Michel Baron - Cours d'harmonie |
Accord de sixte
Désormais, prendre garde de ne pas confondre les termes : basse et fondamentale. L'accord de sixte est le premier renversement de l'accord de trois sons. En d'autres termes, la basse de l'accord de sixte est la tierce du même accord considéré en position fondamentale.
Chiffrage
La seule position à éviter autant que possible, et c'est une règle générale, est de placer une octave entre les deux voix intermédiaires alors que la basse et le ténor seraient à une distance plus grande que la tierce (exemple de droite).
Un complément au chiffrage : le trait
Lorsque plusieurs temps consécutifs sont harmonisés par la même fonction harmonique (c'est à dire le même accord, les mêmes notes) mais avec des changements de position ou de renversement, on a coutume de ne chiffrer qu'une seule fois et de sous-entendre les chiffrages des autres temps par un trait. L'avantage est qu'on peut repérer d'un coup d'œil qu'il n'y a qu'une seule harmonie pendant toute la durée du trait. Par conséquent :
Pendant la durée du trait, ce sont les notes représentées par le chiffrage qui continuent d'être utilisées. Seule leur position (disposition des voix, choix des doublures) peut être modifiée au besoin. L'éventuel changement de renversement, lui, est déterminé par l'éventuel mouvement de la basse :
Pendant la durée d'un accord, si la basse reste en place pendant le trait, le renversement est inchangé.
Pendant l'accord, si la basse monte ou descend par tierce pendant le trait, l'accord change de renversement.
Emploi de l'accord de sixte
L'accord de sixte a la même signification harmonique que l'accord correspondant en position fondamentale (une tierce plus bas). Cependant, son caractère est moins affirmatif.
Doublure de la basse à éviter
On ne supprime pas de note dans l'accord de sixte et de manière habituelle on évite de doubler la basse, ce qui la renforcerait exagérément et créerait une lourdeur (c'est après tout la tierce de l'accord parfait).
Par contre, on peut tolérer cette doublure occasionnellement au cours d'un changement de position ou d'état, lorsqu'une des deux notes doublées est déjà en place (les traités disent aussi: si la doublure n'est pas attaquée).
Doublure recommandée de la basse
Le renforcement de la basse par une doublure est tout à fait souhaitable dans les cas suivants:
Lorsqu'il s'agit d'une note tonale (le plus souvent IV ou V) et surtout dans l'enchaînement II6-V qui amène souvent une cadence. La meilleure position de la doublure est le plus souvent au ténor.
Lorsque la doublure est causée par des mouvements contraires et conjoints, pour l'intérêt des lignes mélodiques.
- Enfin, lorsqu'il s'agit du "faux accord de sixte", la basse étant la dominante.
Observez les accords de sixte dans les deux exemples suivants et déterminez pour lesquelles des raisons précédentes leurs basses ont été doublées.
La sixte napolitaine
C'est, dans le mode mineur, l'accord II6 amenant le Ve degré, mais dont la note de sixte (en fait, la deuxième note de la gamme) est abaissée d'un demi-ton chromatique. Cet effet musical employé par l'école de Naples (Renaissance italienne) a été emprunté par la musique tonale de toutes les époques suivantes.
Sa caractéristique consiste principalement à mettre en valeur l'intervalle dramatique de tierce diminuée entre sa sixte et la sensible de l'accord de dominante. (Note: ou encore une succession de deux demi-tons si on intercale un accord de quinte ou de quarte et sixte d'appoggiature.)
Dans la sixte napolitaine, on doit doubler la basse comme dans tout accord II6, car la note de sixte a un caractère descendant.
Note: lorsqu'on utilisera les 7e de dominante, on rencontrera un cas où il n'est pas maladroit de doubler la sixte, à condition que la basse reste en place et se dirige vers un accord de triton. Voir à ce sujet la page des modulations, sous-titres des Fausses relations et en particulier: "sixte napolitaine".
Conseils pour les basses données
Au début des études, on gagnera un temps précieux en se rappelant que la différence principale entre les accords 5 et 6 réside justement dans la note qui leur est propre et que symbolisent les chiffrages. Dans la plupart des cas, le meilleur choix est de placer la sixte au soprano, et lorsqu'on ne fait pas ce choix il faut au moins l'avoir soigneusement examiné car une ligne évidente en découle très souvent.
La meilleure position dans l'accord II6 amenant le Ve degré est presque toujours de laisser la sixte au soprano et de doubler la basse au ténor, souvent à la suite d'un intervalle ascendant.
Conseils pour les chants donnés
On a une basse à déterminer, à choisir entre les deux renversements possibles de l'accord qu'on aura imaginé sous le chant.
Au début des études, on peut se fier aux principes élémentaires suivants:
Quand le soprano est la tierce de l'accord entendu (imaginé), il vaut mieux mettre l'accord en position fondamentale.
Quand le soprano est la quinte ou la fondamentale de l'accord entendu, il est souvent plus adroit de choisir le premier renversement.
Emplois fréquents
Ne pas oublier que la basse de l'accord de sixte est souvent placée sur le VIIe degré (sur la sensible). Cependant, le caractère de l'accord est moins affirmatif que l'accord correspondant de quinte du Ve degré.
On la rencontre aussi sur les degrés III, IV et VI. Ces accords de sixte ont en fait les fonctions identiques aux accords de quinte des degrés I, II et IV. Remarquer que le IIe degré dans le mode mineur (accord diminué) perd son caractère geignant dès qu'il est employé sous forme de sixte (II6).
On rencontre rarement la basse de l'accord de sixte sur la tonique. Le plus souvent, cet accord de sixte succède à l'accord de quinte du Ier degré.
Occasionnellement, on peut rencontrer un accord de sixte dont la basse serait placée sur la dominante:
Au cours d'une suite conjointe d'accords de sixte (parallèles).
En tant que "faux accord de sixte", dans lequel la note de sixte est en fait une appoggiature de la quinte dans l'accord de dominante (voir exemple au paragraphe concernant les doublures recommandées à la basse).
Nouvelles précautions suite à l'emploi des renversements
Syncope d'harmonie
En principe, on ne prolonge pas sur un temps fort (en particulier sur un premier temps de mesure) une harmonie attaquée sur un temps faible, même lorsqu'il s'agit d'un seul accord présenté dans des renversements différents. On risque d'affaiblir la sensation de temps fort. Cette pratique pourra plus tard se présenter sans trop de gaucherie, par exemple lorsque les lignes musicales seront d'un bon intérêt contrapuntique.
Quintes ou octaves consécutives
Un ou des changements de renversement ou de position à l'intérieur d'un même accord ne dissimulent pas les fautes de quintes ou d'octaves consécutives entre une harmonie et la suivante: il faudrait qu'une autre harmonie (un troisième accord différent "isolant" les deux autres) soit entendue entre celle qui fait entendre la première quinte ou octave et celle qui fait entendre la seconde.
Exemple 1 : il y a trois fautes. Les quintes ou octaves marquées en deuxième mesure sont incorrectes, car elles se produisent au cours de deux harmonies consécutives. Même si elles se produisent sur temps faible en deuxième mesure, et même si dans une écriture plus complexe, plus tard, on pourra parfois tolérer certaines quintes ou octaves de ce genre, il faut pour le moment apprendre à les corriger, disons plutôt : à les maîtriser.
Exemples 2 et 3 : deux manières (parmi d'autres?) de corriger les fautes. On a tenu à corriger les trois fautes sans modifier le soprano ni la basse, comme dans une situation où il serait interdit d'y toucher (basse donnée, ou encore : chant donné). Bien d'autres modifications sont possibles si on a l'option de modifier le soprano, ou de fondamentalement changer la basse et l'harmonie. Il suffit souvent de déplacer une seule note (même si cela modifie une doublure) pour corriger le problème. Ici, le ré du ténor était le plus grand fautif, et justement les accords de sixte offrent un plus grand choix de positions usuelles.
Basses données : Henri Challan, 380 basses et chants donnés, recueil 1a. Série 31 à 45. Seuls, les 44 et 45 sont un peu plus délicats. À remarquer : le 33 pour la suite en sixtes parallèles (mesures 5 et 6), le 38 pour les successions 6 5, le 39 qui débute en une marche mozartienne bien connue, et surtout le 41 qu'il ne faut pas oublier en raison de la beauté des motifs mélodiques qui - déjà - peuvent se répondre de voix en voix.
Chants donnés : Henri Challan, 380 basses et chants donnés, recueil 1a. Exercices 46 et suivants. On peut préférer réaliser d'abord quelques exercices en majeur. À remarquer : le 48 fait appel à une quinte diminuée au 4e temps de la mesure 4. J'ai une allergie personnelle contre le 51, bien qu'il ait l'utilité de faire travailler une marche (mesures 5 et 6).
Redémarrage version cadres | Redémarrage version sans cadres |
Menu de la version sans cadres | |
1 - Introduction | 11 - Retards |
2 - Règles générales | 12 - Autres notes étrangères |
3 - Quinte | 13 - Pédales |
4 - Sixte | 14 - Basses non chiffrées |
5 - Quarte et sixte | 15 - Choral et autres styles |
6 - Modulations | 16 - Tableau des chiffrages |
7 - Septième de dominante | 17 - Bibliographie, biographies |
8 - Septièmes d'espèces | 18 - Liens utiles, recherches |
9 - Neuvièmes | 19 - Extraits d'un traité (Koechlin) |
10 - Altérations | 20 - L'auteur e-mail © |
© Michel Baron - Utilisation à des fins commerciales strictement interdite.
Utilisation autorisée à des fins personnelles ou pédagogiques seulement.
Ce site est entretenu de manière bénévole et sans but lucratif.