la grande joie des parents et de l'assistance et l'on a, par-dessus le marché, l'accolade de M. Th. Dubois. Sans parti pris ni paradoxe, c'est à peu près tout ce à quoi sert le Prix de Rome.

Si l'on tient absolument à délivrer un titre, ne pourrait-on pas s'en tenir à un a "certificat de hautes études" ? Mais pas ce "certificat d'imagination", inutilement grotesque et pas sûr du tout. Il peut même devenir dangereux, les faveurs officielles attachées au titre de Prix de Rome nous valant d'entendre beaucoup de mauvaise musique et les familles anxieuses de l'avenir de leurs enfants y trouvant un encouragement – depuis surtout que la carrière d'ingénieur est si encombrée. Par d'autres côtés, cette espèce de surculture a le grave défaut d'éloigner les jeunes musiciens de la musique pure ; cette maudite "cantate" leur donnant précocement le goût du théâtre (théâtre qui dans beaucoup de cas n'est que l'agrandissement exaspéré de la cantate). A peine revenus de Rome, ils font la chasse au livret, pris d'une hâte fébrile de marcher sur la trace de leurs aînés. — Renan a dit quelque part (à moins que ça ne soit M. Barrès) que c'est prétention et échec d'écrire avant la quarantaine. On pourrait justement étendre cette opinion jusqu'à la musique dramatique qui, à moins de géniale exception, ne prend de réelle valeur que vers cet âge.

Lorsqu'on se plaint du peu de symphonies que la France peut opposer aux autres pays, il faut peut-être en accuser le Prix de Rome? Si j'avais le goût de la statistique, je démontrerais facilement que toute la musique symphonique, ou à peu près, ne porte aucune estampille officielle. Quand elle le porte, ça ne donne pas toujours ce que l'on attendait, j'en citerais un illustre exemple : M. Massenet ! Ne le vit-on pas tout dernièrement faire comme ses débuts dans la musique symphonique lorsqu'il fit exécuter au Conservatoire un Concerto pour piano et orchestre?... Avec un peu d'irrévérence on le renvoya à Manon ! Ce Concerto n'était probablement pas plus mauvais qu'un autre, seulement l'éducation et les tendances de M. Massenet l'éloignèrent de la musique pure, il ne pouvait plus y réussir avec la sureté triomphale dont il est coutumier au théâtre.

Quant à la musique de chambre, Mozart, Beethoven, Schumann, etc., en ont beaucoup écrit. C'est heureux, car le répertoire moderne peut se compter sans respirer. Il fléchit sous le poids lourd du Passé, non pas qu'il ne contienne aucune œuvre parfaite, mais on ne l'encourage pas assez. Je ne parle pas de la sonate en général, ni de la sonate pour piano en particulier ; ces considérations sont inactuelles. Aussi, n'avons nous guère pour représenter notre époque qu'une seule sonate pour piano : celle de Paul Dukas. Par la grandeur de sa conception elle prend place immédiatement après les sonates de Beethoven. Ce fut un événement considérable qui pouvait encourager les amateurs de hautes spéculations.

Toutefois il faut avouer que ce genre de musique réclame une alchimie particulière à laquelle il faut offrir sa chère petite tranquillité en holocauste... C'est dur à soutenir et absolument improductif. Adieu! les bons droits d'auteur, la si flatteuse poignée de main directoriale. On n'est plus qu'une espèce de savant particulier et vos confrères vous regardent avec cette condescendance que le succès rend méprisante.

Mais revenons au Prix de Rome, je vous prie.

Si l'on veut bien accepter pour un instant le "certificat de hautes études", donné sur l'ensemble des études, et qui prouverait que l'on connaît toute la musique et toutes ses formes, qu'on envoie les jeunes titulaires à travers l'Europe, qu'ils se choisissent un maître ou, s'ils le peuvent rencontrer, un brave homme qui leur apprenne que l'Art n'est pas nécessairement borné aux monuments subventionnés par l'Etat ; qu'il faut l'aimer à travers toutes les visions, toutes les misères, et ne jamais compter sur lui pour se faire une "situation". Tâchons donc de reprendre ces belles traditions de jadis qui virent les artistes fiers de leur maître et susceptibles de dévouement entre eux, car s'ils luttaient pour l'Art, c'était sans la férocité qui caractérise les temps modernes.

Pourtant on ne peut se rappeler sans émotion le paysage adorable que dessinent les arbres de la Villa Médicis et que prolonge la douceur violette des montagnes ombriennes. L'architecture de la "Loggia" aux lignes de marbre si purement décoratives peut aussi faire rêver indéfiniment. Il me semble qu'à peu de frais on pouvait édifier dans ce cadre, une de ces universités qui sont l'orgueil d'Oxford ; il n'aurait pas été inutile non plus de s'en assimiler les conditions matérielles ; ces dernières, a la Villa Médicis, sont médiocres à tout point de vue et ne donnent aucune fierté d'être Français. Pourtant ce cadre serait peut-être plus beau qu'Oxford et contiendrait autant de Passé somptueux... Cette Villa Médicis qui domine Rome de toute sa hautaine beauté, n'aurait-elle pas dû être un centre d'intellectualité vibrante de tous les arts qu'elle contient, où l'on serait venu avec une joie confiante. Malheureusement elle n'est pour beaucoup qu'un endroit où l'on vient faire "son temps..." Là, "les exercices" sont remplacés par "des envois" dont la qualité ne prouve pas absolument qu'on y travaille beaucoup.

Conclusion mélancolique qui tend à prouver mieux que toute critique l'inutilité du Prix de Rome, au moins pour accomplir les destinées d'art par lesquelles se vérifie la beauté d'une époque.

CLAUDE DEBUSSY (1903)



Charles-René
Charles-René, vers 1896
( gravure de P. Tichon, coll. Bnf ) DR
CHARLES-RENÉ ( 1863 - 1935 )

« Mon maître, Charles-René, me faisait faire des exercices de composition alors que je n’avais encore que seize à dix-sept ans... », rappelait Maurice Ravel dans ses souvenirs d’enfant écrits quelque temps avant sa mort. C’est en effet ce lauréat du Prix de Rome qui lui enseigna en tout premier l’harmonie, le contrepoint et la composition à partir de 1887, avant qu’il n’intègre le Conservatoire de Paris deux ans plus tard. C’est lui, disciple de Léo Delibes et excellent pédagogue, qui donna au futur compositeur de la Rhapsodie espagnole ses solides bases de l’écriture musicale avec ce raffinement harmonique qui caractérise l’œuvre de Ravel. Il avait pour habitude de demander à ses élèves des essais de composition libre ayant pour effet d’exciter leur imagination. Les premiers ouvrages de Ravel datent de cette époque, notamment un premier mouvement de Sonate dans lequel Charles-René remarquait immédiatement les dons évidents de son auteur, élève studieux et assidu, et poussait alors son père à inscrire son jeune fils au Conservatoire. C’est certainement le seul titre de gloire dont peut s’enorgueillir notre pianiste-compositeur qui a préféré mettre son talent au service de l’enseignement aux dépens d’une carrière de compositeur pour laquelle il avait pourtant d’évidentes dispositions !

Né le 6 mai 1863 à Paris, Charles Olivier René Bibard dit René est issu d'une famille d'artistes dramatiques itinérants connue depuis le XVIIIe siècle et ayant pris pour nom d'artistes celui de René : le bisaïeul Charles René Bibard (c.1780-1850, Rouen) et son épouse Marie Creton sont à Nîmes en 1800, puis à Marseille ; le grand-père Charles Bonaventure Bibard (1802, Marseille-1859) et sa femme Sophie Absil, sont dans les années 1830-1850 en tournées à Angoulême, Calais, Charleville, Châlons-sur-Marne, Dunkerque ; le père, Charles Victor Bibard dit René (1830-1895), âgé de 60 ans, obtient en 1891 une pension de 500 fr. de la Société des artistes, après 43 ans de théâtre, et se retire à Paris pour enseigner la musique. C'est lui qui donne à son fils Charles ses premières notions musicales, avant d'entrer en octobre 1876 au Conservatoire de musique de Paris où il fait toutes ses études. Il a notamment pour professeur Léo Delibes (composition), qui s’évertuait à enseigner à ses élèves sa propre philosophie musicale consistant principalement à mettre la science au service de la sensibilité. Celui-ci avait remplacé Reber en 1881 et comptait bien d’autres éminents disciples à la même époque : Maurice Emmanuel, Camille Erlanger, Richard Mandl et Spiro Samara pour ne citer que les plus connus. A deux reprises Charles-René sera classé juste derrière Debussy au Concours de Rome et lorsque l’on connaît l’influence que ce dernier aura sur l’œuvre de Ravel, il est piquant de voir que notre musicien, condisciple de Debussy au Conservatoire, a été l’un des tout premiers à enseigner le langage musical à Ravel, car s’il est vrai que le premier a révolutionné la musique, c’est le second qui a diffusé, en les intégrant à son propre style, les trouvailles essentielles de son aîné, même s’ils nous paraissent parfois diamétralement opposés ! Elève également de Marmontel pour le piano, Charles-René obtient un Premier prix à l’unanimité lors du concours du 23 juillet 1880 : 15 concurrents étaient en lice avec le final de la Sonate en fa mineur op. 57 de Beethoven, devant un jury présidé par Ambroise Thomas et composé de Théodore Ritter, Stéphen Heller, Louis Lacombe, Auguste Wolff, Ernest Guiraud, Théodore Dubois, Emile Paladilhe et Jules Cohen. Un Premier prix de contrepoint et fugue lui est également décerné en 1882.

Charles-René
Charles-René, vers 1910.
Photo dédicacée par le compositeur
"à mon excellente élève mademoiselle Henriette de Richemont, affectueux souvenir. Charles René. Paris 1914"
( coll. privée Maison-Lebedel ) DR

En juin 1883 Charles-René, tout juste âgé de 20 ans, se présente pour la première fois au Concours de composition musicale de l’Académie des Beaux-Arts. Quatre autres candidats sont aussi retenus pour l’épreuve finale : Claude Debussy, Paul Vidal, Xavier Leroux et Edmond Missa. Le sujet de composition Le Gladiateur, est une scène lyrique d’Emile Moreau, auteur entre autres d’une remarquable pièce Corneille et Richelieu, qui avait obtenu récemment un réel succès au Théâtre-Français. Jouée en premier devant les membres de l’Institut réunis, la cantate de Charles-René « était supérieurement interprétée par Mme Caron, par MM. Talazac et Belhomme, qui tous trois ont rivalisé de talent. C’est de sa plus belle voix que Talazac à dit l’Invocation à Baal, qui nous a paru très réussie. C’est avec un charme infini que Mme Caron a fait valoir la délicieuse phrase : "Sous ton ciel brûlant, au pays des palmes... " C’est de son admirable basse-taille que M. Belhomme a enlevé "Honte sur toi !" L’impression produite par la cantate de M. René était telle qu’elle a nuit à celle de M. Vidal, qui venait immédiatement après... » [Annales du Théâtre et de la Musique, 1883]. Mais les Académiciens ne sont pas totalement convaincus et Charles-René n’obtient cette année qu’un deuxième Second Grand Prix, derrière Claude Debussy (premier Second) et Paul Vidal (Grand Prix), même si l’on remarque « en MM. Debussy et René l’espérance de lauréats dignes de faire honneur à l’Académie des Beaux-Arts et de l’art français. »

L’année suivante, Charles-René concourre à nouveau, avec L’enfant prodigue, une scène lyrique d’Edouard Guinaud. Admis aux côtés d’Edmond Missa, Henry Kaiser, Claude Debussy et Xavier Leroux, sa cantate est chantée en premier par Mme Montalba, MM. Muratet et Belhomme devant l’aréopage académique réuni en ce 28 juin 1884. Celui-ci décerne alors les récompenses suivantes : au premier tour du scrutin, par 22 voix sur 28 votants, le premier Grand Prix à M. Debussy ; après deux tours de scrutin, par 19 voix sur 28, le premier Second Grand Prix à M. René et enfin, par 27 voix sur 28 le deuxième Second à M. Leroux...

A la fin de l'année 1884, Charles-René, à nouveau croise Debussy. Il lui succède en effet au poste de pianiste-accompagnateur de "La Concordia". Cette société chorale d'amateurs, fondée en 1880 par Edmond et Henriette Fuchs, avec pour président d'honneur Charles Gounod et chef Widor, avait pour but "l'étude des chefs-d'œuvre de la musique chorale et l'exécution publique de son répertoire au profit d'œuvres de bienfaisance ou d'utilité publique." Paul Vidal en fut le 1er pianiste-accompagnateur, auquel succède en mars 1883 Debussy, qui en décembre de l'année suivante rejoint l'Italie pour son séjour à la Villa Médicis. Le répertoire interprété était très varié. Par exemple, lors du concert du mardi 19 juin 1886 à la salle Erard, on entendait, entre autres, le 1er acte d'Alceste de Gluck, l'Oratorio de Noël de Saint-Saëns et les Nymphes des bois de Delibes, sous la direction de Widor, l'orgue étant tenu par Gigout et le piano par Charles-René. A celui du 5 avril 1887, dans la chapelle du Palais de Versailles, étaient donnés le Miserere de Gounod, sous la direction de l'auteur, la cantate de L'Ascension, dirigée par Widor, avec pour soli Mmes Henriette Fuchs et Edouard Lalo, MM. Auguez et Baudoin-Bugnet, le Chant du soir de Schumann interprété par Guillaume Rémy, violon-solo des Concerts Colonne et un air de Bach, l'orgue d'accompagnement étant tenu par Emile Renaud et le piano par Charles-René. Une quête était faite au profit de l'œuvre des Enfants délaissés et des Libérés de Seine-et-Oise.

En 1911, une fois encore notre musicien côtoie Debussy : c'est en effet cette année qu'est fondé le "Salon des Musiciens Français" sous les auspices de Massenet, Saint-Saëns, Paladilhe, Théodore Dubois, Fauré et Widor, "dans le but de recevoir et faire entendre à Paris les compositions des musiciens français et de médailler et mentionner les meilleures." Le comité est composé de : Henri Maréchal (président), Gigout, Charles Lefèbvre et Paul Puget (vice-présidents), Maxime Thomas (secrétaire général), Jules Meunier (secrétaire-trésorier), ainsi que d'une trentaine d'autres membres parmi lesquels Bellenot, Dallier, Diémer, Dukas, Reynaldo Hahn, Huré, Lavignac, de la Tombelle, Tournemire, ainsi que Debussy et Charles-René. De nombreuses séances d'auditions furent organisées. Au moment de sa disparition, Charles-René était alors l'un des vice-présidents.

Invitation, audition à l'Institut Rudy, 1914
Programme concert de piano des élèves de Charles-René, le 7 juillet 1914 à l'Institut Rudy
( coll. privée Maison-Lebedel ) DR
CD : Deuxième messe de Charles-René Charles-René : SECOND MASS A-flat major (1905)
The MIT Women's Chorale, direction : Kevin Galiè
Anna Ward (soprano), Stéphanie Scarcella (mezzo-soprano), Susan DeSelms (orgue)
Kyrie, Gloria (Fichier MP3 extrait), Credo (Fichier MP3 extrait), Sanctus, Panis Angelicus, Agnus Dei
Gabriel Pierné, Cantilène, op. 29, n° 2 et Prélude, op. 29, n° 1
Gabriel Fauré, Maria, Mater gratiae, op. 47, n° 2
César Franck, Alleluia (1871)

Enregistré en 2012 à l'United Paris Church de Brookline (Massachusetts)
1 CD, renseignements : http://web.mit.edu/womensleague/womenschorale/
vente : http://www.cdbaby.com/cd/mitwomenschorale


Mme Dubois-Nicolo, élève de Charles-René.
Mme Dubois-Nicolo, vers 1896
( Coll. D.H.M. ) DR

Henriette de Richemont (coll. privée Maison-Lebedel)
Henriette de Richemont
( coll. privée Maison-Lebedel ) DR

Si comme nous l’avons dit Charles-René s’est principalement consacré à l’enseignement du piano et de l’écriture musicale à Paris, notamment à l'Institut Rudy de la rue Caumartin (transféré avenue d'Antin), il a néanmoins composé quelques ouvrages de bonne tenue, dans la lignée de son Maître où transparaissent à la fois clarté et élégance. Parmi eux notons plusieurs suites de pièces pour piano : Esquisses poétiques, Veillée de décembre, Le voyageur, Caprice romantique, Trois valses-caprices (à 4 mains) ; de la musique de chambre : Sonate pour piano et violon, Strophes pour cor et piano ; de la musique instrumentale : Fantaisie de concert pour violon et orchestre, Deux pièces pour violoncelle et orchestre, Reflets du Nord, suite d’orchestre, ainsi que de nombreuses mélodies, des scènes lyriques et de la musique religieuse, parmi laquelle on relève une Première Messe en sol à cinq parties et à deux chœurs avec accompagnement d'orchestre ou orgue (ou piano), une Deuxième Messe en la bémol à deux parties avec accompagnement d'orchestre ou orgue (ou piano), des motets : O Salutaris hostia, Tantum ergo, Ave verum, Adoro te devote, Panis Angelicus et Inviolata, oeuvres éditées chez Adrien Sporck puis Lemoine, et un cantique de Première Communion Souviens-toi! pour chant avec accompagnement de violon et orgue (sur une poésie de Mlle L. Boulet).

En tant que pédagogue, on lui doit également une importante série de pièces de concours pour piano, toutes éditées chez Lemoine :

* Solo de concours d’après le Largo de la Sonate en ut mineur et la Fugue en ut majeur de W. Friedmann Bach (1932)
* Solo de concours d’après L’Air varié en si bémol de J.B. Cramer (1932)
* Solo de concours d’après l’Allegretto de la 7ee Symphonie de Beethoven (1932)
* Solo de concours d’après l’Allegretto de la Suite en sol de G.F. Haendel, et le cinquième Nocturne de F. Chopin (1932)
* Solo de concours d’après le deuxième Concerto en fa mineur, op. 21, de Fr. Chopin (1932)
* Solo de concours d’après la Gavotte variée de G.F. Haendel (1932)
* Solo de concours d’après le 21e Prélude du Clavecin bien tempéré (cahier n° 1) de J.S. Bach, et l’Andante du 1er Concerto de F. Mendelssohn-Bartholdy (1932)
* Solo de concours d’après La Victoire de Duphly, et Un Sospiro de F. Liszt (1934)
* Solo de concours d’après la Fantaisie, op.16, n° 1, de F. Mendelssohn-Bartholdy (1934)
* Solo de concours d’après le Troisième Scherzo, op. 39, de Fr. Chopin (1934)
* Solo de concours d’après Fantaisie et Sonate en ut mineur de W.A. Mozart (1934)
* Solo de concours d’après le Quatrième Concerto en mi bémol de D. Steibelt (1934)
* Solo de concours d’après un Prélude de Purcell et La Joyeuse de J.-Ph. Rameau (1934)
* Solo de concours d’après Gavotte et Musette en sol de J.S. Bach (1935)
* Solo de concours d’après le Deuxième Scherzo, op. 31, de Fr. Chopin (1935)
* Solo de concours d’après le Final de la Sonatine en sol, op. 55, n° 2 de Fr. Kuhlau (1935)
* Solo de concours d’après le Premier mouvement de la Sonatine en si bémol, op. 41, n° 2, de D. Steibelt (1935)

Parmi ses élèves, notons plus particulièrement Mlle Suzanne Dubois-Nicolo. Petite-fille du célèbre compositeur Nicolas Isouard, dit Nicolo de Malte (1775-1818), elle avait commencé à étudier le violon auprès de Marie Tayau, mais préféra se livrer ensuite à l'étude du chant. Devenue une artiste lyrique réputée qui se produisait dans les salons parisiens, elle excellait dans le répertoire des mélodies, au sein duquel figuraient en bonne place des morceaux de son Maître Charles-René : Nocturne, la Fiancée, En route. Officier d'académie, harmoniste distinguée, elle enseignait aussi le chant dans le même établissement que son ancien professeur (Institut Rudy). Une autre de ses élèves à l'Institut Rudy, Henriette de Richemont (Limoges, 1897 - Oran, 1947), après avoir enseigné le piano dans les années vingt à Limoges (Haute-Vienne), d'où elle était originaire, s'installa en Algérie, aux côtés du chef d'orchestre limougeaud Paul Maison (Limoges, 1879 – Oran, 1933). C'est ainsi qu'au cours des années trente on la trouve à Hammam-Bou-Hadjar donnant des cours de solfège et de piano.

Signature de Charles-René
Signature autographe de Charles-René, 1895
DR

Décédé en septembre 1935, Charles-René laissait une veuve, Marie Laglaize, épousée le 25 février 1899. Née à Paris le 21 septembre 1863, seconde fille de l'ancien ténor devenu professeur de chant et homme de lettres Jean-Baptiste Laglaize (né en 1826), auteur notamment de Fantoches d'opéra (Paris, Tresse, 1881) et de Figurines dramatiques, portraits d'acteurs et d'actrices (Paris, Tresse, 1882), elle était ancienne élève du Conservatoire de Paris (1ère médaille de piano préparatoire 1880). Professeur de piano, elle avait épousé en premières noces, en 1890, Etienne Monselet, dessinateur, dont elle divorçait au bout de quelques années de mariage. C'était le fils cadet de l'homme de lettres et publiciste nantais Charles Monselet (1825-1888), installé à Paris en 1846, et frère d'André Monselet, littérateur.

Charles-René était aussi un neveu par alliance du musicien Adolphe de Groot (1820-1896), Hollandais d'origine établi à Paris dans sa jeunesse. Chef d'orchestre au Théâtre de la Porte-Saint-Martin, puis à celui du Châtelet, de Groot collabora avec Adolphe Adam pour la musique du drame lyrique la Fandondaine, dont "le succès fut éclatant". On lui doit également plusieurs autres œuvres pour le théâtre, ainsi que des cantates, des romances et de la musique de chambre.

Denis HAVARD DE LA MONTAGNE


Hommage posthume d'un ancien élève de Charles-René, professeur de contrepoint


Nous sommes plusieurs à lui garder une affectueuse et profonde gratitude. Je voudrais pouvoir parler au nom des anciens élèves de Léo Delibes, auprès de qui Charles-René, assistant du Maître, était chargé de l'instruction "contrapontique". Mais ne suis-je pas, hélas ! le dernier survivant de la classe ? L'auteur de Sylvia, de Coppelia, du Roi l'a dit, musicien charmant, — et dont l'enseignement, reflet de ces sveltes partitions, était, en ce qui concerne la science de l'orchestre, fort remarquable — s'en remettait à son meilleur "fuguiste", du soin d'initier les nouveaux venus aux arcanes de l'art. Non que Delibes ne possédât la technique sévère qu'un membre de l'Institut ne peut ignorer, mais il n'avait pas la patience de franchir, avec les élèves, tous les stades de leur éducation musicale. D'ailleurs on a, depuis, créé des classes spéciales de contrepoint et réservé au professeur de composition les leçons de large envergure où l'on applique, avec l'indépendance nécessaire, les rigoureuses notions, antérieurement acquises.

 

Charles-René s'acquittait avec zèle de son rôle. Il avait le don de l'enseignement : la simplicité, la clarté, la patience, et j'ajoute la bonté. Tous ceux qui ont bénéficié de son savoir et que sa cordialité a encouragés, pourraient témoigner des hautes qualités d'un tel professeur. Quelques mois avant la mort prématurée de notre camarade Erlanger, j'ai retrouvé chez lui Charles-René, à qui l'auteur du Juif Polonais témoignait fidèle reconnaissance. Et Maurice Ravel ne me démentira pas si je rappelle qu'il a eu pour introducteur à la technique musicale, avant de devenir l'élève de Gabriel Fauré, l'excellent musicien qui vient de disparaître. La modestie de Charles-René, son horreur de la réclame, lui ont valu un effacement dont il s'étonnait qu'on voulût parfois le tirer. Il lui suffisait d'avoir semé pour ressentir un contentement intime dont il faisait sa récompense. Mais ceux qu'il a aidés, qu'il a "armés", lui doivent de dire et son mérite et ses bienfaits

 

Maurice Emmanuel

(Le Monde musical, octobre 1935)


Fichier MP3 Charles-René, Extase, mélodie, en fa pour contralto et piano (n°1), poésie d'Edouard Guinand
(Paris, E. Gallet, éditeur rue de Vivienne/coll. BnF-Gallica)
Fichier audio par Max Méreaux avec transcription pour clarinette et piano (DR.)

Fichier MP3 Charles-René, Prélude, pour piano. Partition dédicacée "A mesdemoiselles Jeanne et Alice Colin", toutes deux filles de l'éditeur.
(Paris, Armand Colin, éditeur) DR.
Fichier audio par Max Méreaux (DR.)


1885

Xavier LEROUX (1863-1919)

Xavier Leroux (1863-1919),
Grand Prix de Rome 1885,
professeur d'harmonie
au Conservatoire de Paris
( photo Benque )
Signature de Xavier Leroux, 1902
Xavier Leroux : Lecture à vue
Xavier Leroux, Morceau de lecture à première vue pour piano, imposé aux élèves hommes au concours 1905 du Conservatoire national de musique de Paris
Musica, n° 36, supplément, septembre 1905, coll. Max Méreaux ) DR
Fichier MP3 Numérisation et fichier MP3 par Max Méreaux (DR)

Château de Compiègne, 1885, les 6 candidats au Prix de Rome : de gauche à droite, assis : André Gedalge (Mention), Edmond Missa, Augustin Savard (Second Prix) ; au second plan, debout : le surveillant Lescaut, Xavier Leroux (1er Grand Prix), Frédéric Le Rey, Henri Kaiser
( photo Aaron Gerschel, coll. BNF/Gallica )


1886

Augustin Savard, Prix de Rome en 1886
( photo Femina, vers 1909 )
Augustin SAVARD (1861-1942)

Augustin Savard (1814-1881), père du Prix de Rome, vers 1860
( photo Pierre Petit, BNF )

Fils d'Augustin (1814-1881), professeur de solfège, puis d'harmonie et d'accompagnement pratique au CNSM et auteur d'ouvrages pédagogiques, Augustin Savard est né le 15 mai 1861 à Paris. Il fit ses études musicales au Conservatoire de Paris auprès de Massenet, Taudou et Durand et remporta le Premier Grand Prix de Rome en 1886 avec sa cantate La Vision de Saul, après avoir obtenu un Second Grand Prix l'année précédente. Chef d'orchestre à l'Opéra de Paris en 1892 et 1893 lors de son retour de Rome, il prit ensuite la direction du Conservatoire de Lyon à partir de 1902, dont il se retirait en 1921. Il est décédé à Lyon le 6 décembre 1942. On lui doit notamment un drame lyrique : La Forêt (Opéra de Paris, 1910), un Poème pour voix et orchestre, de la musique de chambre, une ouverture pour Le Roi Lear et deux symphonies.

D.H.M. (notes provisoires)

Fichier MP3 Augustin Savard, Première mélodie scandinave, pour piano à 4 mains (Paris, Armand Colin, 1893) DR. Fichier audio par Max Méreaux (DR.)

Henri KAISER (1861-1921)

Henri Kaiser
( BNF Richelieu )

Répétiteur de solfège au Conservatoire national supérieur de musique de Paris depuis le 17 février 1891 jusqu'à son décès, Henri-Charles Kaiser, est né le 11 mai 1861 à Nancy (Meurthe et Moselle) du légitime mariage de Maurice Kaiser, négociant, et de Camille Berr. Il avait effectué toutes ses études musicales dans cet établissement à l’époque où Ambroise Thomas en assurait la direction. Elève brillant de Emile Durand (harmonie), Jules Massenet (contrepoint et fugue, composition), Georges Mathias (piano) et César Franck (orgue), il obtenait toute une série de récompenses de haut niveau : 1er prix d’harmonie et contrepoint, partagé avec Debussy (1880), 2ème prix d’harmonie (1881), 2ème prix de piano avec l’interprétation du Rondo-capricioso de Mendelssohn (1883), 2ème prix de contrepoint et fugue (1884) et enfin 1er prix d’orgue (1884) dans la classe de Franck, où il était rentré en 1881.

En 1884 il se présentait pour la première fois au Concours de composition musicale de l’Institut. Le sujet, L’Enfant prodigue, une scène lyrique d’Edouard Guinand ne l’inspira guère, même si l’interprétation de son ouvrage devant l’Académie des Beaux-Arts par Mme Dauriac, MM. Mouliérat et Claverie remporta un certain succès ; d’ailleurs il ne fut pas récompensé. Il faut dire qu’il avait pour concurrent un certain Claude Debussy, alors âgé de 21 ans, qui se présentait d’ailleurs pour la deuxième fois. C’est lui d’ailleurs qui remportait le Grand Prix par 22 voix sur 28. Le concours de l’année suivante, avec la cantate Endymion fut également un échec pour lui. En 1886, il tentait à nouveau sa chance. Le sujet imposé était une scène biblique de Jules Adenis, La vision de Saül ; la presse de l’époque soulignait la médiocrité de cette œuvre littéraire que les candidats eurent grand mal à mettre en musique! Chantée par Melle Mézeray, MM. Vergnet et Manoury, la cantate de Kaiser fit bonne impression aux membres de l’Académie des Beaux-Arts qui lui décernèrent le 26 juin un 1er Second Prix. Désirant ardemment obtenir le Grand Prix, il se présenta pour la quatrième fois au Concours de Rome en 1887, mais échoua. La cantate imposée était Didon et parmi les autres concurrents se trouvait également un autre musicien de grand talent : Gustave Charpentier !

En 1911, ouvrait 15 rue Blanche à Paris, dans les locaux du Théâtre Réjane, une Université française des Beaux-Arts, véritable institut d'art, fondé par Arthur Bloche et dirigé par Mme Paul Marcel. Ouverte à compter du lundi 6 novembre, "les jeunes ayant du talent" pouvaient notamment y suivre des cours de déclamation lyrique et de chant. Plusieurs sommités du monde de l'art apportèrent leur concours, parmi lesquelles : Henri Kaiser, Isidore Philipp, Théophile Laforge, professeurs au Conservatoire; Paul Puget, Georges Papin, Louis Vierne, Ferdinand Motte-Lacroix, Louis Carrier-Belleuse et Mmes Jeanne Delvair de la Comédie-française, Ariane Hugon de l'Opéra, Marguerite Duval, Chaumont, Muriell, Luc-Billet…

Signature autographe d'Henri Kaiser, 1897
Signature autographe, 1897
(DR.)

Henri Kaiser est l'auteur d'une soixantaine d'œuvres touchant tous les genres, parmi lesquelles, pour orchestre (chez Evette) : En forêt (suite), Flowers (fox-trot), Lassitude (tango), la Parisienne (grande valse), Marengo (pas redoublé), ces deux dernières pour orchestre d'harmonie ou fanfare ; musique de chambre (chez Sénart) : Barcarolle et Rêverie pour violoncelle et piano, Extase pour piano, violon et violoncelle ; des pièces pour piano, parues chez Evette, Sénart, Brandus, Quinzard, Poulalion : Caprice-valse (1899), Amoroso (tango), Fugue et choral, Gavotte, Morning Dew (one-step), Rêverie Habanera, Valse d'amour… ; des mélodies : Brunette, paroles d'André Theuriet (Sénart), Chanson d'exil, paroles de François Coppée (Evette), 3 Elégies, paroles de Marceline Desbordes-Valmore (Sénart), Il faut peu de choses, paroles de Thérèse Delore (Sénart), Invocation, paroles de François Coppée (Sénart), Juillet, paroles d'Edouard Guinand (Sénart), Prière, paroles de Jeanne Carry (Evette), Souvenir de Mignonne, paroles d'Eugène Leclerc (Naus), To be or not to be, paroles de Thérèse Delore (Evette), Vieux rondel, paroles d'Henri Maillard (Evette)…; des chœurs a cappella : Dans les Abruzzes, La Forêt incendiée, Les voix de printemps et une petite scène chorale pour 4 voix d'hommes sur des paroles d'Henri Renier : Les Conjurés (1911).On lui connaît également une réduction pour piano seul des Souvenirs des Scènes alsaciennes de Massenet (Heugel) et des arrangements (révision et annotations), avec Edouard Nadaud, des Sonates 13, 21, 23 et 25 de Tartini (Salabert, 1920 ).

Officier d'Académie (31 juillet 1897), Henri Kaiser est mort à l'âge de 59 ans, en mars 1921 à Paris, où il résidait 13 rue Léon Cogniet. Il avait épousé dans la capitale, le 8 novembre 1897, (cérémonie religieuse célébrée le lendemain à la Synagogue de la rue Buffault) Jeanne-Mathilde Brandeis, née le 8 février 1862 à Paris, fille de Samuel Brandeis, professeur d'allemand, et de Thérèse Nathan.

D.H.M.

Fichier MP3 Henri Kaiser, Extase, pour violon, violoncelle et piano, dédicacée “A Mesdemoiselles RADISSE” [Madeleine, violoniste - Lucienne, violoncelliste - Nathalie, pianiste] (Paris, Editions Maurice Sénart). Fichier audio par Max Méreaux (DR.)


André GEDALGE (1856-1926)

André Gedalge, cl. Bibliothèque Nationale
André GEDALGE (1856-1926),
Grand Prix de Rome 1886,
professeur de fugue et de contrepoint au Conservatoire de Paris
(Bibliothèque Nationale)

André GEDALGE [souvent improprement accentué en GÉDALGE] étudia tard la musique puisque ce n'est qu'en 1885, à l'âge de 28 ans, après avoir été libraire, qu'il entra au CNSM de Paris dans la classe de Guiraud. Il obtint une mention au Concours de Rome en 1885 et l'année suivante un Second Grand Prix de Rome. Tout d'abord répétiteur des classes de Guiraud et de Massenet il fut ensuite nommé professeur de contrepoint et de fugue en 1905. Il a formé des compositeurs illustres tels que Maurice Ravel, Florent Schmitt, Charles Kœchlin, Arthur Honegger, Georges Enesco, Jacques Ibert, Darius Milhaud, Roger-Ducasse, Raoul Laparra, André Bloch et Henri Rabaud. En dehors de son Traité de la fugue, publié en 1904, qui continue de faire autorité, il a également écrit d'autres ouvrages pédagogiques tel ce livre consacré à L'enseignement de la musique par l'éducation méthodique de l'oreille (1922). Dans le domaine de la composition on lui doit une pantomime, Le petit Savoyard (1891), un opéra Pris au piège (1894) interprété à Paris en 1895, 4 symphonies, des concertos, de la musique de chambre et des mélodies.

(Denis Havard de la Montagne)

Consultez également divers articles détaillés et illustrations sur une page spécifique.

En anglaisAndré Gedalge (often wrongly written with é ) studied music late since it was in 1885 at the age of 28, after having been a bookseller that he joined the CNSM of Paris in Giraud's grade. He obtained a distinction at the "Concours de Rome" in 1885 and the year after the "Second Prix de Rome". First a chorus master of Guiraud and Massenet's grade, he was promoted to the rank of teacher of counterpoint and fugue in 1905. He taught famous composers such as Maurice Ravel, Florent Schmitt, Charles Koechlin, Arthur Honneger, Georges Enesco, Jacques Ibert, Darius Milhaud, Roger-Ducasse, Raoul Laparra, André Bloch and Henri Rabaud. Beside his Traité de la fugue, published in 1904, which is still well known, he also wrote other educational work such as the book dedicated to L'enseignement de la musique par l'éducation méthodique de l'oreille (1922). In this category of composition we owe him a pantomime Le Petit Savoyard (1891), an opera Pris au piège (1894) given in Paris in 1895, four symphonies, concertos, chamber music and melodies.

Traduction : Fabienne Baillot

Remarquez l'absence d'accent au nom GEDALGE
André GEDALGE
dans un moment de loisirs
( photo X..., 1902 )
Livret de solfège à l'usage des élèves, 2e Livret, Paris, Librairie Gedalge, 75 rue des Saints-Pères, 1922
( coll. D.H.M. )
vers 1911 - André GEDALGE dans son "cabinet-refuge" du jardin de sa maison de Chessy (Seine-et-Marne)
(coll. A. Gedalge)

Classe de contrepoint de Gedalge au CNSM, 1924
CNSMP, février 1924, classe de contrepoint et fugue d'André Gedalge : Alice Pelliot (assise à ses côtés) et parmi les élèves: le Canadien Claude Champagne (5ème à partir de la droite).
( photo Ed. Ribaud, collection Bnf/Gallica )

Signature d'André Gedalge, 1902


André Gedalge, CD (Polymnie) Paru en 2006 :

André Gedalge, pièces instrumentales et mélodies
Geneviève Laurenceau (violon), Lorène de Ratuld (piano)
Mario Hacquard (baryton), Claude Collet (piano)
Antoine Curé (trompette), Benny Sluchin (trombone)

Fichier MP3 2e Sonate pour violon et piano, op. 19 (1900)
Écoutez un extrait : fin du 1er mouvement
Morceau de concours de trompette (1910)
Pièce pour trombone et piano (1895)
Mélodies pour baryton et piano (1898 à 1909) : Vaux de Vire et Chansons normandes, La Chanson du pêcheur, Dans la forêt, Dans les ruines d'une abbaye, Chansons sur des poèmes de Robert Burns, La Belle Fille.

1 CD POLYMNIE (POL210340), enregistré en 2006
49 bis route de Maisons Blanches, 10800 Buchères
tél : 03 25 41 84 90 – www.polymnie.net


CD Alexandre et Jean-Jacques Kantorow Paru en 2014
« Chevillard, Fauré & Gedalge, Sonates françaises »

par Alexandre (piano) et Jean-Jacques Kantorow (violon)
Camille Chevillard , Sonate en sol mineur, op. 8
Gabriel Fauré, Sonate en la majeur, n° 1, op. 13
André Gedalge, Sonate en sol majeur, n° 1, op. 12

1 CD NoMadMusic (NMM001)
www.nomadmusic.fr



1887

Gustave CHARPENTIER (1860-1956)

Gustave Charpentier (1860-1956),
Grand Prix de Rome 1887, compositeur,
fondateur de L'oeuvre de Mimi Pinson
( photo Cautin et Berger )

Gustave Charpentier, qui vient de mourir à Paris à l'âge de 96 ans, représente un véritable cas dans les annales de la musique : celui d’avoir établi sa réputation sur une seule œuvre : Louise

 

La biographie de G. Charpentier est simple. Né le 25 juin 1860 à Dieuze, en Lorraine, où son père était boulanger, le futur musicien fut, à l'âge de 15 ans, placé comme comptable dans une filature de Tourcoing. Comme il aimait la musique, il avait appris le violon et en jouait à. ses heures de loisir. Sans doute maniait-il son instrument avec quelque talent car son patron l'ayant entendu lui donna la possibilité de suivre des cours au Conservatoire. G. Charpentier alla se perfectionner à Paris ; il travailla avec Pessard et Massenet, se présenta au Concours de Rome et, en 1887, remportait le Premier Grand-Prix.

Séjour dans la capitale italienne... Promenades dans la campagne de Rome... Rêveries au bord des fontaines : ainsi prirent naissance les Impressions d’Italie.

 

Pourtant cette œuvre symphonique devait être la seule réalisation importante que G. Carpentier ait laissée pour le concert. Qui connaît en effet aujourd’hui sa Symphonie-drame La Vie du Poète, ses œuvres pour voix et orchestre Didon, Sérénade à Watteau, Impressions fausses, Poèmes chantés et ses mélodies sur Les Fleurs du Mal ?...

 

G. Charpentier était attiré par le théâtre ; il aimait le peuple et s'intéressait à la vie des humbles : « Ma seule ambition, dira-t-il, est de traduire amicalement les mille émotions que nous donnent les milieux contemporains ». Lorsqu’il habitait Tourcoing, il avait organisé un groupement symphonique et une société de sérénades ; à Paris, il créa, en 1900, l’œuvre de Mimi-Pinson puis instaura des cours gratuits de musique et de danse qui devinrent le Conservatoire populaire de Mimi-Pinson. Musicien du peuple, c’est dans la rue que G. Charpentier fit ses débuts de chef d'orchestre en donnant la Sérénade à Watteau dans les jardins du Luxembourg, en novembre 1896. Enfin, dans son drame musical, Louise,

G. Charpentier allait mettre tout son amour pour le peuple de Paris, symbolisé par la midinette et l’ouvrier.

 

Cette Louise, dont il écrivit le livret et la musique, connut au début du siècle un succès foudroyant. Créée à Paris en février 1900 sous la direction d'André Messager, l’œuvre (à qui certains avaient prédit un échec, et qui, dès 1901, atteignait sa 50e représentation à l'Opéra- Comique) allait être jouée dans un laps de temps record, dans 90 villes de la province française et plus de 30 pays d'Europe, d’Amérique et d’Asie. Louise était représentée successivement en Hongrie, Belgique, Tunisie, Allemagne, Suisse, Tchécoslovaquie, Hollande. Espagne, Pologne, Egypte, Maroc, Argentine, Angleterre, Italie... Elle était acclamée du Canada à l’Amérique du Sud, de la Norvège à l'Indochine. Et il n’est pas sans intérêt de rappeler que des chanteurs et cantatrices parmi les plus notoires du moment en assumèrent les principaux rôles : ainsi Fugère, Marié de Lisle, Mary Garden, Vanni-Marcoux. En 1939, Grâce Moore participait à la 100e représentation de Louise au Metropolitan Opéra de New-York. En 1950, Gustave Charpentier, âgé de 90 ans, dirigeait le Couronnement de la Muse, au cours de la représentation de Louise, dont on fêtait le cinquantenaire.

 

Gustave Charpentier, le compositeur de Louise : ce titre est incontestablement justifié puisque seule, dans la production lyrique du musicien, cette œuvre triompha tandis que Julien, qui lui succéda, précédant l’Amour du Faubourg, dernière partie du triptyque, ne possède qu'un intérêt mineur ainsi qu'il advient souvent avec ces romans à suite dans lesquels l’imagination de l’écrivain s’épuise dès le premier volume. Quant à savoir si, un jour, ce drame musical retrouvera une partie de son succès d’antan ?... L’avenir seul l’apprendra. Mais par son caractère sentimental, par un style aux confins du vérisme italien et du drame à leit motiv, la partition de Louise n’en reste pas moins représentative d’une époque — le goût de cette époque dût-il à jamais demeurer périmé.

Claude Chamfray

 

 

Quelques témoignages de musiciens…

 

En février 1947, le quotidien France-Soir publiait dans ses colonnes les Souvenirs de Grace Moore, morte le 26 janvier de cette même année dans un accident d’avion, quelques jours avant celui où les musiciens d’Ars Rediviva trouvèrent aussi la mort au Portugal. Née en 1898 à Slabtown (Tennessee), Grace Moore, actrice de cinéma, chanteuse, qui venait de donner une série de concerts à Copenhague, prenait l’avion à l’aéroport de Kastrup, près de Copenhague, à bord d’un Dakota de la compagnie hollandaise K.L.M. Mais, peu après son décollage à 14h30, ayant atteint l’altitude de 50 mètres l’avion piqua brusquement du nez, s’écrasa au sol et prit feu : les 22 passagers périrent carbonisés. Parmi eux, figuraient notamment le prince Gustave Adolphe de Suède (né en 1906) et l’accompagnateur de Grace Moore, le pianiste français Jean-Loup Peltier, âgé de 23 ans. Celui-ci, 1er prix de piano en 1945 dans la classe de Jean Doyen et 1er prix d’histoire de la musique avait déjà entamé une brillante carrière (pianiste, musicographe, conférencier) …




En 1939, le cinéaste français Abel Gance réalisa le film Louise, adaptation de l’opéra de Gustave Charpentier, avec un scénario de Roland Dorgelès et dans lequel Grace Moore tenait le rôle éponyme, aux côtés de Georges Thill (rôle de Julien, compositeur montmartrois, amoureux de Louise) et d’une pléiade d’acteurs célèbres de l’époque. - (DHM - DR.)

Emmanuel Bondeville, directeur de l’Opéra

 

L’un des traits dominants de Gustave Charpentier, de l’homme et de l’artiste, c’est la fidélité.

 

Son cas est, incontestablement, l’un des plus étonnants de l’histoire de la Musique. Une œuvre au concert, une œuvre au théâtre, ont assuré sa gloire. Dans un temps où les sensibilités se cherchent tant que, souvent, elles ne s’expriment jamais, c’est évidemment un exemple stupéfiant.

 

A trente ans, il avait trouvé le sujet qui correspondait à ses aspirations. Mieux, il le vivait. Ainsi s’explique sa puissance d’expression. Les Impressions d’Italie, Louise, ont le privilège d’ignorer les détours et d’aller droit au but.

 

Jusqu’au terme de sa longue vie, Gustave Charpentier, est demeuré fidèle au Boulevard Rochechouart. S’il a incarné des sentiments trop extériorisés pour nos âmes fortes, — mais avons-nous gagné à ne plus invoquer Paris du haut de la Butte et à préférer les caves de la rive gauche ? — il garde cette puissance entraînante de l’âme populaire que nul n’a reflété comme lui : dans le prélude Paris s’éveille, dans la montée de la foule vers Montmartre, dans la lutte entre l’appel irrésistible de la grande ville et la bonté révoltée du père du dernier acte de Louise, dernier acte qui est l’une des grandes pages du Théâtre Lyrique.

 

A cette fidélité à l’âme populaire, s’ajoutait une fidélité aussi profonde envers celui qui l’avait guidé : Massenet. Il vantait sa largeur de vues, — louée par tous ses élèves — sa finesse pour discerner le talent de chacun. Il m’a conté lui-même l’anecdote suivante : un jour, sortant du Conservatoire, Massenet et ses élèves discutaient des mérites des candidats au Prix de composition.

 

« Et Debussy ? » demanda l’un d’eux.

« Celui-là, c’est l’énigme ! », répondit Massenet.

 

Il est difficile d’affirmer que nous connaissons l’œuvre complète de Gustave Charpentier. Il me dit un jour qu’il avait écrit une seconde suite d’orchestre. J’étais alors Directeur des émissions de la Radiodiffusion.

 

« Donnez-la-moi, lui dis-je, elle sera jouée sans délai ! »

« Non », me répondit-il.

« Pourquoi ? »

« Par orgueil ! J’ai réussi la première, j’aurais peur que la seconde fût moins bien accueillie ! »

 

En toute occasion, il rappelait les mérites d’Alfred Bruneau : « Ne l’oubliez pas, me disait-il. C’est lui qui a ouvert le chemin ».

 

La sincérité de Gustave Charpentier explique aussi la force expressive de ses meilleures pages. Il est le témoin d’un temps où il fallait de l’audace pour clamer : « Tout être a le droit d’être libre ! » Aujourd’hui, la liberté est si courante, qu’on en ignore parfois le prix !

 

Mais tant qu’un cœur battra dans la poitrine des humains, et que les faits divers demeureront ce qu’ils sont, les chants des humbles, au carrefour de la Butte, les espoirs des cousettes dans l’atelier, les tournoiements de la valse lointaine et de la berceuse du Père, garderont leurs vertus qu’un musicien français sut aimer et traduire quand le siècle naissait.

 

Albert Wolff, chef d’orchestre à l’Opéra

 

Fondateur de leur syndicat, dont il était Président Honoraire, Gustave Charpentier aimait beaucoup les musiciens. Ceux-ci d’ailleurs le lui rendaient bien, et l’on ne trouvera pas de meilleure preuve que la réception qu’ils lui offrirent à l’Opéra-Comique au lendemain de son élection à l’Institut. Ce jour-là. Charpentier était tellement ému qu’il ne put, au moment de son discours, prononcer la moindre parole... Alors il fit venir, pour en tenir lieu, un apéritif monstre hâtivement préparé par Monrosty, le sympathique patron du sympathique café d’en face.

 

Pour ma part, j’ai commencé de connaître et d’apprécier Gustave Charpentier alors que je faisais travailler, en tant que chef de chant, le rôle de Louise à Berthe Lamare, en 1908... Charpentier venait sans cesse assister aux leçons et aux répétitions de son œuvre.

 

Il m’indiquait affectueusement ses mouvements, ses intentions, et l’atmosphère dont il désirait voir sa Louise entourée. Je me suis efforcé, au cours des 116 représentations de Louise que j’ai dirigées salle Favart, de toujours respecter ses directives.

 

Son Julien, que j’ai créé en 1913, était un ouvrage fort émouvant et de très belle tenue. J’ai toujours regretté qu’on l’ait retiré de l’affiche en plein succès, surtout que l’on ne l’ait jamais repris.

 

Louise, elle, a connu une carrière pratiquement ininterrompue, et chacune de ses reprises fut toujours entourée des plus grands soins. C’est que Louise, c’est Paris, le Paris des humbles, des sincères, des jeunes. C’est toute l’âme de Gustave Charpentier surtout, celle qui fonda et anima cet extraordinaire Conservatoire de Mimi Pinson.

 

Je souhaite de tout cœur que Louise prolonge longtemps encore le souvenir vivant du grand Maître.

 

François Agostini, directeur de l’Opéra-Comique

 

L’émotion causée par la disparition d'un créateur est une chose bien naturelle. Mais il doit être rare d’assister à une peine collective aussi profonde que celle qui a bouleversé l’Opéra-Comique à la mort de Gustave Charpentier. En quelques minutes, le théâtre a pris le deuil.

 

J’ai recueilli moi-même l’expression du chagrin ressenti par tous ceux qui participent à la vie de notre grande scène lyrique ; et de l’ensemble de ces anecdotes, de ces analyses, de ces remarques, de ces regrets, naissaient des portraits précis. Portrait physique d’un mousquetaire à l’œil vif, à la réplique vigoureuse et prompte. Portrait moral d’un homme infiniment bon. Portrait esthétique d’un compositeur sincère, sensible, indépendant.

 

Le bouleversement général était d’autant plus grand que le célèbre couple de Louise et Julien fait partie depuis 56 ans des héroïnes et des héros de l’Opéra-Comique. Le compositeur lui-même a longuement fréquenté ce théâtre. Il en a parcouru les couloirs et les bureaux ; il a travaillé sur la scène avec les artistes ; il a dirigé l’orchestre.

 

Mais il a bien fallu secouer sa tristesse pour préparer l’hommage du théâtre lyrique à Gustave Charpentier. Les dévouements se sont multipliés aussitôt et, durant sept heures, la dépouille mortelle du Maître, exposée dans le péristyle de l’Opéra-Comique, a été veillée successivement par cent soixante-huit artistes et techniciens du théâtre, auxquels se joignirent des représentants du Syndicat des musiciens, quelques membres de l’« Œuvre de Mimi Pinson » et quelques élèves du Conservatoire.

 

La foule parisienne, nombreuse, recueillie, essentiellement féminine, surtout à l’heure où les midinettes quittent les ateliers, a défilé en apportant de touchants bouquets.

 

A l’Eglise de la Madeleine, l’orchestre et les chœurs de l’Opéra-Comique ont apporté leur concours bénévole, sous la direction de M. Jean Fournet, avec la musique de la Garde Républicaine, dirigée par le capitaine Brun.

 

Les funérailles officielles ont été imposantes, comme Gustave Charpentier le méritait, comme le furent celles de tant d’autres hommes illustres. Mais c’est à l’Opéra-Comique en écoutant le personnel, en regardant s’écouler lentement la foule affligée, que j’ai vraiment mesuré la force et la jeunesse du lyrisme de Gustave Charpentier.

 

Gustave Samazeuilh, compositeur, pianiste, musicologue

 

Vous me demandez quelques souvenirs personnels sur Gustave Charpentier, auquel me liait une fidèle amitié, depuis qu’à mon retour d’une longue absence en Allemagne il avait donné, en dernière heure, au jeune musicien inconnu de lui que j’étais, porteur d’un mot d’André Messager, une excellente place dans les hauteurs de l’Opéra-Comique, pour la répétition générale de Louise.

 

Je réponds d’autant plus volontiers à votre appel que les traditionnelles « nécessités de l’horaire » ont obligé la Radio à raccourcir considérablement le texte qui m’avait été demandé par elle pour l’émission donnée le soir même de sa disparition. Ce qui fait que je n’ai pu dire, en citant certains textes appropriés, l'admiration qu’avaient pour Louise Richard Strauss, Romain Rolland, Paul Dukas, que je n’ai pu évoquer une récente conversation avec le maître, toujours extraordinairement vivant, dans son logis du boulevard Rochechouart, plein de manuscrits et de matériels prometteurs, sans parler de ceux qu’il m’a dit être en sûreté dans le coffre d’une grande banque.

 

De ce nombre sont sans doute une Suite symphonique sur Munich, dont je lui ai entendu parler à Hans Knappertsbuch en juin dernier, au moment où le grand chef venait de diriger en Bavière une brillante reprise de Louise avec une mise en scène nouvelle, et un nouvel ouvrage lyrique entièrement esquissé, dont l’action se passe en Italie, et que j’ai vu sur sa table de travail lors d’une visite que je lui fis à Biarritz au début de la dernière guerre, prélude, si j’ose ainsi dire, à un succulent repas improvisé que je n’ai pas oublié. Je pense aussi aux Impressions fausses, triptyque pour chant, choeur et orchestre, sur des poèmes de Verlaine (les Chevaux de bois, la Ronde des Compagnons, la Vallée rouge) donnés aux Concerts Colonne en 1895, tout à fait inconnus aujourd’hui et dont les accents douloureux et menaçants, la saveur populaire et révolutionnaire restent intenses, au bout de soixante ans. Des difficultés de matériel m’ont empêché de le ressusciter l’an dernier au Festival de Vichy, auquel Charpentier, fut au dernier moment, empêché d’assister comme il en avait l’intention. Qui nous les rendra aujourd’hui ? Et quelle grande firme de disques s’honorera en nous donnant enfin, avec la distribution appropriée, l’enregistrement intégral de Louise que tout le monde attend et qui n’a — comme celui d’Ariane et Barbe-Bleue de Paul Dukas — que trop tardé ? Ce ne serait que justice...

 

Je voudrais enfin vous dire en finissant, qu’admirateur de l’œuvre génial de Richard Wagner, Gustave Charpentier lui est toujours resté fidèle et a su en comprendre la véritable leçon d’indépendance, en suivant sa propre nature. Sachons honorer sa mémoire, et lui assurer la place qui doit rester la sienne parmi les plus doués, les plus français, des grands musiciens de son temps.

 

(in Le Guide du concert, 1956)



1888

Camille Erlanger (1863-1919),
Grand Prix de Rome 1888,
compositeur dramatique
( photo Reutlinger )
Camille ERLANGER (1863-1919)

A notre époque de puffisme, de réclame bruyante, de fièvre vaniteuse, il est séduisant de portraicturer un artiste sincère, ami du silence et de la réflexion. Depuis La Bruyère, les brouillons, les abuseurs du Moi, les cogneurs aux vitres, les personnalités, mesquines autant qu'encombrantes, ne sont plus des exceptions. Leur nombre a grandi considérablement, il empiète sur tous les domaines de l'esprit, et la renommée tapageuse a remplacé la gloire tranquille, sûre d'elle-même, et trop fière pour tomber aux tambourinades.

 

Je me réjouis de ce que l'auteur du Fils de l'Etoile, la nouvelle œuvre lyrique applaudie à l'Opéra, préfère la méditation aux démonstrations comédiennes. L'attitude discrète est le signe d'une âme élevée.

 

Le style, c'est l'homme, a dit Buffon. La tenue, c'est l'image de la pensée, ajouterai-je en toute humilité. Oui vraiment, pour qui considère Camille Erlanger, l'étonnement n'est pas possible. La robustesse de son corps, la résolution de son allure, sa façon de parler la tête droite, la pureté de son front, la ligne calme de sa bouche, le franc regard de ses yeux, l'ensemble de son visage empreint d'une austérité quasi-monacale et, jusqu'à la mélancolie de son sourire qui a quelque chose d'indécis, de flottant et d'énigmatique, tout cela, dis-je, exprime l'idée d'une volonté concentrée, maîtresse d'elle-même, bonne inspiratrice du but à atteindre.

 

La science n'est point remuante, et l'inspiration sincère se cantonne sur des sommets.

 

Tel quel, voici donc enfin un compositeur qui ne se réclame d'aucune école, qui n'appartient à aucune chapelle, et qui n'a jamais menti à sa vocation. Né à Paris en 1863, il se sentit, très jeune, musicien de race. Il pouvait grossir le nombre des amateurs ; personne autour de lui ne songeait à le pousser vers les arts ; mais son âme veillait. Jeune homme, il émancipa d'un seul coup son esprit. D'élève pianiste qu'il était, il devint élève d'harmonie, par besoin secret d'obéir à la voix intérieure qui parle haut chez les prédestinés.

 

A l'école de Léo Delibes, il apprit son métier, mais le symphoniste qui sommeillait en lui se garda bien des influences déformatrices du caractère, et l'on peut dire hardiment qu'au sortir du Conservatoire, en 1888, il était déjà quelqu'un ne ressemblant à personne. Certes Wagner l'attirait, mais c'est précisément parce qu'il comprit le maître qu'il ne l'imita point.

 

Sa première œuvre, Velléda, scène lyrique exécutée aux Concerts Colonne en 1889, témoignait déjà d'une déductivité surprenante. Et quand vint Saint-Julien l'Hospitalier, légende dramatique en 7 parties donnée au Conservatoire en 1894, on sentit bien que Camille Erlanger était mûr pour le drame musical. L'homme répugnait aux vaines métaphysiques par quoi tant d'autres essaient d'expliquer leur manque d'observation. Il donna Kermaria, idylle d'Armorique, à l'Opéra-Comique en 1897, et il sut demeurer idyllique dans cette œuvre, sans sacrifier à la passion déplacée. Le Juif Polonais devait consacrer son beau talent nourri d'indépendance. Ce conte populaire d'Alsace qui comportait des éléments d'action, sa science extrêmement étendue le compléta par une sûre amplification des caractères.

 

Et voici qu'aujourd'hui, le Fils de l'Etoile le classe définitivement parmi les rares artistes qui peuvent et savent hausser leurs concepts jusqu'au conflit des races, selon le mot de Jules Bois.

 

Oh! que les méthodistes et les révolutionnaires ne s'y trompent point. Je ne suis pas un thuriféraire à gages et personne n'est là pour me dicter, par dessus l'épaule, une litanie admirative. J'admire et j'aime Camille Erlanger, parce que ma compréhension le trouve admirable comme artiste, sympathique comme homme et logique comme esprit. J'ai toujours raillé la fameuse Inspiration qui serait un mouvement surnaturel. Je crois à la conscience de l'individu, je crois que la méditation amène à son degré supérieur la réalisation des idées, je crois enfin que la technique est aux musiciens, ce qu'est la connaissance des couleurs aux peintres et la richesse des mots aux écrivains.

 

Magicien de l'Idée et du Rythme, M. Camille Erlanger laissera derrière lui une œuvre glorieuse, parce qu'il ne se sera pas inquiété de plaire à un clan, de se faire l'esclave d'une secte, mais parce qu'il aura obéi à sa nature de symphoniste, tout en soumettant ses rêves au contrôle impérieux de la Raison.

 

Martial Ténéo

(in Le Monde artiste, 24 avril 1904)

 

 

NOTE : Camille Erlanger, né le 25 mai 1863 à Paris et y décédé le 24 mai 1919, dont les parents tenaient un commerce de fleurs dans la rue du Caire (Paris IIe), 1er grand prix de Rome en 1888 (devant Paul Dukas), fut en outre nommé en novembre 1895 chef de chœur à la Synagogue des Tournelles (Paris IVe), succédant-là à Moïse Stern lui-même nommé à celle de la rue Nazareth (Paris IIIe). De son mariage avec l’écrivaine et scénariste Irène Hillel-Manoah (1878-1920), célébré en 1902 à Paris, est issu l’historien Philippe Erlanger (1903-1987). Celui-ci, haut fonctionnaire (ministre plénipotentiaire et Inspecteur général au Ministère de l’Education nationale…) et biographe, est à l’origine de la création du Festival de Cannes en 1939 dont il resta président d’honneur jusqu’à son décès.

 

Signature de Camille Erlanger, 1902

Depuis la rédaction en 1904 de la notice de Martial Teneo, pseudonyme du critique musical Jules Decloux (1859-1922), mentionnons la composition des œuvres suivantes :

 

La Glu, drame lyrique d'après le roman de Jean Richepin,

Aphrodite, drame musical en 5 actes et 7 tableaux d'après le roman de Pierre Louÿs, adaptation de Louis de Gramont, créé en mars 1906 à l'Opéra-Comique,

Bacchus triomphant, créé le 11 septembre 1909 à Bordeaux,

L'Aube rouge, pièce lyrique en 4 actes et 5 tableaux, créée le 29 décembre 1911 à Rouen, sur un livret de Arthur Bernède et Paul de Choudens,

Hannele Mattern, rêve lyrique en 5 actes (1911), livret de Jean Thorel et Louis de Gramont d'après le drame Hanneles Himmelfahrt de Gerhart Hauptmann, créé le 28 janvier 1950 à l’Opéra du Rhin de Strasbourg,

La Sorcière, drame en 4 actes et 5 tableaux de A. Sardou, d’après Victorien Sardou, créé à l’Opéra-Comique le 18 décembre 1912,

Le Barbier de Deauville, 1917, opérette en 3 actes sur une nouvelle de Tristan Bernard,

Forfaiture, 1919, comédie musicale en 5 épisodes de Paul Millet et André de Lorde, d’après l’œuvre de Turnbill, créé à l’Opéra-Comique le 11 février 1921.

 

Ajoutons enfin que Camille Erlanger, en dehors des œuvres lyriques citées supra est aussi l’auteur de nombreuses autres musiques instrumentales et vocales exécutées aux concerts symphoniques (Trocadéro, Colonne, Conservatoire…) de Paris, ainsi que dans les villes de province les plus importantes et à l’étranger ; et qu’il enseignait à titre privé l’harmonie, le contrepoint et fugue, la composition et l’instrumentation.

[DHM]


Camille Erlanger à son bureau
(in Le Monde musical, 1904) DR.
Camille Erlanger: Orage de Printemps, manuscrit
Camille Erlanger: Orage de Printemps, page 1Camille Erlanger: Orage de Printemps, page 2Camille Erlanger: Orage de Printemps, page 3Camille Erlanger: Orage de Printemps, page 4

Camille Erlanger, Orage de Printemps, poème de Catulle Mendès.
"Dans cette mélodie inédite de l'auteur d'Aphrodite et du Juif Polonais se retrouve sa personnalité si caractéristique et puissamment évocatrice" [1911].
(Musica, supplément, février 1911, coll. Max Méreaux)
Fichier MP3 Numérisation, corrections et fichier MIDI/WMA par Max Méreaux (DR).

* Plusieurs altérations, oubliées par le graveur, ont été corrigées :
- 2e page, 2e système, 4e mesure au piano, main droite, sur le 2e temps, sol bécarre,
- 3e page, 2e système, 3e mesure au piano, main gauche, sur le 2e temps, fa bécarre,
- 3e page, 3e système, 1e mesure au piano, main gauche, sur le 2e temps, fa bécarre.


Paul Dukas
Paul Dukas (1865-1935)
( Détail d'une photo Ed. Joailler )
On pourra aussi consulter une photo de groupe dans sa classe de composition au conservatoire.
Paul DUKAS (1865-1935)

Article spécifique : Paul Dukas, le père de l'Apprenti-sorcier.


1889

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